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Le manger salé fait boire beaucoup ;
Or boire beaucoup fait passer la soif :
Donc le manger salé fait passer la soif.

Ce sophisme porte un masque de syllogisme ; mais il sera bientôt démasqué par une simple attention : c’est que le moyen terme, qui paroît le même dans la premiere & dans la seconde proposition, change imperceptiblement à la faveur d’un petit mot qui est de plus dans l’une, & qui est de moins dans l’autre. Or un petit mot ne fait pas ici une petite différence. Une diphtongue altérée causa autrefois de furieux ravages dans l’Eglise ; & une particule changée, n’en fait pas de moindres dans la Logique pour conserver au moyen terme, le même sens dans les deux propositions. Il falloit énoncer dans la mineure, or faire boire beaucoup fait passer la soif. Au lieu de cela, on supprime ici dans la mineure, le verbe faire devant le mot boire, ce qui change le sens, puisque faire boire & boire, ne sont pas la même chose.

On pourroit appeller simplement le sophisme, une équivoque ; & pour en découvrir le vice ou le nœud, il ne faudroit que découvrir l’équivoque.

SOPHISTE, s. m. (Gram. & Hist. anc. ecclés.) qui fait des sophismes, c’est-à-dire qui se sert d’argumens subtils, dans le dessein de tromper ceux qu’on veut persuader ou convaincre. Voyez Sophisme & Gymnosophiste. Ce mot est formé du grec σοφὸς, sage, ou plutôt de σοφιστὴς, imposteur, trompeur.

Le terme sophiste, qui maintenant est un reproche, étoit autrefois un titre honorable, & emportoit avec soi une idée bien innocente. S. Augustin observe qu’il signifioit un rhéteur ou professeur d’éloquence, comme étoient Lucien, Athænée, Libanius, &c.

Suidas, & après lui Olar. Celsius, dans une dissertation expresse sur les sophistes grecs, nous déclare que ce mot s’appliquoit indifféremment à tous ceux qui excelloient dans quelque art ou science, soit théologiens, jurisconsultes, physiciens, poëtes, orateurs ou musiciens. Mais il semble que c’est donner à ce mot un sens trop étendu. Il est possible qu’un rhéteur ait fait des vers, &c. mais que ce soit en vertu de son talent poétique qu’on l’ait nommé sophiste, c’est ce que nous ne voyons point de raison de croire. Quoi qu’il en soit, Solon est le premier qui paroît avoir porté ce nom, qui lui fut donné par Isocrate ; ensuite on le donna assez rarement, mais seulement aux philosophes & aux orateurs.

Le titre de sophiste fut en grande réputation chez les Latins dans le douzieme siecle, & dans le tems de S. Bernard. Mais il commença à s’introduire chez les Grecs dès le tems de Platon, par le moyen de Protagoras & de Gorgias, qui en firent un métier infâme en vendant l’éloquence pour de l’argent. C’est de-là que Séneque appelle les sophistes, des charlatans & des empyriques.

Cicéron dit que le titre de sophiste se donnoit à ceux qui professoient la Philosophie avec trop d’ostentation, dans la vûe d’en faire un commerce, en courant de place en place pour vendre en détail leur science trompeuse. Un sophiste étoit donc alors comme à-présent, un rhéteur ou logicien qui fait son occupation de décevoir & embarrasser le peuple par des distinctions frivoles, de vains raisonnemens & des discours captieux.

Rien n’a plus contribué à accroître le nombre des sophistes, que les disputes des écoles de philosophie. On y enseigne à embarrasser & obscurcir la vérité par des termes barbares & inintelligibles, tels que antiprédicamens, grands & petits logicaux, quiddités, &c.

On donna le titre de sophiste à Rabanus Maurus, pour lui faire honneur. Jean Hinton, moderne auteur scholastique anglois, a fait ses efforts pour se procurer le titre magnifique de sophiste.

SOPHISTIQUER, v. act. (Gram. & Com.) signifie mélanger, altérer des drogues & des marchandises, en y en mêlant d’autres de différente ou de moindre qualité. Il se dit particulierement des remedes & des drogues qu’on soupçonne n’être pas toujours sans mélange. Dict. de Com.

SOPHISTIQUERIE, s. f. (Com.) mélange de drogues de mauvaise qualité que l’on veut faire passer avec des bonnes. Id. ibid. pag. 159.

SOPHONIE, livre de, (Critiq. sacr.) le livre sacré de sophonie, ne contient que trois chapitres. Son style est assez semblable à celui de Jérémie, dont il semble n’être que l’abréviateur. C’est le neuvieme des douze petits prophetes ; mais nous ne savons rien de sa vie, que ce qu’il nous apprend lui-même de sa naissance, ch. j. v. 1. savoir, qu’il étoit fils de Chusi, de la tribu de Siméon. Il vivoit du tems de Josias, qui commença son regne l’an du monde 3363, & il y a beaucoup d’apparence qu’il prophétisoit avant que ce prince religieux eût réformé les desordres de ses sujets. Sophonias peint vivement leur idolâtrie, menace Jérusalem de toute la colere du Seigneur, & finit néanmoins par des promesses consolantes sur le retour de la captivité. (D. J.)

SOPHOZA, s. f. (Hist. nat. Botan.) nom donné par Linnæus, au genre de plante appellé par Dillénius, dans son Hort. eltheth. p. 112. ervi species ; en voici les caracteres : le calice de la fleur est en forme de cloche, composé d’une seule feuille, divisée en cinq segmens obtus à l’extrémité : la fleur est légumineuse à cinq pétales, dont le supérieur est droit & oblong, devenant plus large au sommet, & se courbant dans les bords : les aîles sont au nombre de deux, aussi longues que la fleur supérieure des fleurs : les étamines sont dix filets distincts, pointus, & de la même longueur que la fleur, mais cachés : les bonnetes des étamines sont petites, le germe du pistil est oblong & cylindrique : le stigma est obtus, le fruit est une gousse très-longue & très-déliée, contenant une seule loge marquée de tubérosités, où sont contenues des graines arrondies, & nombreuses. Linn. gen. pl. p. 177. (D. J.)

SOPHRONISTES, s. m. (Ant. grecq.) σωφρονισταί ; on nommoit ainsi chez les Athéniens, dix magistrats chargés de veiller aux bonnes mœurs de la jeunesse, & l’endroit où l’on enfermoit les jeunes gens indociles, pour les corriger, s’appelloit σωφρονιστήριον. Potter, Archæol. græc. l. I. ch. xxv. t. I. p. 84. & 130. (D. J.)

SOPORANT, SOPORIFIQUE, ou SOPORIFERE, (Medecine) est une médecine qui a la vertu de procurer le sommeil. Voyez Sommeil. Tel est l’opium, le laudanum, &c. Voyez Opium, Laudanum, &c.

Ce mot vient du latin sopor, sommeil. Les Grecs au lieu de ce mot, se servent du mot hypnotic. Voy. Hypnotic.

Soporifiques, maladies soporifiques, endormantes, assoupissantes, sont le coma ou cataphora, la léthargie, & le carus, lesquelles semblent différer les unes des autres par le plus & le moins, plutôt que par leur essence. Elles s’accordent en ce qu’elles sont toutes accompagnées de stupeur. Voyez Coma, Carus, Léthargie, &c.

SOPIANÆ, (Géog. anc.) ville de la basse Pannonie, marquée dans l’itinéraire d’Antonin, sur la route de Sirmium à Carnuntum. Le nom moderne est Zéeblack, selon Simler, & Soppan, selon Lazius. (D. J.)

SOPITHES, région des, (Géog. anc.) Sopithis regio, la région des Sopithes, Sopithis regio, est une contrée de l’Inde, Strabon, l. XV. p. 699, qui l’appelle aussi Cathea, dit que quelques-uns la placent entre les fleuves Hydaspes & Acésines ; Diodore de