Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 17.djvu/203

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

petite portion de lymphe nutritive portée au fonticule, où elle se mêle à d’autres sucs, s’épaissit & s’altere avec eux par le séjour & la chaleur, &c. Que lui Vanhelmont a fait fermer ou cicatriser plus de mille cauteres, sans qu’il en soit arrivé le moindre mal : (voyez Vanhelmont, de cauterio, pag. 237.) ces prétentions peuvent être outrées, mais du moins doivent-elles engager le médecin à ne pas ordonner légerement ces sortes de remedes. Il est toujours vrai cependant que les cauteres font quelquefois beaucoup de bien, surtout dans certaines maladies séreuses de la tête. Voyez Charles Pison, de morb. cap. ij. colluvie serosa. L’exemple de personnes guéries par des fonticules ouverts sponte aux aînes, ont fait dire à beaucoup d’auteurs très-célebres que ces remedes étoient utiles dans la vérole. Voy. Zacutus Lusitanus, lib. II. obs. 131. qui parle d’une pareille guérison opérée par ces fonticules spontanés aux aînes. Voyez encore Cappivacius de luc venerta. Mercatus de codem morbo, lib. I. & lib. II. cap. j.

Les effets des fonticules sont lents & longs ; ils conviennent à plusieurs maladies, comme les douleurs sciatiques, la goutte, les rhumatismes, &c. quant à la maniere d’appliquer ces remedes, voyez Fonticule, Chirurgie. Mercatus observe à ce propos qu’il ne convient pas d’ouvrir des cauteres sur le haut de la cuisse lorsque la douleur isciatique vient d’une congestion de sang veineux, mais bien lorsqu’elle est produite par un engorgement de mucus ou de serum dans l’articulation devenue foible. Voyez de necto pra. art. med. usu, lib. I.

Les setons. Ces épispastiques sont plus efficaces que les fonticules ; ils produisent des dérivations considérables dans beaucoup de maladies de tête : des grands praticiens les ont employés avec beaucoup de succès contre des ophtalmies rebelles, il en est même, comme Charles Pison, tom. I. de curandis & cognoscendis morbis, qui approuvent les setons au scrotum dans l’hydropisie, à l’imitation d’Hippocrate qui faisoit faire des incisions dans la même maladie à ces parties, & frotter les incisions avec du sel. On se sert utilement dans quelques provinces contre les surdités, les maux d’oreilles, les migraines & autres maladies de la tête, d’une espece de seton qui consiste en un petit brin de timælea ou garou qu’on passe dans un trou de l’oreille qui a été percée à cet effet. On laisse ce brin de timælea ainsi lardé dans le bout de l’oreille, & la causticité de ce petit morceau de bois procure un écoulement salutaire qu’on entretient aussi long-tems qu’il en est besoin ; du reste ce dernier remede se rapporte presque entiérement à celui dont parle Columelle, & que cet auteur propose contre les maladies pestilencielles des bestiaux. Voyez d’ailleurs Seton.

Les ustions. Ce sont les plus violens & les plus prompts épispastiques ; il est étonnant combien les anciens en ont fait usage dans la plûpart des maladies. Voyez Ustion, Méd. On peut joindre ici le moxa ou le duvet d’armoise, employés dans les ustions par quelques nations étrangeres, voyez Moxa & la poudre à canon enflammée sur les parties. La maniere de se guérir des engelures en les exposant à un feu vif, peut encore passer pour une espece d’ustion.

L’acupuncture. C’est une sorte d’épispastique très en usage au Japon & à la Chine, & que les peuples de ce pays substituent à la saignée. Cet article ayant été oublié, nous tâcherons de rappeller ici tout ce qu’il y a de plus intéressant dans cette méthode. L’acupuncture consiste à faire sur tout le corps quantité de petites plaies au moyen d’instrumens pointus dont on pique toute l’habitude du corps, en les enfonçant assez avant dans les chairs. Le docteur Guillaume Then-Rhine a donné à la suite d’une dissertation sur

la goutte, imprimée à Londres en 1683, une espece de tableau de cette opération avec les instrumens qu’on y emploie ; voici à peu-près ce qu’en dit le journal des Savans du mois de Mars de l’année 1684. « On pique presque toutes les parties du corps dans un nombre infini de maladies qu’il est inutile de détailler ici ; la constitution de ces parties n’est pas moins la regle de la maniere dont on doit faire cette piquure, que de la profondeur qu’il faut observer ; ainsi l’on pique moins avant les parties nerveuses, & l’on enfonce davantage dans celles qui sont charnues. Les personnes foibles doivent être piquées au ventre, & les robustes au dos ; quelquefois l’on ne fait simplement qu’enfoncer l’aiguille, souvent on la tourne entre les doigts pour la faire entrer avec moins de douleur ; & dans quelques autres rencontres l’on frappe doucement avec une espece de petit marteau d’ivoire, d’ébene, ou de quelqu’autre matiere un peu dure, voyez la fig. 1. on tient l’aiguille l’espace de trente respirations, qui est une maniere de compter usitée par les Médecins de ce pays ; mais si le malade ne le peut supporter, on la retire d’abord & on la renfonce une seconde fois, & même plusieurs autres si c’est un mal opiniâtre. Ce qu’ils observent encore, est que le malade soit à jeun lors de cette opération ; l’aiguille sur-tout doit être d’or ou du moins d’argent, & jamais d’aucun autre métal ; & pour s’en servit utilement dans toutes les occasions, il faut qu’elle soit fort aiguë, ronde, longue, & tournée en vis le long du manche, comme la figure le représente, voyez la fig. 2. voyez encore sur cette opération Koempfer, in amæn. exot. »

L’effet de ces piquures est de former plusieurs noyaux inflammatoires, de réveiller les nerfs du tissu muqueux ou cellulaire qui se trouvent engourdis, & de déterminer au moyen de cette irritation donnée à la peau les oscillations nerveuses vers cet organe, lesquelles y entrainent quelquefois des dépôts critiques, &c. Zacutus Lusitanus rapporte, que dans le royaume du Pérou & en Afrique, on pique les parties avec des couteaux brûlans & pointus dans les stupeurs ou engourdissemens des membres ; l’auteur dit même avoir guéri de cette maniere un jeune homme, voyez l. I. pag. 231. on pourroit joindre à cet exemple ce que Valesius raconte d’un médecin qui guérit un seigneur apoplectique, dont les veines ne se trouverent point assez apparentes pour qu’on pût le saigner, en lui faisant appliquer des sangsues sur presque toute l’habitude du corps, voyez dans Forestus, p. 23.

La saignée. Elle ne produit ordinairement que des dérivations locales ; cependant elle est quelquefois accompagnée de phénomenes qui peuvent la faire regarder comme révulsive, sans doute que pour lors ces phénomenes sont dûs au stimulus que cause la piquure de la lancette : par exemple, Baillou, tom. III. lib. para licmatum, pag. 437. raconte qu’un médecin de Marseille ayant, selon la méthode des anciens, fait ouvrir la veine entre le doigt annulaire & le petit doigt à un homme qui avoit la fievre quarte, cet homme fut guéri par cette saignée, mais qu’il en eut durant une année entiere sa main comme livide. V. Saignée.

Il en est de même des scarifications proprement di-