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dit-on, Babylone à se rendre à sultan Mourat, est par distinction dans une loge particuliere. Cette artillerie fait grand plaisir aux Mahométans ; car on la tire pour les avertir que le carême est fini, & qu’il ne faut plus jeûner : on la décharge aussi les jours de réjouissance, & pour les conquêtes des sultans ou de leurs généraux.

Telle est la description qu’a donné Tournefort du serrail & de ses dépendances. La paresse asiatique rend de tels palais des lieux de délices pour tous les hommes de la cour du prince ; des gens qui ne craignent que le travail, peuvent trouver leur bonheur dans des lieux où l’on n’a rien à faire. Mais quels peuvent être les plaisirs & les amusemens des femmes du sultan, qui sont à jamais enfermées dans ces sortes de prisons ? On est dispensé d’en rien savoir, puisque ces dames ne tombent pas plus sous les sens d’aucun étranger, que si elles étoient des esprits purs. Ces beautés rares de Mengrélie & de Georgie ne sont faites que pour amuser le sultan, & pour faire enrager les eunuques. Tous les gouverneurs des provinces font à l’envi présent au grand-seigneur, des plus belles personnes de l’empire, non-seulement pour lui plaire, mais pour tâcher de se faire des créatures dans le palais, qui puissent les avancer. Ce n’est point la naissance qui regle les prérogatives des filles que leur sort conduit dans le serrail, c’est leur beauté, au goût du grand-seigneur, qui peut faire leur fortune. Ainsi la fille d’un berger peut devenir sultane favorite, & l’emporter sur cent autres que le sultan juge à-propos de négliger.

Après sa mort les femmes qu’il a daigné honorer de ses caresses, & les filles majeures passent dans le vieux serrail de Constantinople où elles sechent de langueur. Le vieux serrail qui est proche de la mosquée du sultan Bajazet, fut bâti par Mahomet II. On y confine ces pauvres femmes ou filles pour y pleurer tout à loisir la mort du prince ou celle de leurs enfans, que le nouveau sultan fait quelquefois étrangler. Ce seroit un crime de pleurer dans le serrail où loge l’empereur ; au contraire chacun s’empresse d’y témoigner de la joie pour son avénement à l’empire. Les plus jeunes filles sont quelquefois réservées pour lui, ou mariées à des pachas qui les recherchent, au refus du sultan. Quoi qu’il en soit, comme c’est un crime de voir celles qui restent dans le palais, il ne faut point compter sur tout ce qu’on en a écrit ; quand même on pourroit trouver le moyen d’y entrer un seul instant, qui est ce qui voudroit mourir pour un coup d’œil si mal employé ? Tout ce qu’on peut penser de mieux, c’est de regarder les sultanes favorites comme les moins malheureuses esclaves qui soient au monde. Mais de combien la liberté est-elle préférable à un si foible bonheur ! (D. J.)

SERRAIN, (Géog. mod.) petite ville de l’Arabie heureuse, sur le bord de la mer. Elle est éloignée de la Mecque de quatre journées. (D. J.)

SERRAN, SERRANT, SERRATAN, s. m. (Hist. nat. Ichthiolog.) hiaticula, poisson de la haute mer, qui ressemble au loup marin par la forme du corps & par l’ouverture de la bouche. Voyez Loup marin. Le serran a la machoire inférieure plus longue & plus avancée que la supérieure, les dents pointues & les yeux petits ; il ressemble au tourd par les nageoires, par la queue, par les aiguillons & par les ouies. Voyez Tourd. Le dos est en partie rouge, & en partie noir ; il y a sur les côtés du corps des traits roux qui s’étendent depuis la tête jusqu’à la queue ; la nageoire de la queue est roussâtre, & la queue a des taches rousses. Le serran se nourrit de poisson ; sa chair est un peu plus dure que celle de la perche. Rondelet, hist. nat. des poissons, I. part. liv. VI. ch. ix. Voyez Poisson.

SERRANA ou SERRANO, (Géog. mod.) petite

île de l’Amérique septentrionale, dans la mer du Nord, entre la Jamaïque & les côtes de Nicaragna. Elle est déserte, n’ayant pas un seul arbre, pas un brin d’herbe, pas la moindre source d’eau douce. Son circuit est d’environ deux lieues. (D. J.)

SERRANT, voyez Verdiere.

SERRATA, s. f. (Botan. anc.) nom donné par quelques auteurs romains à la plante que les Gaulois nommoient, selon Pline, betonica, mais qui paroit cependant être la même que notre sarriette. Il y avoit une autre plante appellée serrata, que Pline dit être la germandrée des Grecs ; je crois qu’il se trompe. (D. J.)

SERRATAN, voyez Serrant.

SERRAVALLE ou SARRAVALLE, (Géog. mod.) petite ville d’Italie, dans l’état de Venise, au Trévisan, à deux milles nord-est de Cénéda. Long. 29. 51. latit. 46. 1.

Il y a un gros bourg de même nom dans le duché de Milan, aux confins du Tortonnèse & de l’état de Gènes, près de la petite riviere de Scrivia. Ce bourg donne son nom à un petit territoire qui est comme enclavé dans l’état de Gènes. (D. J.)

SERRE, s. f. (Econom. rust.) couvert pour mettre certaines plantes pendant l’hiver ; c’est une espece de salle de trois, quatre ou cinq toises de largeur sur une longueur proportionnée au rez-de-chaussée d’un jardin, exposée pour le mieux au midi, bien percée pour en recevoir le soleil, & close de portes & chassis doubles, dans lesquelles on serre les arbrisseaux, les orangers, les fleurs & les fruits, qui ne peuvent pas souffrir la rigueur de l’hiver.

Il y a beaucoup d’art & d’intelligence dans la construction des serres, & plusieurs jardiniers, faute d’en être instruits, en ont souvent éprouvé du dommage, comme, par exemple, si les personnes qui ont bâti des serres pour conserver des plantes en hiver, n’ont pas eu soin d’y donner accès au soleil par des fenêtres disposées de façon que les rayons puissent parvenir jusqu’au fond ; sans quoi, toutes choses d’ailleurs égales, il se trouve une humidité froide qui venant à tomber sur les plantes, fait périr presque toutes les plus tendres. Il faut donc que ces serres exposées directement au midi soient construites de maniere qu’elles aient des vitrages bien transparens, & qui s’étendent, s’il est possible, jusqu’au pavé, en faisant avec la perpendiculaire un angle de 14 degrés 30′. Ensuite le plafond doit être bâti de sorte que dans le pays où l’élévation du pole est de 52 degrés , il fasse avec la ligne horisontale tirée du haut des fenêtres vers la paroi opposée, un angle de 20 degrés 30′.

Le détail de la bonne construction des serres nous conduiroit trop loin, & demanderoit des figures en nombre. Il faut en prendre des modeles sur celles de Hollande & d’Angleterre ; car notre nation n’est pas encore assez éclairée sur ces sortes de bâtimens consacrés à l’avancement de la Botanique ; nous aimons mieux des avenues éloignées, & des champs stériles. Voyez les Pl. d’Agricult. (D. J.)

Serre, (Géog. mod.) nom d’une riviere & de deux bourgs de France, que nos géographes appellent petites villes.

La riviere coule en Champagne, prend sa source dans la Thiérache, & se jette dans l’Oise à la Fere.

Les deux bourgs sont dans le Dauphiné : l’un à quatre lieues de Saint-Marcellin, élection de Romans ; l’autre est dans les montagnes, à cinq lieues de Sisteron. (D. J.)

Serre, (Fonderie.) terme de fondeurs des menus ouvrages ; c’est une des deux sortes de presses dont ces ouvriers se servent pour serrer, & presser l’une contre l’autre les deux parties de leurs moules. (D. J.)