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* CHACAL, (Hist. nat. Zoolog.) animal dont quelques voyageurs racontent les particularités, & donnent la description suivante. Ils lui attribuent beaucoup de ressemblance avec le renard ; ils prétendent seulement que le chacal est plus gros, & qu’il a le poil plus rude & plus épais ; qu’il est commun dans les pays orientaux, mais sur-tout en Mingrelie, & dans les deserts de l’Arabie & de l’Assyrie ; qu’il est si carnassier qu’il déterre les morts, dévore les autres animaux, & mange les petits enfans : qu’il a le cri perçant & traînant comme le chat ; & que c’est l’hyene des anciens, & le dabuh des Africains. Chardin ajoûte qu’on l’appelle en latin crocuta, & en grec σύσισσα. Les voyageurs chargent encore leurs descriptions d’autres particularités si puériles, qu’on a cru devoir les omettre : telle est celle-ci, que quand ces animaux hurlent, ils s’entre-répondent en duo, l’un faisant la basse, & l’autre le dessus. Le chacal est, selon toute apparence, du nombre des animaux, ou qui sont désignés en histoire naturelle sous différens noms, ou qui n’étant connus que sur le récit des voyageurs, ordinairement assez mauvais naturalistes, ne mériteroient guere de place dans un ouvrage où l’on ne voudroit insérer que des choses bien sûres.

CHACART, s. m. (Manufact. & Comm.) toiles de coton à carreaux. Elles viennent particulierement de Surate. Il y en a de différentes couleurs.

CHACAINGA, (Géog. mod.) contrée de l’Amérique méridionale, au Pérou, dans l’audience de Lia.

CHACHAPOYAS, ou S. JEAN DE LA FRONTERA, (Géog. mod.) petite ville de l’Amérique méridionale, au Pérou, dans l’audience de Lima.

CHACK, (Géog. mod.) petite ville forte de la basse Hongrie, près de la Draw.

CHACO, (Géog. mod.) grand pays de l’Amérique méridionale, sur la riviere du Paraguai, borné par le Pérou, la province de la Plata, le pays des Amazones. Il est habité par des nations sauvages, peu connues des Européens.

CHACONNE, s. f. (Musique.) est une sorte de piece de musique faite pour la danse, dont le mouvement est modéré, & la mesure bien marquée. Autrefois il y avoit des chaconnes à deux tems & à trois : on n’en fait plus aujourd’hui qu’à cette derniere mesure. Ce sont pour l’ordinaire des chants qu’on appelle couplets, composés & variés de toutes les manieres, sur une basse contrainte de quatre en quatre mesures, commençant presque toûjours par le second tems. On s’affranchit insensiblement de cette contrainte de la basse, & l’on n’y a presque plus aucun égard. La beauté de la chaconne consiste à trouver des chants qui marquent bien la mesure, & comme elle est d’ordinaire fort longue, à varier tellement les couplets, qu’ils contrastent bien ensemble, & qu’ils réveillent sans cesse l’attention de l’auditeur. Pour cela on passe & repasse à volonté du majeur au mineur, sans quitter pourtant le ton par où l’on a commencé ; & du grave au gai, ou du tendre au vif, sans presser ni rallentir jamais la mesure.

La chaconne est née en Italie, & elle y étoit autrefois fort en usage, de même qu’en Espagne : on ne la connoît plus aujourd’hui qu’en France, dans nos opéra. (S)

Les chaconnes de Lulli ont eu autrefois, & ont encore beaucoup de réputation. Nous en avons dans d’autres opéra plusieurs qui sont estimées : celle de Sémélé de Marais, & celle de Pyrame & Thisbé de MM. Rebel & Francœur. Nous en avons trois admirables de M. Rameau ; celle des Sauvages dans les Indes galantes, celle des Fêtes de Polymnie, & celle de Naïs, dont nous parlerons tout-à-l’heure. (O)

Chaconne, s. f. (Danse.) elle tient de la danse haute, & de la danse terre-à-terre, & s’exécute sur une chaconne, ou sur un air de ce mouvement. Voy. Chaconne en Musique.

On a porté fort loin de nos jours ce genre de danse. Le fameux M. Dupré n’en a guere exécuté d’autre.

Comme les chaconnes sont composées de divers couplets ; que dans ceux du majeur on met ordinairement des traits de symphonie forts & fiers, & dans ceux du mineur, des traits doux, tendres, & voluptueux, ce danseur trouvoit dans cette variété les moyens de déveloper sa précision & ses graces.

Il y a une chaconne en action dans le premier acte de Naïs. Sur ce grand air de violons, on dispute les prix de la lutte, du ceste, & de la course. M. Dupré joüoit dans ce ballet le rôle principal : il recevoit des mains de Naïs le prix du vainqueur, & de celles du parterre les applaudissemens que mérite le plus grand talent en ce genre qu’on ait encore vû en Europe. (B)

* CHACOS, (Hist. nat. bot.) arbrisseau du Pérou, dont la feuille est ronde, mince, & d’un beau verd ; & le fruit rond d’un côté, applati de l’autre, d’une couleur cendrée, & contenant une graine fort menue, à laquelle on attribue la propriété lythontriptique & diurétique.

* CHACRILLE, voyez Cascarille.

CHADER, (Géog. mod.) île considérable d’Asie, formée par le Tigre & l’Euphrate, au-dessus de leur confluent.

* CHAFAUDIER, s. m. (Pêche.) c’est ainsi qu’on appelle sur les vaisseaux Bretons qui vont à la pêche de la morue, ceux de l’équipage dont la fonction est de dresser les échafauds sur lesquels on met sécher le poisson. MS. de M. Masson du Parc.

* CHAFERCONNÉES, s. m. pl. (Manuf. Com.) toiles peintes qui se fabriquent dans le Mogol. Voyez Toiles peintes.

CHAFFE, s. f. terme d’Amydonniers ; c’est ainsi que ces ouvriers appellent le son ou l’écorce du grain qui reste dans leurs sacs, après qu’ils en ont exprimé avec de l’eau toute la fleur du froment. Voyez Amydon, Amydonniers.

CHAGNI, (Géog. mod.) petite ville de France en Bourgogne, au Châlonnois, sur la Duesne.

CHAGRA, (Géog. mod.) riviere de l’Amérique méridionale, qui la sépare d’avec la septentrionale, & qui tombe dans la mer près de Porto-Bello.

* CHAGRIN, s. m. (Morale.) c’est un mouvement desagréable de l’ame, occasionné par l’attention qu’elle donne à l’absence d’un bien dont elle auroit pû joüir pendant plus long-tems, ou à la présence d’un mal dont elle desire l’absence. Si la perte du bien que vous regrettez étoit indépendante de vous, disoient les Stoïciens, le chagrin que vous en ressentez est une opposition extravagante au cours général des événemens : si vous pouviez la prévenir, & que vous ne l’ayez pas fait, votre chagrin n’en est pas plus raisonnable, puisque toute la douleur possible ne réparera rien. En un mot, le bien qui vous manque, le mal qui vous est présent, sont-ils dans l’ordre physique ? cet ordre est antérieur à vous ; il est au-dessus de vous ; il est indépendant de vous ; il sera postérieur à vous : laissez-le donc aller sans vous en embarrasser : sont-ils dans l’ordre moral ? le passé n’étant plus, & le présent étant la seule chose qui soit en votre puissance, pourquoi vous affliger sur un tems où vous n’êtes plus, au lieu de vous rendre meilleur pour le tems où vous êtes, & pour celui où vous pourrez être ? Il n’y a aucune philosophie, disoit Epictete, à accuser les autres d’un mal qu’on a fait ; c’est en être au premier pas de la philosophie, que de s’en accuser soi-même ; c’est