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proportion des différentes pieces, soit pour les dehors ou les dedans ; ou autrement, ils ont une gaine ou trou quarré, revêtu d’étain, formé par le mandrin de l’arbre du tour dans lequel il entre ; puis on fait tenir sa piece sur ces empreintes ou calibres, si c’est de la vaisselle, par le moyen de trois petits crampons de fer qui tiennent la piece sur l’empreinte par l’extrémité du bord, en commençant par les derrieres, & après les dedans sur la même empreinte qui doit être creusée de la grandeur & de la forme de la piece ; ainsi il en faut avoir autant qu’on a de moules de différentes grandeurs, ou bien on tourne à la belouze, qui est une maniere d’attacher les pieces en les soudant à trois gouttes sur le bord avec le fer sur une piece d’étain montée sur le tour, à qui on donne ce nom de belouze. Si c’est de la poterie, on la dresse sur le calibre qu’on a monté sur le mandrin, & qui est tourné proportionnément à la grosseur de la piece qu’on veut mettre dessus ; on la fait tenir en frappant d’un marteau, sur une planche appuyée contre la piece pendant qu’elle tourne, jusqu’à ce qu’elle tienne & tourne rondement : cela s’appelle tourner à la volée. Mais il y a une autre maniere plus diligente & plus sûre, surtout pour des pieces longues, qui est de tourner à la pointe ; c’est une vis qui marche dans un écrou enclavé dans la poupée de la droite du tour, à-peu-près comme la vis d’un étau de serrurier, & par le moyen d’une manivelle ou d’un boulon, on avance & retire cette vis dont le bout presque pointu joint un morceau de bois ou de plomb qui s’emboite au bout de la piece qu’on tourne, ensorte qu’elle la met ronde, & la tient sans qu’elle se dérange ni qu’elle puisse s’échapper. Voyez les figures du métier de Potier d’étain.

Dès que la piece est bien dressée, l’ouvrier tenant son crochet sous le bras & posé sur la barre qu’il tient ensemble avec la main gauche, il le conduit de la droite par un mouvement égal & réglé en le faisant couper l’étain : ce qui forme ce qu’on nomme ratures ; on appelle cette premiere façon ébaucher. On se sert ensuite de crochets qui coupent moins, parce qu’on les passe sur un cuir où on a mis de la potée d’étain ; ces crochets se nomment planes ; & enfin on acheve avec un brunissoir. Lorsqu’on s’en sert, il faut auparavant répandre avec une patrouille de l’eau de savon sur sa piece, & ne point appuyer le brunissoir trop fort, ni s’arrêter pour ne point faire d’ondes ; il suffit d’effacer seulement les traits du crochet, & on essuie l’eau de savon après qu’on a bruni avec un linge doux qu’on appelle polissoir, pendant que la piece tourne encore.

Il faut remarquer que les bons outils dans la main d’un habile ouvrier contribuent à faire le bel ouvrage. Chacun a sa maniere pour leur donner un taillant propre à son gré ; mais généralement les crochets quarrés, quarrés demi-ronds, à deux côtés, en pointe, &c. sont préférables à toutes autres formes. Les crochets, grattoirs & brunissoirs doivent être acérés du meilleur acier d’Allemagne. Il faut une meule pour les émoudre, & une bonne pierre d’Angleterre pour les affiler.

Il y a des brunissoirs de différentes figures pour la vaisselle ou poterie, & pour réparer & achever. Voyez Brunissoir.

Pour tourner des plats d’une grandeur extraordinaire ou des jattes ou grands bassins qui pesent jusqu’à 20 ou 25 liv. piece, ou enfin d’autres pieces d’un trop gros poids, au lieu de faire aller le tour avec la roue, ce qui n’est presque pas possible, on emmanche une manivelle dans le bout de derriere de l’arbre du tour, par le moyen de laquelle on tourne une piece comme on tourne une meule de taillandier, & par ce moyen on en vient plus aisément à bout : cela s’appelle tourner à la ginguette.

Il faut observer que pour tourner la vaisselle, l’ou-

vrier conduit ses crochets & brunissoirs presque perpendiculairement,

tantôt du bas de sa piece au milieu en montant, & tantôt du milieu en descendant enbas, appuyant sur ses outils, afin de couper l’étain également par-tout, & que la piece ne soit point fausse, c’est-à-dire, forte à un endroit & mince à un autre ; lorsqu’on veut rendre une piece mince, on repasse plusieurs fois le crochet qui ébauche, & pour la poterie, on conduit le crochet sous la piece horisontalement, tantôt de droit à gauche, & de gauche à droite, & le brunissoir de même, mais moins en-dessous que le crochet ; & la meilleure maniere est de ne le passer qu’une fois.

Autrefois on tournoit toute la vaisselle sur un outil nommé croisée composé de trois branches de fer & de trois crampons coulans sur ces branches ; on avance & recule ces crampons suivant la grandeur des pieces, & on les arrête par le moyen d’un coin qui est derriere chaque crampon ; on ne s’en sert plus guere à présent depuis l’invention de tourner à la belouze, si ce n’est pour tourner des jattes ou grands bassins, cette maniere étant dangereuse pour l’ouvrier qui y travaille.

Tourner, en terme de Tabletier Cornetier ; voyez Tourner, en terme de Tabletier en écaille, c’est la même opération pour la corne comme pour l’écaille.

Tourner, (Vénérie.) il se dit de la bête que l’on chasse, lorsqu’elle tourne & fait un retour, c’est aussi faire tourner les chiens pour en trouver le retour & le bout de la ruse.

TOURNES, (Jurisprud.) c’est la soute ou retour des deniers que l’on paie dans un partage ou pour un contrat d’échange. Il en est parlé dans le coutumes de Montargis, Orléans, Blois & Dunois. Voyez le gloss. de Lauriere. (A)

TOURNESIS, le, (Géog. mod.) petit pays de Flandre, & qui prend son nom de Tournay sa capitale.

Le Tournesis n’est autre chose que la châtellenie de Tournay, qui est d’une assez grande étendue ; car elle renferme environ cinquante villages ou bourgs, dont la justice ressortit au conseil provincial de Flandre, d’où l’on peut appeller au parlement de Malines.

Les rois de France ayant institué le bailliage de Vermandois, y avoient joint Tournai & le Tournesis ; mais en 1383 Charles VI. érigea un bailliage à Tournay, auquel il soumit cette ville & le Tournesis, avec les terres de Mortagne & de Saint-Amand, qui relevoient auparavant du bailliage de Vermandois ; l’union de ces terres à ce bailliage a duré jusqu’au tems de la paix d’Utrecht, par laquelle toute la terre de Saint-Amand a été séparée du bailliage de Tournesis, & accordé à la France ; mais pour les neuf villages qui dépendoient de Mortagne, ils ont été laissés à la maison d’Autriche. (D. J.)

TOURNESOL, s. m. (Hist. nat. Bot.) nom vulgaire donné à la premiere & principale espece de racinoïde dans le système de Tournefort ; c’est aussi pour la distinguer que cet habile botaniste appelle cette plante racinoides ex quâ paratur tournesol Gallorum I. R. H. 656. dans Mathiole heliotropium minus ; dans C. Bauhin, heliotropium tricoccum ; dans Clusius heliotropium minus tricoccum ; enfin dans Lobel, heliotropium vulgare tournesol Gallorum sive Plinii tricoccon.

La racine de cette plante est blanche, ronde, ordinairement droite & longue, garnie de quelques petites fibres à son extrémité, surtout aux piés les plus élevés, car il en est plusieurs qui n’en ont point du tout ; elle pousse une tige ronde de différente hauteur, suivant le terrein qu’elle occupe ; cette tige se divise en plusieurs branches, la plûpart desquelles sortent des aisselles des feuilles.

Clusius avoit raison lorsqu’il a dit que les feuilles du tournesol ont de la ressemblance avec celles du xanthium ; mais il s’est trompé lorsqu’il a cru