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obliger ses censitaires à lui passer nouvelle reconnoissance tous les 30 ans, parce que cette reconnoissance supplée le titre primitif, & sert conséquemment à empêcher la prescription.

Le nouveau seigneur peut aussi demander une reconnoissance à ses censitaires, quoiqu’ils en ayent déja une à son prédécesseur ; mais en ce cas, la reconnoissance se fait aux frais du seigneur, Ferr. sur la quest. 417. de Guypape.

Une seule reconnoissance suffit pour conserver le cens ordinaire ou autre droit représentatif du cens ; mais pour autoriser la perception des droits exhorbitans, tels que des corvées, une seule reconnoissance ne suffit pas, il en faut au-moins deux ou trois quand le seigneur n’a pas de titre constitutif. Voyez Aveu, Déclaration d’héritages, Terrier, Larocheflavin des droits seigneuriaux, la pratique des terriers, Henrys. Guyot. (A)

RECONNOITRE, se RECONNOITRE, (Lang. franç.) reconnoître, pour témoigner de la reconnoissance, se dit avec la personne, avec la chose ; exemples ; je reconnoîtrai cette faveur ; j’ai reconnu cet homme à sa voix, & à sa démarche.

Se reconnoître, se prend en trois significations : il n’eut pas le tems de se reconnoître, c’est-à-dire, de reprendre ses sens, de faire réflexion sur soi ; Dieu lui a fait la grace de se reconnoître ; c’est-à-dire, de se repentir. Je commence à me reconnoître, c’est-à-dire, à me rappeller l’idée du lieu, du pays où je suis. (D. J.)

Reconnoitre, (Fortification.) signifie dans l’art militaire, voir & examiner.

Ainsi l’on dit reconnoître une troupe, un camp, un ouvrage, une breche, un défilé, un marais, un gué, &c.

Comme le général ne peut pas reconnoître lui-même tous les différens objets sur lesquels il a besoin d’avoir des connoissances exactes, c’est à ceux qu’il charge de ce soin de ne rien négliger pour s’assurer par eux-mêmes de tout ce qui concerne l’examen qui leur est confié ; afin de ne point le tromper par de faux rapports qui peuvent lui faire prendre des partis très-préjudiciables à l’armée.

On ne doit employer dans des commissions aussi délicates & aussi importantes, que des gens courageux & très-instruits de la science militaire, sans laquelle, avec de la bonne volonté & du zele, il est impossible de bien juger de toutes les circonstances dont il est à propos que le général soit informé.

On doit reconnoître aussi le pays par où les armées doivent passer, & où elles doivent agir ; mais cette reconnoissance, pour être bien faite, exige de grands talens. Il faut être consommé dans la science & dans la pratique de la guerre, pour bien juger des différentes opérations militaires, relatives à la nature du pays. Ce n’est point assez d’avoir de bonnes cartes pour cet effet, ni beaucoup de géographes à sa suite pour lever le pays ; les cartes les plus exactes sont fort imparfaites à cet égard ; car, comme le dit très-bien M. le maréchal de Puysegur, comment me donneront-elles par des traits de plume, une connoissance assez exacte, pour que je puisse décider si une hauteur est un peu plus élevée qu’une autre qui sera vis-à-vis ? Si de la cavalerie peut y monter, ou seulement de l’infanterie, & combien de cavaliers pourroient y monter de front ? Il est évident que les cartes ne peuvent donner ces différentes connoissances, non plus que ce qui concerne la nature des marais, des défilés, des chemins, des bois, &c. Cependant on croit communément n’avoir rien omis pour bien reconnoître un pays lorsqu’on s’en est procuré des cartes, ou qu’on en a fait lever ; mais si l’on s’en tient aux connoissances qu’elles peuvent donner, on ne connoît le pays que très imparfaitement. Pour être vraiment utiles, il faut

qu’elles soient accompagnées d’un mémoire particulier, qui explique toutes les circonstances du terrein dont la connoissance est nécessaire dans les actions & les mouvemens des armées ; travail qui ne peut être fait que par un homme intelligent, très-versé dans la théorie & la pratique de la guerre, & non point par un simple géographe.

La connoissance du pays où se fait la guerre est si importante, qu’on ne doit rien négliger pour se la procurer la plus exacte qu’il est possible. Sans quoi il arrive souvent, comme le dit M. le maréchal de Puysegur, qu’on donne bien des combats où l’on perd beaucoup de monde mal-à-propos. Il en donne pour exemple les combats de Fribourg, en 1644. Il prétend que si l’on avoit bien connu le terrein des environs de cette ville, il étoit aisé de le faire abandonner sans combat, au général Mercy. Voyez sur ce sujet dans l’art de la guerre, ij. 12. les différens articles du chapitre vj. & entre autres l’article xxviij. qui traite des moyens de prendre connoissance d’un pays.

Reconnoitre une place, c’est l’examiner avec soin, pour juger des endroits les plus foibles ou les plus propres aux attaques. Voyez Siége. (Q)

Reconnoitre, (Marine.) c’est approcher d’un vaisseau pour examiner sa grosseur, les forces qu’il peut avoir, & de quelle nation il est.

Reconnoitre une terre, (Marine.) c’est observer la situation d’une terre, afin de savoir quelle terre c’est.

RECONQUERIR, v. act. (Gramm.) c’est conquérir une seconde fois. Voyez Conquérir & Conquête. C’est un pays reconquis ; les provinces limitrophes sont exposées à être conquises & reconquises.

RECONSTRUIRE, v. act. (Gramm.) c’est construire de rechef. Voyez les articles Construire & Construction.

RECONSULTER, v. act. (Gramm.) c’est prendre une seconde consultation sur la même affaire. Il arrive souvent qu’une affaire est bonne à la consultation, & mauvaise à la reconsultation, tant notre jurisprudence est équivoque & diverse. Voyez Consulter & Consultation.

RECONTRACTER, v. act. (Gramm.) c’est contracter une seconde fois ; cet acte avoit été résilié, mais les parties qui persistoient dans les mêmes intentions, ont réparé les défauts de la forme & du fonds, & recontracté.

RECONVENIR, RECONVENTION, (Jurisprudence.) est une action que le défendeur intente pour se parer de celle que le demandeur a intenté contre lui.

Toute action intentée par le défendeur, contre le demandeur, n’est pas une reconvention ; ce n’est qu’autant qu’elle tend à empêcher l’effet de l’action du demandeur, ou à opérer une compensation. Ainsi la reconvention est en matiere civile, ce que la récrimination est en matiere criminelle.

La reconvention étoit admise en droit, comme il paroît par la loi 6 au code de compensationibus, & en la loi 1, §. dernier, quæ sententiæ.

La coutume de Paris, article 106. & un grand nombre d’autres coutumes, portent que reconvention n’a lieu en cour laie, si elle ne dépend de l’action, c’est-à-dire, si la demande en reconvention n’est la défense naturelle contre l’action premierement intentée ; & en ce cas, le défendeur peut par ses défenses se constituer incidemment demandeur.

Ainsi dans notre usage la reconvention n’est admise que lorsque la demande que forme le défendeur est vraiment incidente & connexe à la demande principale ; de sorte que si la demande formée par le défendeur est indépendante de la premiere, elle est regardée comme une demande principale qui doit être formée à domicile, & jugée séparément.