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biens personnels, quand celui des terres est de quatre schellings. Voyez Aides, &c.

Les anciens rois saxons n’avoient point de subsides qui se levassent réglément ; mais au-lieu de cela, il y avoit différentes coutumes par lesquelles on levoit des deniers ou des corvées sur le peuple pour réparer les villes, châteaux, ponts, pour les expéditions militaires, &c. qu’ils appelloient burgote, brigbote, herefare, heregled, &c.

Mais depuis que leurs terres furent envahies par les Danois, le roi Ethelred convint en 1007, de payer à ceux-ci tous les ans 10000 liv. pour racheter la paix : cette somme fut depuis portée à 36000 l. & enfin jusqu’à 48000 liv. & on l’appella danegeld, & on la leva sur les terres ; chaque hide ou charrue étoit taxée au douzieme, excepté celles de l’Église. Voyez Danegeld.

De-là ce tribut fut appellé hidage, nom qui par la suite devint commun à toutes les taxes & subsides qu’on imposoit sur les terres ; comme celles qu’on imposoit sur les bestiaux, furent appellées hornegeld.

Mais les Normans les appelloient quelquefois toutes les deux taxes, du mot grec ταξις ; & quelquefois taillage, qui vient de leur propre langage, & quelquefois, suivant les usages d’au-dela de la mer, subsidia & auxilia. Voyez Auxilium.

Depuis la conquête, il paroît que ces subsides ont été accordés encore sur un autre pié qu’ils ne sont à présent : comme chaque neuvieme agneau, chaque neuvieme brébis, &c. quelquefois la taxe étoit le dixieme, & quelquefois le quinzieme. Voyez Quinzieme, &c.

En France le roi seul, de sa propre autorité, impose des subsides sur le peuple à sa discrétion. Ce que Grotius dit que ceux qui payent des subsides aux autres souverains pour les engager à les défendre contre des ennemis puissans, reconnoissent en agissant ainsi leur propre foiblesse, & que cette reconnoissance fait tort à leur dignité ; ne doit s’entendre que de ces états qui sont trop foibles pour se défendre eux-mêmes, & qui, par rapport à cela, se rendent en quelque façon tributaires ; & non pas de ceux qui subsistant par leurs propres forces, donnent des subsides à leurs voisins, qui sont plus foibles, pour les empêcher d’être accablés par les autres.

Tels sont, par exemple, les rois de France & d’Angleterre par rapport aux rois de Suede & autres princes, à qui ils accordent des subsides dans les traités qu’ils font avec eux.

Dans le rôle des taxes & impositions d’Angleterre, il y a plusieurs sortes de subsides : l’ancien subside, le supplément à l’ancien subside, le nouveau subside, le tiers du subside, & les deux tiers du subside. Voyez Impôts, Droits, &c.

Un homme de mérite a rassemblé sous un même point de vue l’apologie d’un des meilleurs auteurs politiques de nos jours, & la critique de quelques-uns de nos articles de finance. Son ouvrage, publié par lui-même, pouvoit certainement lui faire plus d’honneur, & nous causer plus de peine (s’il étoit si pénible de reconnoître ses erreurs), que n’en peuvent jamais attendre de leurs injurieuses & pauvres productions une infinité d’hommes obscurs, qui depuis 20 ans jusqu’à ce jour, depuis le plat Ch… jusqu’à l’hypocrite abbé de S… se sont indignement déchaînés contre nous.

Celui qui a écrit les observations suivantes, homme d’un caractere bien different, nous les a envoyées à nous-même, pour en faire l’usage qui nous conviendroit, & nous les imprimons.

M. de Voltaire s’est tout nouvellement chargé de nous venger des autres. Il a dit dans une de ses lettres, à-propos de la brochure de cet abbé de S… Quel est celui qui s’est occupé à vuider les fosses d’un palais où il n’est

jamais entré ?… Tel misérable petit architecte, qui n’est pas en état de tailler un chapiteau, ose critiquer le portail de S. Pierre de Rome. Nous voudrions bien que ces comparaisons flatteuses, plus méritées de notre part, nous honorassent autant qu’elles doivent humilier nos ennemis.

Notre siecle a produit plusieurs livres dangereux, & un grand nombre d’inutiles, comme le crient les déclamateurs : mais ce qu’ils ne disent point, c’est qu’il sort journellement des presses, des ouvrages précieux à la raison, dont ils étendent l’empire, à la saine philosophie qu’ils répandent, à la nature à laquelle ils nous rappellent, & à l’humanité dont ils réclament les droits.

Si le gouvernement profitoit des vues présentées par quelques gens de lettres, le regne présent seroit mis par la postérité beaucoup au-dessus des regnes précédens, parce que les mœurs seroient plus séveres, les ames plus honnêtes, le système de la bienfaisance mieux suivi, & les peuples conséquemment plus heureux.

Parmi les auteurs qui ont consacré leurs travaux à l’utilité publique, on doit citer avec reconnoissance M. de M…… Un rédacteur intelligent, semblable à celui qui a publié un des projets de l’abbé de S. Pierre, qui sauroit distinguer les maximes saines, lier les vérités, placer les réflexions, écarter les paradoxes, supprimer des disgressions vuides, des déclamations choquantes, & des ironies trop ameres, formeroit un excellent volume de tous ceux qui sont sortis de la plume de l’ami des hommes. Les doutes qui lui ont été adressés sur la théorie de l’impôt, n’ont point été conçus par une tête bien forte. On voit aisément l’esprit qui les a dictés ; ce qui ne prévient pas en leur faveur : car cet esprit n’est point celui de la candeur & du patriotisme. Ce n’est pas d’ailleurs avec quelques figures de rhétorique qu’on peut triompher des écarts d’un génie bouillant, & vaincre les élans d’un cœur que le spectacle de la misere a déchiré.

M. de M…… doit savoir gré à l’anonyme qui a consolidé ses maximes en s’efforçant de les détruire.

Tel est l’effet des objections foibles ; elles font présumer qu’un livre est hors de toute atteinte, parce qu’il a été mal attaqué, & que le vulgaire se persuade que le bouclier qui résiste est bon, tandis que c’est seulement le trait lancé qui manque de vigueur. Mais ce dont M. de M…… ne peut remercier son adversaire, c’est de cette politesse cruelle qui ne tend, en lui accordant des talens, qu’à le désigner comme un homme dangereux. N’est-il donc plus possible de critiquer sans rendre odieux ? C’est une méthode bien noire & bien usitée que celle qu’on emploie contre presque tous les auteurs. On calomnie leurs principes, en leur attribuant des conséquences aussi détournées que funestes ; & on parvient à intéresser la religion ou le ministere, dans des discussions qui leur sont étrangeres. Le délire d’un bon citoyen n’en fera jamais de méchans, surtout lorsqu’il ne s’exercera que sur des matieres qui ne sont qu’à la portée du petit nombre, la multitude seule pouvant devenir séditieuse ou fanatique.

Au reste, il importeroit peu de relever les erreurs renfermées dans un in-12. obscur, qui aura le sort des écrits polémiques, si elles n’étoient soutenues & garanties par d’autres erreurs qui se sont glissées dans un ouvrage immortel[1]. Elles y sont, il est vrai, réparées par la promesse que les éditeurs de l’Encyclopédie ont faite[2] d’insérer, sous une autre lettre, le correctif nécessaire aux mots ferme, (finance), & financier ; mais les espérances qu’on

  1. L’Encyclopédie.
  2. Voyez l’observation qui suit dans l’Encyclopédie l’article ferme, (finance).