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lards nécessairement continens ; il est rare qu’il les rende chastes.

Voilà tout ce que la philosophie semble nous dicter sur la chasteté. Mais les lois de la religion Chrétienne sont beaucoup plus étroites ; un mot, un regard, une parole, un geste, mal intentionnés, flétrissent la chasteté chrétienne : le Chrétien n’est parvenu à la vraie chasteté, que quand il a su se conserver dans un état de pureté angélique, malgré les suggestions perpétuelles du démon de la chair. Tout ce qui peut favoriser les efforts de cet ennemi de notre innocence, passe dans son esprit pour autant d’obstacles à la chasteté : tels que les excès dans le boire & le manger, la fréquentation de personnes déreglées, ou même d’un autre sexe, la vûe d’un objet indécent, un discours équivoque, une lecture deshonnête, une pensée libre, &c. Voyez à Celibat, Mariage, & aux autres articles de cet Ouvrage, où l’on traite des devoirs de l’homme envers lui-même, ce qu’il faut penser de la chasteté.

Chasteté, (Medecine.) Voyez Mariage, Medecine ; & Virginité, Medecine.

CHASTOIS, s. m. (Jurisprud.) Dans la coûtume de Lorraine, tit. jv. art. viij. chastois corporel signifie punition corporelle. Ce mot paroît venir de châtier, châtiment. (A)

CHASUBLE, s. f. (Hist. ecclésiast.) habillement ecclésiastique que le prêtre porte sur l’aube, quand il célebre la messe. Voyez Aube. La chasuble des anciens différoit de la nôtre, en ce qu’elle étoit fermée de tout côté, & que la nôtre a deux ouvertures pour passer les bras. Toute la portion de la chasuble ancienne, comprise depuis le bas jusqu’à la hauteur des bras, se retroussoit en plis sur les bras, à droite & à gauche. La chasuble a succédé à la chape, parce que la chape étoit incommode ; cependant les Orientaux continuoient de donner la préférence à la chasuble, quand ils célebroient dans nos églises. Quant aux chapes, elles descendent originairement des manteaux ou robes des anciens ; voyez Chape : car les anciens n’usoient ni de chapes ni de chasubles. Il paroît que nos ornemens d’église sont pour la plûpart les vêtemens mêmes ordinaires des premiers Chrétiens, qu’on a conservés par respect, mais que les tems & la mode ont à la vérité fort défigurés ; car les anciens célebroient les mysteres avec leurs habits ordinaires ; c’est du moins le sentiment de plusieurs auteurs. Fleury, mœurs des Chrétiens.

CHAT, s. m. felis, catus, (Hist. nat.) animal quadrupede domestique, dont on a donné le nom à un genre de quadrupedes, felinum genus, qui comprend avec le chat des animaux très-sauvages & très féroces. Celui-ci a sans doute été préféré dans la dénomination, parce qu’y étant le mieux connu, il étoit le plus propre à servir d’objet de comparaison pour donner quelques idées du lion, du tigre, du léopard, de l’ours, &c. à ceux qui n’en auroient jamais vû. Il y a des chats sauvages ; on les appelle, en terme de chasse, chats-harests ; & il y a lieu de croire qu’ils le seroient tous, si on n’en avoit apprivoisé. Les sauvages sont plus grands que les autres ; leur poil est plus gros & plus long ; ils sont de couleur brune ou grise. Gensner en a décrit un qui avoit été pris en Allemagne à la fin de Septembre ; sa longueur depuis le front jusqu’à l’extrémité de la queue étoit de trois piés ; il avoit une bande noire le long du dos, & d’autres bandes de la même couleur sur les piés & sur d’autres parties du corps. Il y avoit une tache blanche assez grande entre la poitrine & le col ; le reste du corps étoit brun. Cette couleur étoit plus pâle, & approchoit du cendré sur les côtés du corps. Les fesses étoient rousses ; la plante des piés & le poil qui étoit à l’entour étoient noirs ; la queue étoit plus grosse que celle du chat domestique : elle avoit

trois palmes de longueur, & deux ou trois bandes circulaires de couleur noire.

Les chats domestiques different beaucoup les uns des autres pour la couleur & pour la grandeur : la pupile de ces animaux est oblongue ; ils n’ont que vingt-huit dents, savoir douze incisives, six à la machoire supérieure & six à l’inférieure ; quatre canines, deux en-haut & deux en-bas, elles sont plus longues que les autres ; & dix molaires, quatre en-dessus & six en-dessous. Les mammelles sont au nombre de huit, quatre sur la poitrine & quatre sur le ventre. Il y a cinq doigts aux piés de devant, & seulement quatre à ceux de derriere.

En Europe, les chats entrent ordinairement en chaleur aux mois de Janvier & de Février, & ils y sont presque toute l’année dans les Indes. La femelle jette de grands cris durant les approches du mâle, soit que sa semence la brûle, soit qu’il la blesse avec ses griffes. On prétend que les femelles sont plus ardentes que les mâles, puisqu’elles les préviennent & qu’elles les attaquent. M. Boyle rapporte qu’un gros rat s’accoupla à Londres avec une chatte ; qu’il vint de ce mêlange des petits qui tenoient du chat & du rat, & qu’on les éleva dans la ménagerie du roi d’Angleterre. Les chattes portent leurs petits pendant cinquante-six jours, & chaque portée est pour l’ordinaire de cinq ou six petits, selon Aristote ; cependant il arrive souvent dans ce pays-ci qu’elles en font moins. La femelle en a grand soin ; mais quelquefois le mâle les tue. Pline dit que les chats vivent six ans ; Aldrovande prétend qu’ils vont jusqu’à dix, & que ceux qui ont été coupés vivent plus long-tems. On a quantité d’exemples de chats & de chattes qui sans être coupés ont vécu bien plus de dix ans.

Tout le monde sait que les chats donnent la chasse aux rats & aux oiseaux ; car ils grimpent sur les arbres, ils sautent avec une très-grande agilité, & ils rusent avec beaucoup de dextérité. On dit qu’ils aiment beaucoup le poisson ; ils prennent des lézards ; ils mangent des crapauds ; ils tuent les serpens, mais on prétend qu’ils n’en mangent jamais. Les chats prennent aussi les petits lievres, & ils n’épargnent pas même leur propre espece, puisqu’ils mangent quelquefois leurs petits.

Les chats sont fort caressans lorsqu’on les a bien apprivoisés ; cependant on les soupçonne toûjours de tenir de la férocité naturelle à leur espece : ce qu’il y auroit de plus à craindre, lorsqu’on vit trop familierement avec des chats, seroit l’haleine de ces animaux, s’il étoit vrai, comme l’a dit Matthiole, que leur haleine pût causer la phthisie à ceux qui la respireroient. Cet auteur en rapporte plusieurs exemples. Quoi qu’il en soit, il est bon d’en avertir les gens qui aiment les chats au point de les baiser, & de leur permettre de frotter leur museau contre leur visage.

On a dit qu’il y avoit dans les Indes des chats sauvages qui voloient, au moyen d’une membrane qui s’étend depuis les piés de devant jusqu’à ceux de derriere, & qu’on avoit vû en Europe des peaux de ces animaux qui y avoient été apportées. Mais n’étoit-ce pas plûtôt des peaux d’écureuil volant, ou de grosse chauve-souris, que l’on prenoit pour des peaux de chats sauvages, de même que l’on a souvent donné l’opossum pour un chat ? Voyez Ald. de quad. digit. lib. III. cap. x. & xj. Voyez Quadrupede. (I)

Les chats ont l’ouverture de la prunelle fendue verticalement ; & leurs paupieres traversant cette figure oblongue, peuvent & fermer la prunelle si exactement qu’elle n’admet, pour ainsi dire, qu’un seul rayon de lumiere, & l’ouvrir si entierement, que les rayons les plus foibles suffisent à la vûe de ces animaux, par la grande quantité qu’elle en ad-