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sa vertu merveilleuse ; c’est que quiconque l’avoit sur la tête, voyoit tout le monde, & n’étoit vu de personne : Homere dit que Pallas elle-même en fit usage, pour se dérober aux yeux de Mars ; Ovide le fait prêter à Persée dans une expédition contre Méduse & contre Phinée. Il y a bien de l’apparence que c’est ce casque qui depuis a donné aux poëtes & aux romanciers, l’idée de ces nuages & de ces armes enchantées qui rendent les heros invisibles, & leur laissent la liberté de voir.

Comme Pluton étoit difforme, & que son empire respiroit la tristesse, il ne trouva point de femme qui voulût le partager avec lui : il fut donc obligé d’user de surprise, & d’enlever de force celle qui n’auroit jamais voulu de lui, si on l’avoit laissée à sa liberté.

On appelloit Pluton, summanus, c’est-à-dire summus manium, le souverain des manes ou des ombres ; & les anciens lui dévouoient leurs ennemis.

Il étoit représenté dans un char tiré par quatre chevaux noirs, dont les noms sont, selon Claudien, Orphnéus, Æthon, Nyctéus & Alastor, noms qui marquent tous quelque chose de ténébreux & de funeste ; son sceptre est un bâton à deux pointes ou à deux fourches, à la différence du trident de Neptune, qui avoit trois pointes. Quelquefois on mettoit des clefs auprès de lui, pour signifier que son royaume étoit si bien fermé, qu’on n’en revenoit jamais.

Ce dieu étoit généralement haï, ainsi que tous les dieux infernaux, parce qu’on le croyoit inflexible, & qu’il ne se laissoit jamais toucher aux prieres des hommes. C’est pour cela qu’on ne lui érigeoit ni temple, ni autel, & qu’on ne composoit point d’hymne en son honneur.

On ne lui immoloit que des victimes noires, & la victime la plus ordinaire étoit le taureau. La principale cérémonie dans ses sacrifices, consistoit à repandre le sang des victimes dans des fosses près de l’autel, comme s’il avoit dû pénétrer jusqu’au royaume sombre de ce dieu. Tout ce qui étoit de mauvais augure, lui étoit spécialement consacré, comme le second mois de l’année, le second jour du même mois ; aussi le nombre deux passoit pour le plus malheureux des nombres.

Tous les Gaulois se vantent, dit César dans ses Commentaires, de descendre de Pluton, suivant la doctrine de leurs druides ; c’est pourquoi ils comptent les espaces du tems, non par les jours, mais par les nuits : les jours de la naissance, les mois & les années commencent chez eux par la nuit, & finissent par le jour. Il faut que Pluton ait été un des principaux dieux des anciens Gaulois, quoique César ne le dise pas, puisqu’ils le croyoient leur pere, & se glorifioient de lui devoir leur origine.

On mettoit sur le compte de Pluton, les tonnerres qui grondoient pendant la nuit. Sa fête suivoit immédiatement celle des saturnales ; elle étoit appellée sigillaire, à cause de petites figures qu’on prenoit soin de lui offrir.

Epiménide fit poser dans le temple des Euménides, les statues de Pluton, de Mercure & de la Terre ; elles étoient d’une forme agréable, dit Pausanias. Chacune d’elles étoit placée sur un autel différent.

Au revers d’une médaille de Gordien Pie, on voit une figure de Jovis ditis, double divinité adorée sous la forme d’une seule ; laquelle représentoit d’un côté Jupiter, qui commande au ciel & à la terre, & de l’autre, le dieu Plutus ou Pluton qui préside aux enfers, & à tous les lieux souterreins, sur-tout aux mines : c’est aussi à cause de ces deux différens rapports, qu’on représente ce dieu sur d’autres médailles, tantôt avec un aigle à la main droite, tantôt avec cerbere à ses piés. (D. J.)

PLUTONIUM, (Géog. anc.) lieu aux environs d’Hiérapolis de Phrygie. Strabon, liv. XIV. p. 649.

dit qu’on y voyoit un bois sacré, avec un temple dédié à Pluton & à Junon, ou plutôt à Proserpine, comme quelques-uns prétendent qu’on doit lire. (D. J.)

PLUTUS, s. m. (Mythol.) dieu des richesses, étoit mis au nombre des dieux infernaux, parce que les richesses se tirent du sein de la terre, séjour de ces divinités. Hésiode le fait naître de Cérès & de Jasion dans l’île de Crete, peut-être parce que ces deux personnages s’étoient appliqués toute leur vie à l’agriculture, qui procure les plus solides richesses.

Aristophane, dans sa comédie de Plutus, dit que ce dieu dans sa jeunesse avoit très-bonne vûe, mais qu’ayant déclaré à Jupiter qu’il ne vouloit aller qu’avec la vertu & la science, le pere des dieux, jaloux des gens de bien, l’avoit aveuglé pour lui ôter le discernement ; Lucien ajoute que depuis ce tems-là il va presque toujours avec les méchans ; car « comment un aveugle comme moi pourroit-il trouver un homme de bien, qui est une chose si rare ? au lieu que les méchans sont en grand nombre, & se trouvent par-tout, ce qui fait que j’en rencontre toujours quelqu’un ». Lucien fait encore Plutus boiteux ; « c’est pourquoi, dit-il, je marche lentement quand je vais chez quelqu’un, je n’arrive que fort tard, & souvent quand on n’a plus besoin de moi ; au contraire, lorsqu’il est question de retourner je vais vîte comme le vent, & l’on est tout surpris qu’on ne me voit plus. Mais, lui dit Mercure, il y a des gens à qui les biens viennent en dormant. Oh alors je ne marche pas, répond Plutus, l’on me porte ». Toutes ces allégories s’entendent sans peine, & ne méritent pas de nous arrêter.

Plutus avoit une statue à Athènes sous le nom de Plutus clairvoyant : elle étoit sur la citadelle, dans le fort, derriere le temple de Minerve, où l’on tenoit les trésors publics ; Plutus étoit placé là comme pour veiller à la garde de ces trésors. Dans le temple de la Fortune à Thèbes on voyoit cette déesse tenant Plutus dans ses bras sous la forme d’un enfant, comme si elle étoit sa nourrice ou sa mere. A Athènes la statue de la Paix tenoit le petit Plutus dans son sein, symbole des richesses que donne la paix. (D. J.)

PLUVIAL, s. m. (Hist. ecclés.) c’est une grande chappe que portent le chantre & le sous-chantre, à la messe & à vêpres, ainsi que l’officiant quand il encense. Le pluvial entoure toute la personne, & est attaché par le devant avec deux agraphes. Autrefois c’étoit la chappe ou manteau que les ecclésiastiques, & sur-tout les religieux, portoient à la campagne pour se défendre de la pluie ; c’est de-là que lui vient son nom. (D. J.)

Pluvial, (Jurisprud.) eaux pluviales, ce sont les eaux qui tombent du ciel. Voyez Eaux, Egout. (A)

PLUVIER, PLUVIER VERT, s. m. (Hist. nat. Ornithol.) pluvialis seu pardalis pluvialis viridis. Wil. oiseau de la grosseur du vanneau, ou un peu plus gros. Le dessus de la tête, le cou, les épaules, le dos, & en général toute la face supérieure de l’oiseau est noire, & a beaucoup de taches éparses, d’un jaune verdâtre ; cette couleur occupe les bords de chaque plume, & le milieu est noir ; le bec a un pouce de largeur ; il est noir & droit. Le cou est peu court & ressemble à celui du vanneau. La poitrine a une couleur brune mêlée d’un jaune verdâtre. Le ventre est blanc ; les plumes des côtés du corps ont l’extrémité brune & sont traversées par des lignes de la même couleur. Les grandes plumes des aîles sont toutes brunes, excepté les cinq intérieures qui ont la même couleur que le dos ; les dix premieres plumes ont les barbes extérieures terminées en pointe ; la onzieme est obtuse : dans celles qui suivent ce sont au contraire les barbes intérieures qui ont une poin-