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se précipitoient du haut d’un rocher pour éviter une honteuse captivité, & pour ne pas languir dans les infirmités de la vieillesse. Ceux qui se donnoient ainsi librement la mort, avoient une place distinguée dans le valhalla. De-là cette audace que les Celtes portoient dans les combats, cette ardeur qui les précipitoit dans les bataillons les plus épais, cette fermeté avec laquelle ils bravoient les plus grands dangers, ce mépris qu’ils avoient pour la mort. Nous finirons cet article, en remarquant que les Celtes ne s’étoient endurcis & accoûtumés à mener dans leurs forêts une vie si dure & si ennemie de tous les plaisirs, que parce qu’ils étoient intimement persuadés du dogme de l’immortalité des esprits. De-là naissoit en eux ce courage, que les Romains ont si souvent admiré dans ces peuples ; ce mépris de la mort qui les rendoit si redoutables à leurs ennemis ; cette passion qu’ils avoient pour la guerre, & qu’ils inspiroient à leurs enfans ; cette chasteté, cette fidélité dans les mariages si recommandée parmi eux ; cet éloignement qu’ils avoient pour le faste des habits & le luxe de la table : tant l’espoir d’une récompense dans une autre vie a de pouvoir sur l’esprit des hommes ! Il est fâcheux qu’une nation aussi respectable par ses mœurs & par ses sentimens que l’étoit celle des Celtes, ait eu des druides pour ministres de sa religion. (X)

* CELTIBERIENS, s. m. pl. (Géog. & Hist.) peuples de l’ancienne Gaule qui s’établirent en Espagne le long de l’Iber : leur nom est composé de Celte, celui de leur origine, & d’Ibériens, celui des peuples avec lesquels ils s’allierent. Ils se répandirent dans l’Aragon & la Castille. Florus les appelle la force de l’Espagne.

CELTIQUE, (Géog.) c’est ainsi qu’on appella la colonie des Celtes ou des Celtiberes, qui s’établirent en Espagne depuis le Douron jusqu’au promontoire Celtique, qu’on présume être le cap Finisterre. Voyez Celtes & Celtiberes. On donna aussi le nom de Celtique à la partie de la Gaule qu’occupoient les Celtes.

CEMENT, s. m. (Chimie.) c’est une composition ou un mêlange de différentes matieres salines, terreuses, ou phlogistiques, en forme de poudre ou de pâte, avec lesquelles on stratifie, ou dont on entoure certains métaux dans la cementation. Voyez Cementation. Cet article est de M. Venel.

Cement royal, (Chimie.) c’est le cément destiné à la purification de l’or : il tire son nom de la qualité de roi des métaux, par laquelle les Chimistes désignent souvent l’or. Le cément royal le plus simple, & qui est décrit dans de très-anciens ouvrages, étoit composé de deux parties de sel commun, & d’une partie de poudre de brique, farinæ laterum, empâtées avec de l’urine.

On trouve beaucoup d’autres recettes de cément, qui portent aussi le titre de royal : c’est toûjours du nitre ou du sel commun, avec du vitriol calciné, de la brique pulvérisée, des bols, quelquefois de la pierre hæmatite, & du verd-de-gris. On a trouvé un usage à ces deux dernieres matieres : on prétend qu’elles exaltent la couleur de l’or. Article de M. Venel.

CEMENTATION, s. f. (Chimie.) la cémentation prise dans le sens le plus étendu, est l’opération chimique par laquelle on applique à des métaux enfermés dans un creuset, dans une boîte de fer, ou même dans une cornue, & stratifiés avec des sels fixes, avec différentes matieres terrestres, & quelquefois phlogistiques, un feu tel, que ces métaux rougissent plus ou moins, mais sans entrer aucunement en fusion.

On voit d’abord par cette définition, que les métaux qui coulent avant de rougir, l’étain & le plomb,

ne sauroient être comptés parmi les sujets de cette opération.

La cémentation est un des moyens employés, surtout par les ouvriers qui travaillent l’or & l’argent, pour vérifier la pureté de ces métaux, ou pour l’obtenir ; & c’est-là même le principal usage de cette opération. Mais des observations répétées ont appris qu’elle étoit insuffisante pour l’un & pour l’autre objet ; c’est-à-dire que les cemens ordinaires n’enlevoient pas exactement à l’or & l’argent les métaux étrangers qui constituoient leur impureté, & qu’ils enlevoient une partie du fin. Kunckel a observé que le sel commun employé aux cémentations répétées de l’argent, se chargeoit d’une quantité assez considérable de ce métal, qu’on en retiroit facilement par la fusion.

Geber compte la cémentation parmi les épreuves que devoit soûtenir son magistere, pour être réputé parfait.

L’usage des cémentations est trés-familier aux Alchimistes, soit comme opération simplement préparatoire, ou entrant dans la suite de celles qui composent un procédé ; soit comme produisant immédiatement une amélioration, nobilitatio. C’est l’argent pur ou les chaux d’argent, c’est-à-dire, l’argent ouvert ou divisé par des menstrues, sur lequel ils ont principalement opéré. Voyez Particulier.

Becher décrit plusieurs de ces particuliers ou procédés, dans sa Concordance chimique ; & il n’est presqu’aucun des six mille auteurs d’Alchimie qui n’en célebre quelqu’un.

La trempe en paquet, ou cette opération par laquelle les Arquebusiers, les Taillandiers, & quelques autres ouvriers durcissent ou convertissent plus ou moins profondément les lames en acier ou couches extérieures de certains ouvrages, comme de presque toutes les pieces des platines des armes à feu, les lames d’épée, les bonnes cuirasses, les haches, les limes, les boucles appellées d’acier, &c. cette opération, dis-je, est une espece de cémentation. Voyez Fer.

Les matieres des cémens pour l’or & pour l’argent, sont premierement le nitre, la plûpart des sels neutres marins, le sel commun, le sel gemme, le sel ammoniac, le sublimé corrosif, & même une substance saline qui contient l’acide végétal, le verdet ; secondement les vitriols calcinés, les bols, la farine ou poudre de brique, &c.

On prend une ou plusieurs matieres de la premiere classe, & quelques-unes de celles de la seconde, dans des proportions convenables : par exemple, prenez du sel marin décrepité, une once ; de la poudre de brique, demi-once ; du vitriol calciné au rouge, une once : ou de nitre, de sel ammoniac, de verdet, de bol d’Arménie, de poudre ou farine de brique, de chacun parties égales : séchez & pulvérisez toutes vos matieres, & mêlez-les exactement. Quelques auteurs, principalement les anciens, les empâtent avec l’urine.

On cemente aussi l’argent avec le sel commun seul. Voyez Argent.

Le modus ou manuel de l’opération, est celui-ci : prenez un creuset de grandeur convenable ; mettez au fond, de votre cement environ la hauteur d’un pouce ; placez dessus une couche de votre métal réduit en petites plaques très-minces ; couvrez ces plaques d’une seconde couche de cément, à peu près de la même hauteur que la premiere, & remplissez alternativement votre creuset de cément & de lames de métal ; finissez par une couche de cément, sur laquelle vous pouvez en mettre une autre de chaux vive en poudre, selon l’usage de quelques Chimistes ; fermez votre creuset avec un couvercle exactement luté, mais percé d’un petit trou à passer une aiguille ;