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La roche blanche & noire charge aussi beaucoup, la grappe en est grosse & longue, le grain assez menu & fort serré ; il mûrit avec peine, parce que c’est une espece de petit bourdelais.

Le gros noir d’Espagne, ou la vigne d’Alicante, donne une grosse grappe garnie de gros grains bons à manger, & encore plus à faire le vin d’Alicante, si vanté.

Le raisin d’Afrique a ses grains gros comme des prunes. Il y a le rouge & le blanc. Ses grappes sont extraordinaires pour leur grosseur ; le grain est plus long que rond ; le bois en est épais, la feuille très grande & large ; il veut un soleil brûlant pour mûrir.

Le maroquin ou barbarou, est un gros raisin violet, dont les grappes sont aussi d’une grosseur extraordinaire ; le grain en est gros, rond & dur, le bois rougeâtre, & la feuille rayée de rouge. Il y en a de cette espece qui rapporte extraordinairement.

Le damas, vitis damascena, H. R. P. est encore un excellent raisin à manger ; la grappe en est fort grosse & longue, le grain très-gros, long, ambré, & n’a qu’un pepin ; il coule souvent & veut être taillé long ; il y en a de blanc & de rouge.

Le raisin d’Italie, autrement dit pergoleze, vitis pergulana, uvâ peramplâ, acino oblongo, duro, majore, subviridi, de Garidel, est de deux sortes, blanc & violet ; il a la grappe grosse & longue, le grain longuet & clair semé, mais il mûrit avec peine en France.

La vigne de Mantoue donne un fruit fort hâtif, mûrit des le commencement d’Août. Le grain est assez gros, plus long que rond, fort jaune, ambré, & d’un sûr extraordinaire.

Le raisin d’Autriche ou ciouta, a la feuille découpée comme le persil. Il est blanc, doux, charge beaucoup, ressemble au chasselas, mais il est peu relevé en vin.

Le raisin suisse est plus curieux que bon ; il a la grappe grosse & longue, les grains rayés de blanc & de noir, & quelquefois mi-partis.

Voilà une énumération bien ample des diverses especes de raisin, car j’aurois peut-être dû n’en parler que comme Pline l’a fait de son tems. Les grappes de raisin, dit-il, different entre elles par leur couleur, leur goût, & leurs grains ; il résulte de ces différences une multitude innombrable d’especes qui va se multipliant tous les jours ; ici elles sont purpurines, là de couleur de rose, vertes ailleurs ; mais les noires & les blanchâtres sont les plus communes. Les unes ressemblent à des mamelles gonflées, les autres s’alongent & portent le grain long comme la datte ; en un mot les terreins ne different pas plus entre eux que les grappes de raisin, ensorte qu’on peut assurer qu’il en est de la vigne comme des poiriers & des pommiers, c’est-à-dire qu’on en trouve une infinité d’especes différentes ; il s’en produit & s’en peut produire tous les jours de nouvelles. (D. J.)

Raisin barbu, (Botan.) on sait que la cuscute grimpe jusqu’au haut de la plante à laquelle elle est adhérente, lorsque cela lui est plus facile. Si la plante est basse, comme le thym & le serpolet, elle s’y étend horisontalement ; si la plante est très-haute & qu’elle puisse pousser vers le bas, elle jette de longs filets qui semblent vouloir chercher la terre ; c’est ce qui arrive lorsqu’elle est attachée à une grappe de raisin, on diroit qu’elle affecte alors de laisser pendre ses tiges qui deviennent très-longues ; leur entrelacement forme une masse qui va toujours en se retrécissant, & qui donne à cette grappe de raisin un certain air de monstruosité ; ce phénomene en a imposé, & a valu au raisin ainsi fait le nom de raisin barbu ou chevelu.

Lycosthène, dont l’esprit étoit tout porté pour le

merveilleux, témoin son ouvrage intitulé, prodigiorum & ostentorum chronicon ; Lycosthène, dis-je, ne trouva dans ce fait naturel qu’une prodigieuse monstruosité, & tous ceux qui l’ont suivi ont vû par les mêmes yeux ; la nature a paru même à Jean Bauhin s’écarter ici de ses lois générales.

Il est moins étonnant que Licet ait regardé ce raisin comme un vrai monstre, desirant de prouver qu’il y en avoit dans tous les genre d’êtres, il a cité ces grapes de raisin pour un exemple des monstres de la végétation.

Enfin Borel est le premier qui ait reconnu que cette prétendue monstruosité n’étoit dûe qu’à la cuscute qui s’attachoit à la grappe de raisin, & qui selon lui s’y agglutimoit ; l’usage qu’il vouloit tirer de ce fait, l’a engagé à l’observer un peu plus attentivement que ceux qui l’avoient précédé. Comme il vouloit expliquer comment un fil de foie pouvoit s’être enté sur l’œil d’un particulier, rien ne lui parut plus propre à justifier cette ente que la cuscute. Il se persuada que c’étoit par une glu qu’elle s’attachoit aux raisins, & qu’il en avoit été ainsi de ce fil de soie ; cependant il s’est trompé dans l’une & l’autre de ses observations. La cuscute n’a point la glu qu’il lui attribue, ce n’est point par elle qu’elle s’attache aux autres plantes, & jamais fil de soie ne s’est enté sur l’œil de personne ; en un mot Borel a expliqué par une ridicule supposition un fait imaginaire.

Les tems ont changé ; il n’y a plus aujourd’hui de physicien qui ne sache la raison de la prétendue monstruosité du raisin barbu : mais le commun des hommes est encore frappé de cet accident, comme d’une chose qui tient du merveilleux ; & même quantité de gens qui se piquent de connoissances au-dessus du vulgaire, ignorent que le raisin barbu n’est autre chose qu’un raisin où la cuscute se cramponne, étend ses tiges, & y insinue la partie avec laquelle elle tire son suc nourricier. Voyez Cuscute. (D. J.)

Raisin de Corinthe, (Hist. des drog.) voyez-en l’article au mot Raisin sec, Botan. (D. J.)

Raisin de mer, ephedra, genre de plante dont la fleur n’a point de pétales ; elle est composée de plusieurs étamines & stériles ; les embryons naissent sur d’autres parties de cette plante, ou sur d’autres plantes du même genre qui ne rapportent point de fleurs ; ils deviennent dans la suite un fruit mou, ou une baie garnie d’une capsule, qui renferme des semences le plus souvent oblongues. Tournefort, Inst. rei herb. corol. Voyez Plante.

Le raisin de mer est une espece d’ephedra, nommée par Tournefort ephedra maritima major ; c’est un arbrisseau qui croît à la hauteur d’un homme, & son tronc est quelquefois gros comme le bras ; il jette plusieurs rameaux grêles, déliés presque comme ceux du jonc, séparés par des nœuds comme dans l’equisetum, de couleur noirâtre ; ces rameaux se divisent en plusieurs autres dont les extrémités ou sommets sont pointus, durs & épineux : cet arbrisseau ne porte point de feuilles ; ses fleurs sortent des nœuds des branches attachées à un pédicule menu ; elles sont disposées en petites grappes de couleur herbeuse, blanchâtre, il leur succede des baies ou fruits pleins de jus, soutenues par un calice en forme de calotte, & prenant une couleur rouge quand ils sont mûrs ; leur goût est acide & agréable ; ils renferment des semences triangulaires, pointues, dures, astringentes ; la racine est oblongue, noueuse : cette plante vient aux lieux sablonneux & maritimes, en Languedoc, en Provence, & autres pays chauds. (D. J.)

Raisin d’ours, (Botan.) Tournefort ne compte qu’une seule espece de ce genre de plante qu’il nomme ursiva, I. R. H. 599. c’est un petit arbrisseau bas qui ressemble à l’airelle ou mirtille ; mais ses feuilles sont plus épaisses, oblongues, arrondies, appro-