Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 17.djvu/315

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

caracteres propres dans la tablature ; savoir le battement, la langeur, la plainte, que pour cette raison on va expliquer.

Le battement se fait lorsque deux doigts étant posés sur la corde près l’un de l’autre, l’un appuie sur la corde, & l’autre la bat fort légerement.

La langueur se fait en variant le doigt sur la touche ; on la pratique ordinairement lorsqu’on est obligé de toucher une note du petit doigt, & que la mesure le permet ; cet agrément comme le précédent, doit durer autant que la note.

La plainte se fait en traînant le doigt sur la corde d’une touche à l’autre prochaine en descendant, sans le lever. Cet agrément n’est propre que pour les pieces de mélodie ou d’harmonie ; car dans l’accompagnement on ne doit pas le pratiquer, ou ce doit être rarement avec beaucoup de prudence, afin qu’il n’en résulte aucun mauvais effet contre les autres parties. Cet agrément se fait en procédant par le miton majeur ou mineur ; il est fort touchant & pathétique, parce qu’il touche en passant les degrés enharmoniques.

En général, on ne connoît en France que trois sortes d’instrumens appellés violes ; savoir la basse de viole qui a sept cordes ; & le dessus & le par-dessus de viole qui en ont six. Ces trois instrumens ne different que par la grosseur, & ressemblent au violon, à l’exception que la table de dessous est plate, le manche plus large & distingué par des touches, & qu’ils ont plus de cordes.

Ce que les Italiens appellent alto viola, est la haute-contre de celle dont nous parlons, & leur tenore viola en est la taille. Quelquefois ils l’appellent simplement la viole : quelques auteurs prétendent que c’est la lyra ; d’autres, la cythara ; d’autres, la chelys ; & d’autres, la testudo des anciens. Voyez Lyre, &c.

2°. La viole d’amour, viola d’amore, est une espece de triple viole ou violon, ayant six cordes de cuivre ou d’acier, comme celles du clavessin ; elle rend une espece de son argentin, qui a quelque chose de très-agreable.

3°. La grande viole qui a 44 cordes, & que les Italiens appellent viola di bardone : mais cet instrument n’est guere connu.

4°. La viole bâtarde que les Italiens appellent viola bastarda, & dont les Anglois ne jouent pas non plus. Brossard la prend pour une basse de viole, qui est montée de six ou sept cordes, & sur le même ton que la viole ordinaire.

5°. Ce que les Italiens appellent viola di braccio, ou simplement braccio, est un instrument qui répond à notre haute contre de dessus, & cinquieme violon.

6°. La viole premiere, ou viola prima des Italiens, est précisément notre violon haute-contre, ou du moins les Italiens se servent ordinairement de la clé c sol ut, à la premiere ligne, pour marquer la musique composée pour cet instrument.

7°. La viole seconde, viola secunda, répond assez à notre violon taille ; elle a la clé de c sol ut, à la seconde ligne.

8°. La viole troisieme, est à-peu-près la même chose que notre cinquieme violon ; elle a la clé de c sol ut, à la troisieme ligne.

9°. La viole quatrieme, viola quarta, n’est point connue en Angleterre ni en France ; mais il en est fait souvent mention dans les compositions italiennes : la clé est à la quatrieme ligne.

Enfin, la petite viole, violetta, est précisément notre viole triple ; mais les étrangers confondent souvent ce terme avec ce que nous venons de dire de la viole premiere, seconde, troisieme, &c.

VIOLENCE, (Mythol.) divinité fille du Styx, & compagne inséparable de Jupiter : elle avoit un temple dans la citadelle de Corinthe, conjointement

avec la Nécessité ; mais il n’étoit permis à personne d’y mettre le pié, dit Pausanias. (D. J.)

VIOLENT. EMPORTE, (Synon.) il semble que le violem va jusque à l’action, & que l’emporté s’arrête ordinairement aux discours.

Un homme violent est prompt à lever la main ; il frappe aussi-tôt qu’il menace. Un homme emporté est prompt à dire des injures ; il se fâche aisément.

Les emportés n’ont quelquefois que le premier feu de mauvais ; les violens sont plus dangereux.

Il faut se tenir sur ses gardes avec les personnes violentes ; & il ne faut souvent que de la patience avec les personnes emportées. Girard. (D. J.)

VIOLET, s. & adj. (Teinture.) couleur mêlée de bleu & de rouge, qui ressemble à la fleur qui porte le nom de violette. Les soies violettes cramoisies doivent être faites de pure cochenille avec la galle à l’épine, l’arsenic & le tartre ; & après avoir été bien bouillies & lavées, être passées dans une bonne cuve d’Inde sans mélange d’autres ingrédiens. Les violets ordinaires doivent être montés de brésil, de bois d’Inde ou d’orseille, puis passés à la cuve d’Inde. La teinture des laines violettes cramoisi se fait de cuve & de cochenille, sans y mêler d’orseille ni autres ingrédiens. A l’égard des fils, les violets rose-seche & amarante claire se teignent avec le brésil, & se rabattent avec la cuve d’Inde on indigo. (D. J.)

VIOLETTE, s. f. (Hist. nat. Bot.) viola, genre de plante dont la fleur est anomale & composée de plusieurs pétales ; elle ressemble à une fleur papilionacée ; les deux pétales supérieurs ont la forme d’un étendart ; les deux latéraux représentent des ailes, & l’inférieur est fait comme une carene. Le pistil sort du calice, & devient dans la suite un fruit ordinairement à trois angles, qui s’ouvre en trois parties, & qui renferme des semences le plus souvent arrondies. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante.

La violette ordinaire, viola martia purpurea, flore simplici odoro, I. R. H. 420, est l’espece la plus commune de ce genre de plante. Tout le monde la connoît. Sa racine est fibrée, touffue, vivace. Elle pousse beaucoup de feuilles arrondies, larges comme celles de la mauve, dentelées en leurs bords, vertes, attachées à de longues queues.

Il s’éleve d’entr’elles des pédicules grêles, qui soutiennent chacun une petite fleur très-agréable à la vue, d’une belle couleur pourprée ou bleue tirant sur le noir, d’une odeur fort douce & réjouissante, d’un goût visqueux accompagné de tant-soit-peu d’âcreté. Cette fleur charmante est composée de cinq petits pétales avec autant d’étamines à sommets obtus, & d’une espece d’éperon ; le tout est soutenu par un calice divisé jusqu’à la base, en cinq parties.

A cette fleur succede un capsule ovale, qui dans sa maturité s’ouvre en trois quartiers, & laisse voir plusieurs semences presque rondes, attachées contre les parois de la capsule, plus menues que celles de la coriandre, & de couleur blanchâtre.

Cette plante croît aux lieux ombrageux, en terre grasse, dans les fossés, le long des haies, contre les murailles, à la campagne & dans les jardins, où elle se multiplie aisément par des filets longs & rampans, qui prennent racine çà & là. Elle fleurit au premier printems vers le mois de Mars, & ne perd point ses feuilles & sa verdure pendant l’hiver.

Tournefort compte cinquante-trois especes de violettes ; car cette plante donne des feuilles & des fleurs très-variées, simples, doubles, pourpres, bleues, jaunes, blanches, de trois couleurs, &c.

Les violettes du Chily different encore des européennes, selon le p. Feuillée, en ce que leurs fleurs ne donnent aucune odeur, & que leurs feuilles sont alternes, taillées en fer de pique, assez semblables à