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pont courant devant arriere. On entaille en divers endroits du premier pont, des ouvertures à peu près d’un pié & demi en quarré, entre les baux, & elles répondent dans le fond de cale ; ensuite on fait des dales ou petits conduits de planches qu’on joint, & on leur donne un pouce & demi de large ; on les fait aussi de fer blanc : on pose trois de ces dales à trois côtés de chaque mât, & elles s’étendent tout du long du bâtiment, à stribord & à bas-bord, & vont se rendre toutes ensemble dans une autre grande dale qui est en travers, à six ou sept piés de la place où se met le timonier. On fait encore une dale assez longue, qui descend du gaillard d’arriere en biais, jusqu’à la grande dale qui est en travers sur le premier pont, laquelle longue dale vient encore se rendre dans une autre petite, qui est sur le gaillard d’arriere où se tient le timonier, & à l’un des deux côtés, selon qu’il est le plus commode. Dans le bordage du gaillard d’arriere, on fait une trape large, au-dessous de laquelle se peut poster une chaloupe de bonne nage, afin que le timonier, après avoir mis le feu dans les conduits, y puisse promptement descendre. Ensuite on remplit les dales d’artifice, savoir, d’une certaine portion de poudre, comme la moitié, d’un quart de salpetre, d’un demi-quart de soufre commun ; le tout bien mêlé ensemble, & imbibé d’huile de graine de lin, mais non pas trop, parce que cela retarderoit l’embrasement, & que l’effet doit être prompt. Après cela on couvre ces dales de toile soufrée, ou de gros papier à gargousses, & l’on apporte des fagots, de menus copeaux, ou d’autres menus bois, trempés dans l’huile de baleine, qu’on arrange en forme de toît sur les dales, en les mettant bout à bout. Ces fagots sont préparés & trempés dans des matieres combustibles, comme du soufre commun pilé & fondu, du salpetre, & les trois quarts de grosse poudre, de l’étoupe, & de l’huile de baleine, le tout bien mêlé ensemble. On pend aussi au second pont par-dessous, toutes sortes de matieres combustibles, & l’on en met par-tout avec des paquets de vieux fils de carret bien goudronnés ; l’on y pend encore des paquets de soufre ou de lisieres soufrées. Tout le dessous du premier pont est aussi fort bien goudronné, de même que le dessous du second pont ; & avec le goudron dont le dessus du premier pont est encore enduit, il y a par-tout des étoupes que le goudron retient, & qui sont mêlées avec du soufre. On remplit encore les vuides du bâtiment de tonnes poissées pleines de ces copeaux minces & serpentans, qui tombent sous le rabot des Menuisiers.

Les cordages, les vergues, les voiles sont poissées & soufrées ; les extrémités de la grande vergue sont garnies de grapins de fer, de même que celles de misene & de beaupré. Lorsqu’on construit des brûlots de bois neuf, on n’y employe que du plus chétif & du plus léger, & où le feu prend plus aisément.

Quand on veut se servir de brûlots, on ouvre tous les sabords, les écoutilles, & les autres endroits destinés à donner de l’air ; ce qui se fait souvent par le moyen des boîtes de pierrier qu’on met tout proche, & qui faisant ensemble leur décharge par le moyen des traînées de poudre, s’ouvrent tout à la fois. A l’avant sous le beaupré, il y a un bon grapin qui pend à une chaîne, & un à chaque bout de chaque vergue, & chacun de ces grapins est amarré à une corde qui passe du lieu où ils sont tout le long du bâtiment, & va se rendre au gaillard d’arriere, à l’endroit où se tient le timonier ; laquelle corde, aussitôt que le brûlot a abordé le vaisseau, le timonier doit couper avant que de mettre le feu au brûlot ; il fait ses efforts pour accrocher le navire ennemi par l’avant, & non par les côtés.

On arme les brûlots de 10 ou 12 hommes qui ont la double paye à cause des dangers qu’ils courent,

& de quelques passe-volans pour faire montre seulement,

hormis à l’arriere où il y a deux canons de fer, pour se défendre contre les chaloupes & canots.

On dit adresser ou conduite un brulot, & détourner un brûlot, lorsqu’on l’empêche d’aborder. (Z)

BRULURE, s. f. les Chirurgiens nomment ainsi la solution de continuité qu’occasionne la force du feu dans une partie du corps. Ils distinguent ordinairement la brûlure en différens degrés, desquels le premier est quand la brûlure fait seulement élever sur la peau quelques pustules accompagnées de rougeur, & qu’elle occasionne une séparation entre l’épiderme & la peau naturelle.

Le second degré est quand la peau est brûlée, séchée & retirée, mais qu’il ne s’y est pas formé de croûte ou de galle.

Le troisieme est quand la chair, les veines, les nerfs, &c. sont retirés par la force de la brûlure, & qu’il s’est formé une croûte. Lusitanus recommande pour la brûlure, un onguent fait de cendres de feuilles de laurier, avec de la graisse de cochon, ou du sain-doux ; ou bien l’unguentum populeum, avec des feuilles de vigne dont on enveloppe la partie malade. Panarole observe que si on met de la boue sur une brûlure, on diminue la douleur. Les brasseurs d’Hollande se servent d’une decoction de lierre pour guérir la brûlure. Quelques auteurs prescrivent dans les brûlures l’usage des médicamens terreux en forme seche, tels que le bol d’Arménie, la terre sigillée, l’argile, &c. pour éteindre, disent-ils, les particules ignées comme on éteint le feu lorsqu’on lui interdit la communication de l’air qui l’environne, ce que l’on appelle communément étouffer : mais ces médicamens bouchant les pores par leur adhérence, empêchent aussi par la grossiereté de leur matiere, la détente des solides, & la suppuration qu’on ne peut trop promptement procurer. S’ils avoient lieu, ce seroit tout au plus à l’instant d’une brûlure légere, & ils agiroient comme répercussifs & astringens, de même que la boue dont on a coûtume d’envelopper la partie au moment qu’elle vient d’être brûlée, & qui étant moins seche doit être préférée, outre qu’elle se trouve plus promptement sous la main. En général les anodyns sont fort indiqués dans la brûlure, parce qu’ils relâchent les vaisseaux dont la crispation est la cause des douleurs aiguës qu’on sent à la partie brûlée. Voy. Anodyn. On employe avec assez de succès les fomentations avec l’esprit de vin dans les premiers pansemens ; les saignées sont fort utiles pour calmer ou prévenir les accidens.

La brûlure qui est une maladie, sert quelquefois de remede. M. Homberg remarque que les habitans de l’île de Java se guérissent d’une colique qui leur donneroit la mort, en se brûlant la plante des piés, & qu’ils se guérissent les panaris, en trempant leurs doigts dans l’eau bouillante à diverses reprises.

Les voyageurs rapportent beaucoup d’autres exemples de maladies, que l’on guérit par l’application du feu ; & nous en voyons les effets nous-mêmes, qui pratiquons cette maniere de guérir les chevaux, les chiens de chasse, les oiseaux de proie, &c.

On s’est servi contre la goutte, d’une sorte de mousse apportée des Indes, que l’on brûloit sur la partie affligée. Voyez Moxa. M. Homberg a rapporté les exemples de deux femmes guéries, l’une d’une violente douleur de tête & d’yeux, & l’autre d’une douleur de jambes & de cuisses, par la brûlure accidentelle de ces parties. Il ajoûte que la brûlure peut guérir par l’une de ces trois manieres, ou en mettant les humeurs peccantes dans un plus grand mouvement, & en leur facilitant un nouveau passage, ou en brisant & en dissolvant leur viscidité ; ou en détruisant les canaux qui charrioient ces mêmes hu-