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lui-ci, voyez Chevalier, &c. D’autres veulent que le nom de bachelier ait été commun à tous les degrés compris entre le simple gentilhomme & le baron.

Quand l’amiral n’étoit ni comte, ni baron, il étoit nommé bachelier ; & « il est à noter que quand l’amiral va par le pays pour assembler vaisseaux de guerre, ou pour autre affaire du royaume, s’il est bachelier, il recevra par jour quatre chelins sterlins ; s’il est comte ou baron, ses gages seront à proportion de son état & rang ».

Le titre de bachelier se donnoit plus particulierement à tout jeune homme de condition qui faisoit sa premiere campagne, & qui recevoit en conséquence la ceinture militaire.

Bachelier, signifioit encore celui qui dans le premier tournois où il eut jamais combattu, avoit vaincu quelqu’un.

On disoit anciennement bacheliers au lieu de bas chevaliers, parce que les bacheliers formoient le plus bas ordre de chevaliers ; ils étoient au-dessus des bannerets, &c. Voyez Chevalier.

On appelle maintenant ceux-ci equites aurati, à cause des éperons qu’on leur met lors de leur réception.

D’abord cette dignité ne se donnoit qu’aux gens d’épée : mais dans la suite on la conféra aussi aux gens de robbe longue. La cérémonie en est extrèmement simple. L’aspirant s’étant mis à genoux, le roi le touche doucement d’une épée nue, & dit, sois chevalier au nom de Dieu ; & après, avance, chevalier. Voyez Chevalier & Noblesse.

Bachelier, est encore un terme dont on se sert dans les universités pour designer une personne qui a atteint le baccalauréat, ou le premier degré dans les Arts libéraux & dans les Sciences. Voyez Degré.

C’est dans le treizieme siecle que le degré de bachelier a commencé à être introduit par le pape Grégoire IX. mais il est encore inconnu en Italie. À Oxford, pour être reçu bachelier ès Arts, il faut y avoir étudié quatre ans, trois ans de plus pour devenir maitre ès Arts, & sept ans encore pour être bachelier en Théologie.

A Cambridge, il faut avoir étudié près de quatre ans pour être fait bachelier ès Arts, & plus de trois ans encore avant que d’être reçu maître, & encore sept ans de plus pour devenir bachelier en Théologie. Il ne faut avoir étudié que six ans en Droit pour être reçu bachelier de cette faculté.

A Paris, pour passer bachelier en Théologie, il faut avoir étudié deux ans en Philosophie, trois en Théologie, & avoir soûtenu deux examens, l’un sur la Philosophie, & l’autre sur la premiere partie de la somme de saint Thomas, qui comprend les traités de Dieu, & des divins attributs de la Trinité, & des anges. Ces deux examens doivent se faire à un mois l’un de l’autre, devant quatre docteurs de la faculté de Théologie, tirés au sort, avec droit de suffrage. Un seul mauvais billet ne laisse au candidat que la voie de l’examen public qu’il peut demander à la faculté. S’il se trouve deux suffrages defavorables, il est refusé sans retour. Lorsque les examinateurs sont unanimement contens de sa capacité, il choisit un président à qui il fait signer ses theses ; & quand le syndic les a visées, & lui a donné jour, il doit les soûtenir dans l’année à compter du jour de son second examen. Dans quelqu’une des écoles de la faculté, c’est-à-dire, des colleges ou des communautés qui sont de son corps, cette these roule sur les mêmes traités théologiques, qui ont servi de matiere à ce second examen, & on la nomme tentative. Le président, quatre bacheliers en licence, & deux bacheliers amis, y disputent contre le répondant ; dix docteurs qu’on nomme censeurs y assistent avec droit de suffrage ; les bacheliers de licence l’ont aussi, mais pour la forme, leurs voix n’étant comptées pour rien. Chaque censeur a deux

billets, l’un qui porte sufficiens, & l’autre incapax. Un seul suffrage contraire suffit pour être refusé. Si le candidat répond d’une maniere satisfaisante, il va à l’assemblée du premier du mois, qu’on nomme prima mensis, se présenter à la faculté devant laquelle il prête serment. Ensuite le bedeau lui délivre ses lettres de baccalauréat, & il peut se preparer à la licence.

On distingue dans la faculté de Théologie de Paris deux sortes de bacheliers : savoir bacheliers du premier ordre, baccalaurei primi ordinis, ce sont ceux qui font leur cours de licence ; & ceux du second ordre, baccalaurei secundi ordinis, c’est-à-dire les simples bacheliers qui aspirent à faire leur licence, ou qui demeurent simplement bacheliers. L’habit des uns & des autres est la soutane, le manteau long, & la fourrure d’hermine doublée de soie noire.

Pour passer bachelier en Droit à Paris, il faut l’avoir étudié deux ans, & avoir soûtenu un acte dans les formes. Pour être bachelier en Medecine, il faut, après avoir été quatre ans maître ès Arts dans l’université, faire deux ans d’étude en Medecine & subir un examen, après quoi on est revêtu de la fourrure pour entrer en licence. Dans l’université de Paris, avant la fondation des chaires de Theologie, ceux qui avoient étudié six ans en Théologie, étoient admis à faire leurs cours, d’où ils étoient nommés baccalarii cursores : & comme il y avoit deux cours, le premier pour expliquer la bible pendant trois années consécutives ; le second, pour expliquer le maître des sentences pendant une année ; ceux qui faisoient leur cours de la bible étoient appellés baccalarii biblici ; & ceux qui étoient arrivés aux sentences, baccalarii sententiarii. Ceux enfin qui avoient achevé l’un & l’autre étoient qualifiés baccalarii formati ou bacheliers formés.

Il est fait mention encore de Bacheliers d’Église, baccalarii ecclesiæ, l’évêque avec ses chanoines & bacheliers, cum consilio & consensu omnium canonicorum suorum & baccalariorum. Il n’y a guere de mot dont l’origine soit plus disputée parmi les critiques que celui de bachelier, baccalarius ou baccalaureus : Martinius prétend qu’on a dit en latin baccalaureus, pour dire bacca laurea donatus, & cela par allusion à l’ancienne coûtume de couronner de laurier les poëtes, baccis lauri, comme le fut Petrarque à Rome en 1341. Alciat & Vivès sont encore de ce sentiment, Rhenanus aime mieux le tirer de baculus ou baccilus, un bâton, parce qu’à leur promotion, dit-il, on leur mettoit en main un bâton, pour marquer l’autorité qu’ils recevoient, qu’ils avoient achevé leurs études, & qu’ils étoient remis en liberté ; à peu près comme les anciens gladiateurs, à qui l’on mettoit à la main un bâton pour marque de leur congé ; c’est ce qu’Horace appelle rude donatus. Mais Spelman rejette cette opinion, d’autant qu’il n’y a point de preuve qu’on ait jamais pratiqué cette cérémonie de mettre un bâton à la main de ceux que l’on créoit bacheliers ; & d’ailleurs cette étymologie conviendroit plûtôt aux licentiés qu’aux bacheliers, qui sont moins censés avoir combattu qu’avoir fait un premier essai de leurs forces, comme l’insinue le nom de tentative que porte leur these.

Parmi ceux qui soûtiennent que les bacheliers militaires sont les plus anciens, on compte Cujas, qui les fait venir de buccellarii, sorte de cavalerie fort estimée autrefois ; du Cange, qui les tire de baccalaria, sorte de fiefs ou de fermes qui contenoient plusieurs pieces de terre de douze acres chacune, ou de ce que deux bœufs pouvoient labourer. Selon lui les possesseurs de ces baccalaria étoient appelles bacheliers. Enfin Caseneuve & Hauteserre font venir bacheliers de baculus ou bacillus, un bâton, à cause que les jeunes cavaliers s’exerçoient au combat avec des bâtons, ainsi que les bacheliers dans les universités