Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 17.djvu/301

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nue la quantité de soufre. Enfin on le laisse bien reposer & on le soutire. Ce moût devient clair comme de l’eau-de-vie, & conserve toujours sa douceur. Il n’est point mal-sain, & même peut être utile dans plusieurs maladies du poumon ; cependant on en fait principalement usage pour bonifier les vins auxquels l’année n’a pas été favorable ; car quelques pots de ce vin muet, jettés dans une barrique de vin trop verd, le rendent potable ; & c’est un mélange non seulement innocent, mais très-bien imaginé. (D. J.)

Vin de Gaza, (Littérat.) vin célebre de Palestine. Grégoire de Tours parle plusieurs fois du vin de Gaza en Palestine, vina Gazatina. Il raconte entre autres choses à ce sujet, que la femme d’un sénateur de Lyon, offroit régulierement à chaque messe qu’elle faisoit celebrer pour son mari, un septier de ce vin ; & qu’elle s’apperçut un jour en communiant sous les deux especes, que le soudiacre qui servoit à l’autel prenant sans doute pour lui le vin de Gaza, en avoit substitué d’autre. On ne sera point étonne de trouver du vin de Palestine en France sous la premiere race, si l’on se souvient que dès-lors les habitans de Syrie venoient y commercer. (D. J.)

Vins grecs, (Agricult.) il paroît que les Romains étoient beaucoup plus curieux que nous ne le sommes des vins grecs en genéral, & de certains vins grecs en particulier. J’avoue que le mahometisme a presque fait abandonner la culture des vignes dans les lieux où il s’est établi ; j’avouerai même que le sol a pu changer de nature ; mais il faut aussi convenir que les gouts des hommes sont encore plus variables. Strabon trouvoit le vin de Samos détestable ; & nous le mettions dans le dernier siecle au rang des excellens muscats. Aucun ancien n’a loué le vin de Tenédos, qui passoit il n’y a pas long-tems pour le meilleur de l’Archipel ; le vin de Chypre autrefois méprise, fait aujourd’hui nos delices en France. Les fameux vignobles d’Alexandrie, d’Egypte, ne produisent plus de vins de notre goût ; ils sont tombés dans l’oubli : cependant personne n’ignore le cas que faisoient les anciens du vin Maréotique ; les vignobles de ce vin d’Alexandrie étoient alors si excellens, que cette ville est représentée dans une médaille d’Adrien, sur le symbole d’une femme qui tient du blé d’une main, & une vigne de l’autre. Nous ne prisons guere les vins de Scio, que les Romains estimoient singulierement, & que Caton, selon Pline, trouva le secret de contrefaire au point de tromper les plus fameux gourmets. Dans tous les vins qui se transportoient des iles de l’Archipel, les anciens y mêloient de l’eau de mer, pour corriger leur trop grande force & leur trop grande rudesse. On suit encore cet usage aujourd’hui, & voici la maniere dont ils font leurs vins par tout l’Archipel.

Chaque particulier a un réservoir de la grandeur qu’il juge à propos, quarre, bien maçonné, revétu de ciment ; mais tout découvert. On foule les raisins dans ce réservoir, après les y avoir laissé sécher pendant deux ou trois jours ; à mesure que le moût coule par un trou de communication, dans un bassin qui est au bas du réservoir, on remplit de ce moût des outres que l’on porte à la ville : on les vuide dans des futailles, ou dans de grandes cruches de terre cuite, enterrées jusqu’à l’ouverture, dans lesquelles ce vin nouveau bout tout à son aise sans marc ; on y jette trois ou quatre poignées de plâtre, suivant la grandeur de la piece ; souvent on y ajoute une quatrieme partie d’eau douce, ou d’eau salée, selon la commodité des lieux. Après que le vin a suffisamment cuvé, on bouché les vaisseaux avec du plâtre gâché. (D. J.)

Vin de haut pays, (Commerce.) ce sont les vins de toutes sortes de crûs, qui se recueillent au-dessus de S. Macaire, qui est à 7 lieues au-dessus de Bor-

deaux. On les nomme ainsi pour les distinguer de

ceux qui se font dans la sénéchaussée de Bordeaux, qu’on appelle vins de ville. (D. J.)

Vin, (Critique sacrée.) on employoit ordinairement cette liqueur pure dans les sacrifices que l’on offroit au Seigneur ; mais l’usage en étoit défendu aux prêtres pendant qu’ils étoient dans le tabernacle occupés au service de l’autel, Lévit. x. 9. Ce mot se prend par métaphore pour la vengeance de Dieu, Jerém. xxv. 15. & pour les biens temporels, Cantiq. j. 1. ubera tua meliora sunt vino.

Entre tous les vins de l’Idumée, le plus estimé étoit celui du Liban dont parle Osée, xiv. 8. Il croissoit sur certains côteaux de cette montagne.

Vin de myrrhe, myrrliatum vinum, Marc, xv.23. étoit une sorte de liqueur qui se donnoit aux suppliciés pour leur causer une sorte d’ivresse, & amortir en eux le sentiment de la douleur. Voyez Myrrhe. Vin parfumé, conditum vinum, vin qu’on aromatisoit avec des parfums pour le rendre plus agréable ; il en est parlé dans le Cantiq. viij. 2.

Vin des libations, vinum libaminum, c’étoit du vin pur, choisi, qu’on versoit sur les victimes dans les sacrifices au Seigneur.

Vin de componction, vinum compunctionis, désigne dans les Pseaumes, les châtimens de Dieu qui produisent l’amendement du pécheur.

Convivium vini, Ecclés. xxxj. 42. marque un festin, un repas de solemnité, où l’on n’épargne pas la dépense du vin.

Le vin de la condamnation, ainsi nommé dans Amos, peut s’entendre du vin assoupissant qu’on donnoit aux criminels condamnés à mort.

Mais quant au vin dont parle Zacharie, iv. 17. vinum germinans mulieres, c’est une expression métaphorique que je n’ai pas le bonheur d’entendre. (D. J.)

VINADE, s. f. (Gram. & Jurisprud.) est un droit dû au seigneur par ses sujets pour voiturer son vin : la vinade entiere est de deux paires de bœufs & une charrette, à la différence de la bouade ou vouade, qui n’est que d’une paire de bœufs, ou une charrette. Voyez les coutumes d’Auvergne & de la Marche, Ragueau au mot vinade. (A)

VINAGE, s. m. (Gram. & Jurispr.) a différentes significations.

Il se prend quelquefois pour un droit dû au lieu du cens sur les vignes, lequel se paie à bord de cuve, & le détenteur ne peut tirer son vin sans avoir payé le droit. A Angers & dans quelques autres lieux, ce droit a été converti en argent.

Quelquefois vinage signifie le passage d’une denrée ou marchandise par la terre ou seigneurie d’autrui.

Il se prend aussi pour un droit qui se paie au seigneur par des communautés & territoires en blé, vin ou argent, en conséquence de quoi les seigneurs font réparer les ponts & passages : le roi en a plusieurs de cette espece au comté de Marle.

Il se prend encore pour un droit qui se leve sur le vin, & pour des redevances en vin, & quelquefois spécialement pour un droit sur le vin pressuré.

Enfin, dans quelques anciens titres ce terme signifie réjouissance & bonne-chere. Voyez le glossaire de Ragueau avec les notes de M. de Lauriere. (A)

VINAIGRE & Fermentation acéteuse, (Chimie.) on donne ce nom au vin lorsqu’il a été exposé à une seconde fermentation qui en développe les parties salines, & on peut l’étendre à toutes les autres liqueurs qui ont subi la fermentation acéteuse.

L’esprit ardent, qui dans une liqueur vineuse empêche par son interposition la réunion des parties grasses de cette liqueur, & qui les sépare des parties