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VISÉU, ou VÉISO, (Géog. mod.) ville de Portugal, dans la province de Beira, à 5 lieues au nord de Mondégo, à 16 au nord-ouest de Cuarda, à 20 au nord-est de Coïmbre, dans une plaine délicieuse par sa fertilité. Cette ville est épiscopale, & son évêque jouit de quinze mille ducats de revenu. Véiso est encore la capitale d’une comarea & d’un duché qui a été quelquefois possédé par des princes du sang royal. Longit. 9. 40. latit. 40. 32.

Barros (Jean dos) naquit à Viseu en 1496, & fut élevé à la cour du roi Emmanuel au près des infans. Jean III. étant monté sur le trône, le nomma trésorier des Indes, tesoreiro da casa da India ; cette charge très-honorable & d’un grand revenu, lui inspira la pensée d’écrire l’histoire d’Asie ou des Indes, qu’il a publiée sous le nom de decadas d’Asia. Il donna la premiere décade en 1552, la seconde en 1553, & la troisieme en 1563 ; la quatrieme décade de son histoire ne fut publiée qu’en 1615 par les ordres du roi Philippe III. qui fit acheter les manuscrits des héritiers de cet auteur. D’autres écrivains ont travaillé à la continuation de cette histoire jusqu’à la douzieme décade. L’ouvrage de Barros est généralement estimé, quoi qu’en dise le sieur de la Boulaye, & il a été traduit en espagnol par Alphonse Ulloa. (D. J.)

VISIAPOUR, (Géog. mod.) ou Visapour, ou Visapor, royaume des Indes, dans la presqu’ile de l’Inde en-deçà du Gange, sur la côte de Malabar. Ce royaume confine par le nord au royaume de Dehli, & aux autres états du Mogol, au joug duquel il est soumis. La capitale de ce royaume en porte le nom. (D. J.)

Visiapour, (Géogr. mod.) Visapour, Visapor, ville des Indes, dans la presqu’île en-deçà du Gange, capitale du royaume de Décan, sur le fleuve Mandova. On lui donne trois lieues de circuit & de grands fauxbourgs. Le roi du pays y a son palais ; ce prince est tributaire du grand Mogol. Longit. suivant le pere Catrou, 124. 30. lat. 19. 25. (D. J.)

VISIBLE, adj. (Optique.) se dit de tout ce qui est l’objet de la vue ou de la vision, ou ce qui affecte l’œil de maniere à produire dans l’ame la sensation de la vue. Voyez Vision.

Les philosophes scholastiques distinguent deux especes d’objets visibles, les uns propres ou adéquats, qu’il n’est pas possible de connoître par d’autres sens que par celui de la vue, & les autres communs, qui peuvent être connus par différens sens, comme par la vue, l’ouie, le toucher, &c.

Ils ajoutent que l’objet propre de la vision est de deux especes, lumiere & couleur.

Selon ces philosophes, la lumiere est l’objet formel, & la couleur l’objet matériel. Voyez Objet.

Les Cartésiens raisonnent d’une maniere beaucoup plus exacte en disant que la lumiere seule est l’objet propre de la vision, soit qu’elle vienne d’un corps lumineux à-travers un milieu transparent, soit qu’elle soit réfléchie des corps opaques sous une certaine modification nouvelle, & qu’elle en représente les images, soit enfin qu’étant réfléchie ou rompue de telle ou telle maniere, elle affecte l’œil de l’apparence de couleur.

Selon le sentiment de M. Newton, il n’y a que la couleur qui soit l’objet propre de la vue ; la couleur étant cette propriété de la lumiere par laquelle la lumiere elle-même est visible, & par laquelle les images des objets opaques se peignent sur la rétine. Voyez Lumiere & Couleur.

Aristote, de animâ, lib. II. compte cinq especes d’objets communs qui sont visibles, & que l’on regarde ordinairement comme tels dans les écoles, le mouvement, le repos, le nombre, la figure & la grandeur. D’autres soutiennent qu’il y en a neuf, qui sont compris dans les vers suivans.

Sunt objecta novem visûs communia : quantum,
Inde figura, locus, sequitur distantia, situs,
Continuumque & diseretum, motusque, quiesque.

Les philosophes de l’école sont fort partagés sur ces objets communs de la vision : il y a là-dessus deux opinions principales parmi eux. Ceux qui tiennent pour la premiere opinion disent que les objets communs visibles produisent une représentation d’eux-mêmes par quelque image particuliere, qui les fait d’abord appercevoir indépendamment des visibles propres.

Suivant la seconde opinion qui paroît plus suivie & plus naturelle que la premiere, les objets communs visibles n’ont aucune espece formelle particuliere qui les rende visibles ; les objets propres se suffisent à eux-mêmes pour se faire voir en tel ou tel endroit, situation, distance, figure, grandeur, &c. par les différentes circonstances qui les rendent sensibles au siege du sentiment.

I. La situation & le lieu des objets visibles s’apperçoivent sans aucunes especes intentionnelles qui en émanent ; cela se fait par la simple impulsion ou réflexion des rayons de lumiere qui tombent sur les objets, les rayons parviennent à la rétine, & leur impression est portée au sensorium ou au siege du sentiment.

Un objet se voit donc par les rayons qui en portent l’image à la rétine, & il se voit dans l’endroit où la faculté de voir est, pour ainsi dire, dirigée par ces rayons. Suivant ce principe, on peut rendre raison de plusieurs phénomenes remarquables de la vision.

1°. Si la distance entre deux objets visibles forme un angle insensible, les objets, quoique éloignés l’un de l’autre, paroîtront comme s’ils étoient contigus ; d’où il s’ensuit qu’un corps continu n’étant que le résultat de plusieurs corps contigus, si la distance entre plusieurs objets visibles n’est apperçue que sous des angles insensibles, tous ces différens corps ne paroîtront qu’un même corps continu. Voyez Continuité.

2°. Si l’œil est placé au-dessus d’un plan horisontal, les objets paroîtront s’élever à proportion qu’ils s’éloigneront davantage, jusqu’à ce qu’enfin ils paroissent de niveau avec l’œil. C’est la raison pourquoi ceux qui sont sur le rivage s’imaginent que la mer s’éleve à proportion qu’ils fixent leur vue à des parties de la mer plus éloignées.

3°. Si l’on place au-dessous de l’œil un nombre quelconque d’objets dans le même plan, les plus éloignés paroîtront les plus élevés ; & si ces mêmes objets sont placés au-dessus de l’œil, les plus éloignés paroîtront les plus bas.

4°. Les parties supérieures des objets qui ont une certaine hauteur, paroissent pancher ou s’incliner en avant, comme les frontispices des églises, les tours, &c. & afin que les statues qui sont au-haut des bâtimens paroissent droites, il faut qu’elles soient un peu renversées en-arriere. La raison générale de toutes ces apparences est que quand un objet est à une distance un peu considérable, nous le jugeons presque toujours plus près qu’il n’est en effet. Ainsi l’œil étant placé en A, fig. 20. au-dessous d’un plancher horisontal BC, l’extrémité C lui paroît plus proche de lui comme en D, & le plancher BC paroît incliné en BD. Il en est de même des autres cas.

II. L’ame apperçoit la distance des objets visibles, en conséquence des différentes configurations de l’œil, de la maniere dont les rayons viennent frapper cet organe, & de l’image qu’ils impriment.

Car l’œil prend une disposition différente, selon les différentes distances de l’objet, c’est-à-dire que,