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observateur habile reconnoîtra sans peine qu’ils ont existé par les matieres que nous venons d’indiquer, & sur-tout par les couches de lave que les volcans ont fait sortir de leurs flancs, & qui ont inondé les campagnes dans leur voisinage. Voyez l’article Lave. Plusieurs montagnes d’Europe ont été autrefois des volcans. Les monts Apennins paroissent avoir été dans ce cas. On a rencontré en Auvergne des matieres qui indiquent d’une maniere indubitable que cette province a autrefois été fouillée par les feux souterreins. L’endroit de la Provence, qu’on nomme les gorges d’Olioule, qui se trouve sur le chemin de Marseille à Toulon, porte des caracteres qui annoncent qu’il y a eu autrefois un volcan dans cette partie de la France. Plusieurs autres pays présenteroient les mêmes signes, si on les examinoit plus attentivement. La description que le célebre M. de Tournefort nous a donnée du mont Ararat en Arménie, peut nous faire présumer avec beaucoup de certitude que cette montagne est un volcan dont le feu s’est éteint ; il dit qu’il s’y trouve un abysme dont les côtés sont comme taillés à plomb, & dont les extrémités sont hérissées des rochers noirâtres & comme salis par la fumée ; on voit que cette description convient parfaitement au bassin d’un volcan.

Les montagnes ne sont point toujours le siege des éruptions des feux souterreins ; on a vu quelquefois sortir tout-à-coup du fond du lit de la mer, des feux, des rochers embrasés, de la pierre-ponce, & un amas prodigieux de sable, de cendres, & de matieres qui ont formé des îles dans des endroits où peu auparavant il n’y avoit que des eaux ; c’est de cette maniere que s’est formée la fameuse île de Santorin. Un phénomene pareil arriva en 1720 auprès de l’île de S. Michel, l’une des Açores ; la nuit du 7 au 8 de Décembre il sortit tout-d’un-coup du fond de la mer une quantité prodigieuse de pierres, de sable, & de matieres embrasées, qui formerent une île toute nouvelle à côté de la premiere, que cette révolution avoit presque entierement renversée. Urbani Hiærne.

Les feux contenus dans le sein de la terre n’agissent point toujours avec la même fureur, souvent ils brûlent sans bruit, & couvent, pour ainsi dire, sous terre ; on ne reconnoît leur présence que par les sources d’eaux chaudes que l’on voit sortir à la surface de la terre, par les bitumes liquides, tels que le pétrole & le naphte que la chaleur fait suinter au-travers des roches & des couches de la terre. C’est ainsi que dans le voisinage de Modene on trouve en creusant une quantité prodigieuse de pétrole qui nage à la surface des eaux.

Quelquefois on rencontre à la surface de la terre des endroits qui brûlent, pour ainsi dire, imperceptiblement ; c’est ainsi que l’on trouve dans le Dauphiné un terrein qui, sans être embrasé visiblement, ne laisse pas d’allumer la paille & le bois qu’on y jette. Il se trouve un terrein tout semblable, mais d’une beaucoup plus grande étendue, en Perse près de Baku. Voyez l’article Naphte. L’on doit aussi mettre dans le même rang l’endroit connu en Italie sous le nom de Solfatara. Voyez cet article. (—)

Volcan, (Géog. mod.) on appelle volcans des montagnes brûlantes, & qui jettent du feu, des flammes, de la fumée, des cendres chaudes, avec plus ou moins de violence, & en quantité plus ou moins grande. Le nom de volcan a été donné à ces sortes de montagnes par les Portugais, & l’usage l’a adopté. On sait qu’il y a des volcans dans les quatre parties du monde, en Amérique, en Afrique, en Asie, en Europe. Voici la liste des principaux, & je ne la donne pas pour exacte.

On connoît dans l’Amérique septentrionale le volcan

d’Anion près de la mer du sud, celui d’Atilan, celui de Cataculo, celui de Colima, celui de Guatimala, celui de Léon, celui de Nicaragua, celui de Sonsonate, & quelques autres.

On trouve dans l’Amérique méridionale au Pérou le volcan d’Arequipa, à 90 lieues de Lima : c’est une montagne qui jette sans discontinuer un soufre enflammé, & les habitans appréhendent que tôt ou tard elle ne brûle ou n’abysme la ville voisine.

On trouve encore au Pérou dans une vallée appellée Mulahallo, à cinquante lieues de Quito, un volcan sulfureux qui s’enflamma dans le dernier siecle, & jetta des pierres hors de son sein, avec un bruit terrible. Dans la chaîne des montagnes du Pérou appellées les Andes ou Cordillieres, il y a en différens lieux des montagnes qui vomissent les uns de la flamme & les autres de la fumée ; telle est celle de Carrapa, province de Popayane.

L’Asie abonde en volcans ; un d’eux dans l’île de Java, se forma en 1586, par une éruption violente de soufre, & vomit une quantité prodigieuse de fumée noire mêlée de flamme & de cendres chaudes : cette éruption fut fatale à quelques milliers de personnes.

Le volcan Gonapi, situé dans une des îles Banda, ayant brûlé plusieurs années de suite, se creva finalement dans le dernier siecle, & vomit avec mugissement une furieuse quantité de grosses pierres accompagnées d’une matiere sulfureuse, brûlante & épaisse, qui tomba sur la terre & dans la mer. Les cendres chaudes couvrirent les canons des Hollandois, qui étoient plantés sur les murs de leur citadelle. L’eau se gonfla auprès de la côte, bouillonna, & laissa quantité de poissons morts flottant sur la surface.

Le mont Balaluanum, dans l’île de Sumatra, jette des flammes & de la fumée, de même que le mont Etna.

On voit plusieurs volcans sur les côtes de l’Océan indien, qui sont décrits dans les voyages de Dampier ; mais le plus terrible de tous est celui de l’île Ternate.

La montagne est roide & couverte au pié de bois épais ; mais son sommet qui s’éleve jusqu’aux nues, est pelé par le feu. Le soupirail est un grand trou qui descend en ligne spirale, & devient par degrés de plus en plus petit, comme l’intérieur d’un amphithéatre. Dans le printems & en automne, vers les équinoxes, quand le vent du nord regne, cette montagne vomit avec bruit des flammes mêlées d’une fumée noire, & toutes les montagnes des environs se trouvent couvertes de cendres. Les habitans y vont dans certains tems de l’année, pour y recueillir du soufre, quoique la montagne soit si escarpée en plusieurs endroits, qu’on ne peut y parvenir qu’avec des cordes attachées à des crochets de fer.

L’île Manille dans l’Océan indien, a ses volcans ; les navires qui viennent de la nouvelle Espagne, apperçoivent de fort loin celui qui est près de la grande baie d’Albay, & qui jette des flammes dans certains tems.

A soixante lieues des Moluques, on voit une île dont les montagnes sont souvent secouées par des tremblemens de terre suivis d’éruptions de flammes, de cendres & de pierres-ponces calcinées.

Le volcan de l’île de Fuego, une des petites îles du Cap-verd, est une haute montagne du sommet de laquelle il sort des flammes qu’on apperçoit en mer dans le tems de la nuit.

Le Japon abonde en volcans ; il y en a un considérable à soixante milles de Firando ; il y en a un autre vis-à-vis de Saxuma, un troisieme dans la province de Chiangen, un quatrieme dans le voisinage du Surunga, un cinquieme plus considérable que tous les autres dans l’île de Ximo ; son sommet n’est qu’une