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On remarque en général dans tous les écrits de cet auteur beaucoup de génie, de critique, & d’érudition, mais aussi beaucoup de vanité & d’esprit satyrique. Son fils Scaliger (Joseph-Juste) marcha sur ses traces, le surpassa même en érudition, mais non pas en génie.

Emilio (Paolo) en latin Æmilius Paulus, (nom que nous avons francisé en celui de Paul Emile), étoit un savant de Verone, dont la réputation se répandit au-delà des monts. Le cardinal de Bourbon l’attira dans ce royaume sous le regne de Louis XII. & lui fit donner un canonicat de la cathédrale de Paris, où il fut enterré l’an 1529. On l’engagea à faire en latin l’histoire des rois de France, & il s’appliqua à ce travail avec un grand soin : il y employa bien des années, sans avoir pu mettre la derniere main au dixieme livre qui devoit comprendre les commencemens du regne de Charles VIII. C’étoit un homme difficile sur son travail, & qui trouvoit toujours quelque chose à corriger.

Son histoire s’étend depuis Pharamond jusqu’à l’an 1488, qui est le cinquieme du regne de Charles VIII. Le dixieme livre fut trouvé parmi ses papiers en assez mauvais état ; un parent de l’auteur se donna le soin de l’arranger, & de le mettre en ordre.

Les éditions de cet ouvrage sont en assez grand nombre ; la premiere contenoit neuf livres, & parut avant l’année 1539 ; la seconde en 1539 ; elle fut suivie par celles de 1544, de 1550, de 1555, de 1566, de 1576, toutes chez le même Vascosan. On en fit aussi une édition à Bâle en 1601 in-fol. il y en a plusieurs versions françoises ; les unes sont completes, & les autres incompletes.

Juste Lipse porte de l’histoire de Paul Emile un jugement fort avantageux, quoique mêlé de quelques traits de censure. On ne peut nier que cette histoire ne soit géneralement parlant bien écrite ; & l’auteur n’avoit alors en France aucun rival dans la belle latinité ; mais ses harangues sont controuvées à plaisir, & déplacées dans plusieurs endroits, où il fait parler des barbares doctement & éloquemment, comme auroient parlé les anciens Romains. On peut encore lui reprocher d’être trop diffus sur les matieres étrangeres, & trop serré sur son principal sujet. (Le chevalier de Jaucourt.)

VERONESE le, ou le VERONOIS, (Géogr. mod.) contrée d’Italie, dans l’état de Venise. Elle est bornée au nord par le Trentin, au midi par le Mantouan, au levant par le Padouan & le Vicentin, au couchant par le Bressan. Son étendue du nord au sud est d’environ quarante milles, & de trente deux de l’est à l’ouest : c’est un pays arrosé de sources & de ruisseaux ; il est très-fertile en blé, en vin, en fruits, & en huile ; ses principales villes sont Vérone capitale, Peschiera, & Garde. (D. J.)

VÉRONIQUE, s. m. (Hist. nat. Bot.) veronica, genre de plante, à fleur monopétale, en rosette profondément découpée ; le pistil sort du calice ; il est attaché comme un clou au milieu de la fleur, & il devient dans la suite un fruit membraneux & divisé en deux loges ; ce fruit renferme des semences qui sont minces dans quelques especes, & épaisses dans d’autres. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante.

Quoique Tournefort compte quarante-trois especes de véronique, & qu’il y en ait plus d’une employée en médecine, nous décrirons seulement la commune, veronica mas, vulgatissima, I.R.H. 143. en anglois the male speed-well.

Sa racine est déliée, fibreuse, serpentante, & vivace. Elle pousse plusieurs tiges menues, longues, rondes, nouées, & couchées ordinairement sur la surface de la terre ; ses feuilles naissent opposées deux à deux le long de ses tiges, assez semblables à celles du prunier, velues, dentelées en leurs bords, d’un goût amer & âcre.

Ses fleurs sont disposées en maniere d’épi, comme celles de la germandrée, petites, de couleur bleuâtre, quelquefois blanches, avec deux étamines de même couleur, à sommets oblongs ; chacune d’elles est une rosette à quatre quartiers ; quand cette fleur est tombée, il lui succede un fruit en cœur, partagé en deux bourses ou loges, qui contiennent plusieurs semences menues, rondes, noirâtres.

Cette plante croît aux lieux incultes, secs, pierreux, sur les côteaux, dans les bois & dans les bruyeres ; elle fleurit en été.

Dans le système de Linnæus, la véronique est un genre distinct de plante, comme dans Tournefort ; voici ses caracteres. Le calice est divisé en quatre segmens, étroits, pointus, & subsistans après la chute de la fleur ; la fleur est monopétale, en forme de tube cylindrique, & à-peu-près de la longueur du calice ; ce tube est applati dans sa position, & se divise à l’extrémité en quatre quartiers de figure ovale ; les étamines sont deux filets très-étroits dans le fond, & panchés vers le sommet ; les bossettes des étamines sont oblongues ; le pistil a le germe applati ; le stile est un filet panché & de la longueur des étamines ; le stigma est simple, le fruit est une capsule turbinée, taillée en cœur, & plate au sommet ; il contient deux loges partagées en quatre cloisons, & pleines d’un grand nombre de semences arrondies. Linnæi, gen. plant. p. 4. (D. J.)

Véronique, (Mat. méd.) on emploie en médecine plusieurs especes de véronique, parmi lesquelles celle que les botanistes appellent véronique mâle, ou thé de l’Europe (veronica mas, supina & vulgaussima, C.B.P. & inst. rei herb. veronica vulgatior folio rotundiore J. B.), est la plus usitée, cette plante est une de celles que les pharmacologistes, tant anciens que modernes, ont pris en affection, on ne sait pas trop pourquoi, à laquelle ils ont attribué un grand nombre de vertus singulieres, propres, uniques ; quoique cette plante ne puisse être regardée que comme un simple altérant, & même des moins actifs, & qu’il existe dans la nature un très-grand nombre de plantes dont l’analogie médicamenteuse avec la véronique, est à peu-près démontrée. Ces plantes sont entre autres, presque toutes les labiées de Tournefort, & principalement la germandrée, l’ivette, la sauge, la menthe, le pouliot, le lierre terrestre, l’hysope, le stechas, la bétoine, &c.

La véronique est aromatique ; elle donne une eau distillée, bien parfumée, mais point d’huile essentielle, selon le rapport de M. Carthouser.

Ce ne sont que les feuilles de cette plante qui sont d’usage en médecine ; elles ont un goût amer-aromatique & légerement âpre.

La nature de ces principes & l’observation concourent à prouver que les magnifiques éloges donnés à la véronique doivent être restreints à attribuer à cette plante la qualité légerement tonique, stomachique, diaphorétique, foiblement emménagogue, propre à aromatiser les boissons aqueuses, chaudes, qu’on a coutume de prendre abondamment dans les rhumes, certaines maladies d’estomac, certaines coliques intestinales ou rénales, les rhumatismes légers, &c. & à corriger la fadeur & la qualité trop relâchante de ces boissons ; pour cet effet on emploie ses feuilles fraîches, ou plus communément seches, à la dose de deux ou trois pincées par pinte d’eau, & on en fait une infusion théïforme. Cette infusion peut aussi s’employer utilement à couper le lait de chevre ou de vache. Voyez Lait, &c.

Mais il faut toujours se ressouvenir qu’il n’est prouvé par aucun fait que cette plante soit plus efficace, ni dans les cas que nous venons de citer, ni dans aucun autre, que celles que nous avons nommées plus haut. Une des maladies à laquelle la vero-