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lene ; & lorsqu’on en voit deux, on les nomme Castor & Pollux. Mussch. Ess. de Phys. Voyez Feu Saint-Elme, & l’article qui suit.

* Castor & Pollux, (Myth.) fils de Jupiter & de Léda ; ils furent élevés à Pallene, où Mercure les porta aussi-tôt qu’îls furent nés. Ils s’illustrerent dans l’expédition de la toison d’or : à leur retour ils nettoyerent l’Archipel des corsaires qui l’infestoient. Ce service, l’apparition de deux feux qui voltigerent autour de leur tête, & le calme qui succéda, les firent placer après leur mort, au nombre des dieux tutélaires des nautoniers. Ces feux continuerent d’être regardés comme des signes de la présence de Castor & Pollux. Si l’on n’en voyoit qu’un, il annonçoit la tempête ; s’il s’en montroit deux, on espéroit le beau tems. Nos Marins sont encore aujourd’hui dans la même opinion ou dans le même préjugé ; & ils appellent feux S. Elme & S. Nicolas, ce que les payens appelloient feux de Castor & Pollux. Les deux freres invités aux noces de leurs parentes Hilaire & Phébé, les enleverent. Ce rapt coûta la vie à Castor, qui périt quelque tems après de la main d’un des époux. Pollux, qui aimoit tendrement son frere, demanda à Jupiter la résurection de Castor, & le partage entr’eux de l’immortalité qu’il devoit à sa naissance. Jupiter l’exauça ; & l’un fut habitant des enfers, pendant que l’autre fut citoyen des cieux. Cette fable est fondée sur ce que l’apothéose de ces héros les a placés dans le signe des Gemeaux, dont l’une des étoiles descend sous l’horison quand l’autre y paroît. Pour célébrer leurs fêtes, les Romains envoyoient tous les ans vers leur temple, un homme couvert d’un bonnet comme le leur, monté sur un cheval, & en conduisant un autre à vuide. La Grece les compta parmi ses grands dieux : ils eurent des autels à Sparte & dans Athenes. Les Romains leur éleverent un temple par lequel on juroit : le serment des hommes étoit œdepol, par le temple de Pollux ; & celui des femmes œcastor, par le temple de Castor. Les deux dieux parurent plusieurs fois au milîeu des combats sur des chevaux blancs. On les représentoit sous la figure de jeunes hommes, avec un bonnet surmonté d’une étoile, à cheval, ou en ayant près d’eux. Ils sont connus dans les Poetes sous le nom de Dioscures, ou fils de Jupiter, & de Tyndarides, parce que leur mere étoit femme de Tyndare roi de Sparte. Ils se distinguerent dans les jeux de la Grece : Castor, par l’art de dompter & de conduire des chevaux, ce qui le fit appeller dompteur de chevaux ; Pollux, par l’art de lutter, ce qui le fit regarder comme le patron des athletes. V. M. l’ab. de Claustre.

CASTOREA, s. f. (Hist. nat. bot.) genre de plante, dont le nom a été dérivé de celui de Castor Durantes Medecin de Rome. La fleur des plantes de ce genre est monopétale, & faite en forme de masque, dont la levre supérieure est relevée, & l’inférieure divisée en trois parties : la partie moyenne est divisée en deux pieces. Le calice devient un fruit charnu, arrondi, composé d’une seule capsule qui renferme quatre semences anguleuses. Plumier, nova plant. Amer. gener. Voyez Plante. (I)

CASTOREUM. Voyez Castor.

CASTOS, (Commerce.) nom qu’on donne dans le Japon aux droits d’entrée & de sortie que l’on paye pour les marchandises qu’on y porte ou qu’on en tire : ou plûtôt ce sont les présens que les Européens avoient coûtume de faire tous les ans pour y être reçûs, avant que les Hollandois se fussent emparés de tout le commerce de ces îles ; ce qui leur tenoit lieu de droits, & alloit beaucoup au-delà de ceux qu’ils auroient pû payer. Diction. du Commerce. (G)

CASTRAMETATION, s. f. c’est proprement l’art de marquer le camp & d’en déterminer toutes les dif-

férentes proportions. Ce mot vient du latin castrum,

camp, & de metiri, mesurer. Voyez Camp.

La Castramétation, est une partie si importante de l’Art militaire, qu’il doit paroître assez étonnant qu’elle ait été absolument négligée dans les auteurs modernes qui ont écrit sur la guerre.

Polybe & Végece sont entrés dans un grand détail sur celle des Romains ; & leurs écrits ont beaucoup servi à l’établissement de l’ordre & de l’arrangement de nos camps, quoiqu’ils different à plusieurs égards de ceux des Romains.

Du tems de Polybe les camps des Romains étoient toûjours quarrés : mais du tems de Végece, qui a écrit plusieurs siecles après, ils avoient différentes figures relatives à celles des terrains que les armées devoient occuper.

Le général se campoit dans l’endroit du camp le plus avantageux, pour découvrir tout ce qui s’y passoit & pour envoyer ses ordres. Les troupes Romaines & celles des alliés étoient distribuées en différentes parties de cavalerie & d’infanterie, de maniere qu’elles avoient, pour ainsi-dire, chacune une espece de quartier séparé ; ces camps étoient toûjours entourés d’un retranchement formé d’un fossé & d’un parapet dont la terre étoit soûtenue par des pieux ou palissades que les soldats portoient avec eux pour cet effet dans les marches.

Cette police des Romains étoit oubliée en Europe, lorsque le fameux Maurice, Prince d’Orange, songea à la rétablir, ou plûtôt à l’imiter vers la fin du xvi. & le commencement du xviie siecle. On ne peut douter que les troupes n’ayent toûjours eu une sorte de camp pour se mettre à l’abri du mauvais tems, & se reposer des fatigues militaires : mais le silence des Historiens sur ce sujet, nous laisse ignorer absolument l’ordre qu’on pouvoit y observer.

Le Pere Daniel, qui a fait de savantes recherches sur tout ce qui concerne notre milice ancienne & moderne, croit que ce fut dans les guerres d’Italie sous Charles VIII. & Louis XII. que nos généraux apprirent à se retrancher en campagne de maniere à rendre le camp inaccessible à l’ennemi.

Le plus célebre & le plus ancien que nous connoissions est celui du Maréchal Anne de Montmorency à Avignon. « Il le fit de telle sorte, dit l’auteur qu’on vient de nommer, que l’empereur Charles V. étant descendu en Provence, n’osa jamais l’attaquer, nonobstant la grande envie qu’il avoit d’en venir à une action décisive ; & ce fut cette conduite du Maréchal qui sauva le royaume ».

Dans les guerres civiles qui s’éleverent en France après la mort d’Henri II. on n’observoit, suivant la Nouc dans ses Discours politiques & militaires, aucune regle dans le campement des armées. On distribuoit les troupes dans les villages ou les petites villes les plus voisines du lieu où l’armée se trouvoit ; ou bien on campoit en pleine campagne avec quelques tentes qu’on plaçoit sans arrangement régulier. On se fortifioit avec les chariots de l’armée dont on faisoit une espece de retranchement : mais les troupes n’étoient pas dans cette sorte de camp à portée de se mouvoir avec ordre pour s’opposer aux attaques imprévûes de l’ennemi ; elles y manquoient d’ailleurs de la plûpart des commodités & des subsistances nécessaires : aussi ne campoient-elles de cette façon que rarement & pour très-peu de tems. L’attention des généraux étoit de pouvoir occuper différens villages assez proches les uns des autres, pour se soûtenir réciproquement : mais comme il n’étoit pas aisé d’en trouver ainsi lorsque les armées étoient nombreuses, il arrivoit souvent que l’ennemi enlevoit ou détruisoit plusieurs de ces quartiers avant qu’ils pussent être secourus des autres plus éloignés.

Les Hollandois s’étant soustraits à l’obéissance de