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concilie leur créance à l’orateur. C’est la partie la plus essentielle de l’éloquence ; toute l’adresse & toute la force de l’art y sont renfermées, car elle consiste principalement à convaincre & à émouvoir. Dans toutes les questions qu’on y traite, il faut autant qu’il est possible, remonter à un principe lumineux ; le présenter à ses auditeurs par tous les côtez qui peuvent le faire connoître, & ne le point quitter qu’on ne l’ait placé dans son véritable jour. On doit descendre ensuite aux conséquences par un chemin droit, & par des liaisons naturelles, ensorte que l’on voye la conclusion naître du principe établi dans le commencement. Ainsi le but de la confirmation, est de prouver une chose qui paroît douteuse, par une autre qui est tenue pour certaine.

La forme des preuves est différente, & l’art de l’orateur consiste à entremêler les enthymemes aux exemples, aux inductions, aux dilemmes, & à les revêtir de figures, pour ne leur pas donner un air uniforme qui deplairoit infailliblement.

Mais en rassemblant tous les argumens qui établissent sa cause, l’orateur doit être attentif à les arranger dans un ordre convenable, en mettant au commencement & à la fin les meilleures preuves, & les plus foibles dans le milieu ; c’est le sentiment de Ciceron dans son traité de l’orateur. (G)

CONFIRMER, (Jurisprud.) c’est déclarer ou reconnoître valable un acte. Une donation ou un testament sont confirmés par l’acquiescement que l’on donne à leur exécution ; ils sont aussi confirmés & d’une maniere plus solemnelle, lorsqu’ayant été débattus de nullité en justice, il intervient un jugement qui les déclare valables, & en ordonne l’exécution.

Le Roi confirme des statuts & privileges, & autres actes, par des lettres patentes ; mais il faut observer qu’il y a deux maximes en fait de confirmation : l’une est que, qui confirmat nihil dat, c’est-à-dire, que la confirmation n’ajoûte rien à ce qui est confirmé, si ce n’est l’approbation & l’autorité qu’elle y donne.

La seconde maxime est, que la simple confirmation d’un acte qui est nul de plein droit ne le rend pas valable, à moins que l’approbation qui est faite de l’acte ne soit émanée de celui qui avoit interêt de le contester ; par exemple, si le fils exherédé a approuvé le testament de son pere, il ne peut plus intenter la querelle d’inofficiosité.

Lorsqu’il y a appel d’une sentence, le juge supérieur peut la confirmer ou l’infirmer, si l’appel est pendant dans une cour souveraine : lorsque l’on confirme la sentence, on prononce que la cour met l’appellation au néant, & ordonne que ce dont est appel, sortira son plein & entier effet, & elle condamne l’appellant en l’amende & aux dépens ; néanmoins en matiere de grand criminel, la cour lorsqu’elle confirme, dit seulement qu’il a été bien jugé, mal & sans grief appellé.

Cette derniere forme de confirmer est la seule dont les juges inférieurs puissent user, soit en matiere civile ou en matiere criminelle.

On peut confirmer un jugement ou autre acte, dans une partie, & l’infirmer ou desapprouver dans l’autre.

Voyez au code 5. tit. XVI. l. 14. & au digest. 27. tit. IX. l. 2 & lib. XXIX. tit. vij. l. 7. & lib. XXXVII. tit. xiv. l. fin. Dumolin sur l’art. 5. de l’anc. coût. verbo, dénombrement, nn. 87. & suiv. Mornac, ad leg. de jurisdic. & le Prêtre, cent. 4. ch. xlv. (A)

Confirmer un cheval, (Manége) c’est achever de le dresser aux airs du manége. Voyez Air, Manége, &c. (V)

CONFISCATION, s. f. (Jurisprud.) est l’adjudication qui se fait d’une chose au profit du fisc, ou

de ceux qui en ont les droits ; c’est une peine prononcée par les loix contre ceux qui sont coupables de quelque délit, & qui est plus ou moins étendue selon la nature du délit : cette peine s’étend sur les héritiers du criminel qui sont privés de ses biens ; ce que l’on a ainsi établi pour contenir d’autant plus les hommes dans le devoir, par la crainte de laisser leur famille dans l’indigence.

C’est un usage reçû chez toutes les nations, mais pratiqué diversement selon les tems, les lieux, & les circonstances.

Chez les Romains, la confiscation fut inconnue dans l’âge d’or de la république, comme le remarque Ciceron dans l’oraison, pro domo suâ : Tam moderata judicia populi sunt à majoribus constitutæ, ut ne pœna capitis cum pecunia conjugatur.

Ce fut pendant la tyrannie de Silla que l’on fit la loi Cornelia, de proscript. qui déclaroit les enfans des proscrits incapables de posseder aucune dignité, & déclaroit les biens confisqués.

Sous les Empereurs la confiscation des biens avoit lieu en plusieurs cas, qui ne sont pas de notre usage : par exemple, tous les biens acquis par le crime étoient confisques ; la dot de la femme étoit confisquée pour le délit du mari ; celui qui avoit accusé (sans le prouver) un juge de s’être laissé corrompre dans une affaire criminelle, perdoit ses biens ; il en étoit de même de l’accusé, qui avoit laissé écouler un an sans comparoître, & ses biens ne lui étoient point rendus quand même par l’événement il auroit prouvé son innocence : la maison ou le champ dans lesquels on avoit fabriqué de la fausse monnoie étoient confisqués, quoique le délit eût été commis à l’insçu du propriétaire. On confisquoit aussi les biens de ceux qui n’étoient pas baptisés, de ceux qui consultoient les aruspices, d’un curateur nommé par collusion aux biens d’un mineur : d’un décurion qui avoit commerce avec sa servante ; les maisons où l’on avoit tenu des assemblées illicites, & où l’on faisoit des sacrifices prohibés ; celles où l’on joüoit aux chevaux de bois, qui étoit un jeu défendu ; les biens de ceux qui souffroient que l’on commît fornication dans leur maison, ou dans leur champ, de ceux qui étoient condamnés aux mines, & de ceux qui fréquentoient les spectacles un jour de Dimanche.

On voit par ce détail, que les loix Romaines étoient plus severes que les nôtres en bien des occasions ; mais la plûpart des Empereurs ne se prévaloient pas de la rigueur de ces loix. Trajan remettoit entierement la peine de la confiscation ; ce qui lui a mérité ce bel éloge de Pline : quæ præcipua tua gloria est, sæpius vincitur fiscus, cujus mala causa nusquam est nisi sub bono principe.

Antonin le pieux en faisoit don aux enfans du condamné ; Marc Antonin leur en remettoit la moitié. Il est fait mention dans le digeste de bonis damnat. l. 7. §. 3. d’une loi par laquelle Adrien avoit ordonné, que si un homme condamné à mort laissoit un enfant, on donnât à cet enfant la douzieme partie des biens de son pere ; & que si le condamné laissoit plusieurs enfans, alors tous les biens du pere leur appartinssent sans que la confiscation pût avoir lieu.

Valentinien en fit grace entiere aux enfans, ce que Théodose le grand étendit aux petits-enfans ; & aux défaut de descendans, il accorda le tiers aux ascendans ; enfin Justinien par sa novelle 17, abolit entierement le droit de confiscation ; il excepta seulement par sa novelle 34, le crime de lese-majesté.

En France la confiscation a été établie dès le commencement de la monarchie. Dagobert I. dans un édit de l’an 630, concernant l’observation du Dimanche, défend entr’autres choses de voiturer aucune chose par terre, ni par eau, à peine à l’égard