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la plaie opposée à celui où on doit l’aggrandir ; on les couvre d’une compresse trempée dans du vin chaud ; on glisse une sonde cannelée, ou la sonde aîlée (Voyez Sonde, & les Pl.) le long des parties jusque dans le bas-ventre ; on coule un bistouri dans la cannelure pour étendre la plaie, afin de pouvoir faire la réduction des parties, on fait ensuite l’opération de la gastroraphie. Voyez Gastroraphie & Suture.

Lorsque l’épiploon & les intestins sont bléssés, il faut examiner l’étendue & la situation de la lésion : si l’épiploon n’est que légerement blessé, & dans la partie membraneuse, il faut le réduire : s’il est blessé dans ses bandes graisseuses, & que quelques-uns de ses vaisseaux sanguins soient ouverts, on fait ligature de cette partie au-dessus de l’ouverture du vaisseau, & on le coupe au-dessous de la ligature. Voyez Ligature de l’épiploon.

Si l’intestin n’est que légerement blessé, on le réduit : si la blessure est grande, on recommande d’arrêter à la plaie des parties contenantes l’extrémité du boyau qui répond à l’estomac, ce qui se fait par trois points d’éguille qui partagent la circonférence de l’intestin en trois parties égales ; il reste en cet endroit un anus artificiel. Quand les plaies des intestins sont moyennes, on propose la suture du pelletier, c’est-à-dire de coudre les deux levres de la plaie du boyau comme les Pelletiers cousent leurs peaux. Ceux qui conseillent cette suture disent qu’il faut observer de tenir les bouts du fil qui a servi à la suture, assez longs pour pouvoir approcher l’intestin du bord interne de la plaie des parties contenantes, afin de lui faire contracter adhérence dans cet endroit, & de pouvoir retirer le fil après la réunion des parties divisées. Sur la suture des intestins & du bas-ventre, voyez Suture.

Quand l’estomac & les intestins grèles sont blessés, on ne fait prendre au malade des alimens qu’en très-petite quantité, & souvent même que des bouillons nourrissans en lavemens : quand les gros intestins sont blessés, on ne doit point donner de lavemens.

Nous parlerons plus amplement des plaies. & surtout de celles des extrémités, au mot Suture, sur les plaies des arteres. Voyez Anévrisme.

Les plaies d’armes à feu mériteroient un article assez étendu, si les bornes où nous sommes réduits le permettoient : ce sont des plaies contuses, dont les grands accidens viennent du déchirement imparfait des parties membraneuses & tendineuses aponévrotiques, &c. Quand on débride bien ces plaies, on en fait cesser ordinairement les accidens : on les met en suppuration comme les ulceres afin d’en faire tomber les chairs meurtries & contuses ; on les panse ensuite comme des plaies ordinaires : on fait usage avec beaucoup de succès des saignées, des cataplasmes, & autres moyens capables de relâcher les parties tendues, &c. Voyez le Traité des plaies d’armes à feu par Paré, par M. le Dran, par M. Desport, & autres, & les Mémoires de l’académie royale de Chirurgie. Nous avons parlé de l’extraction des corps étrangers au mot Corps étranger, Extraction. (Y)

Plaies d’Égypte, (Hist. sacrée.) on appelle ainsi les châtimens dont Dieu punit par les mains de Moïse & d’Aaron, le refus obstiné de Pharaon roi d’Egypte, qui ne vouloit pas permettre le retour des Israélites. La premiere plaie fut le changement des eaux du Nil en sang. La seconde fut la quantité innombrable de grenouilles dont le pays fut rempli. La troisieme fut l’abondance de moucherons, qui tourmenterent cruellement les hommes & les bêtes. La quatrieme plaie fut une multitude de mouches qui infecta la contrée. La cinquieme fut une peste subite qui tua les troupeaux. La sixieme fut des ulceres pestilenciels

qui attaquerent les Egyptiens. La septieme fut une grêle épouvantable, qui n’épargna que la terre de Gessen, habitée par les Israélites. Par la huitieme les sauterelles ravagerent tout le pays. La neuvieme fut des ténebres épaisses qui couvrirent l’Egypte pendant trois jours. La dixieme & derniere plaie fut la mort des premiers nés frappés par l’ange exterminateur. Cette plaie terrible toucha le cœur endurci de Pharaon, qui se détermina finalement à laisser partir les Israélites. Pour retenir plus aisément ces dix plaies, on les a exprimées dans les cinq vers suivans.

Prima rubens unda est ; ranarum plaga secunda
Inde culex terris ; post musca nocentior istis.
Quinta pecus stravit ; anthraces sexta creavit.
Post sequitur grando, post bruchus dente nefando ;
Nona tegit solem ; primam necat ultima prolem.


(D. J.)

PLAIN, se dit dans l’Ecriture, du produit total des deux angles de la plume, qui dans son action touche le papier perpendiculairement. Il y a deux sortes de plains, le parfait & l’imparfait. Le parfait est celui dont nous venons de parler ; l’imparfait est celui qui part d’un degré oblique, gauche ou droit. Voyez le volume des Planches, à la table de l’Ecriture, degrés obliques, gauches & droits.

Plain, ou Plein, (Tannerie.) sorte de grande cuve profonde de bois ou de pierre mastiquée en terre, dont on se sert dans la tannerie pour mettre les cuirs ou peaux que l’on veut plamer, c’est-à-dire, dont on veut faire tomber le poil ou bourre, par le moyen de la chaux détrempée dans l’eau, pour les mettre ensuite dans la fosse au tan. Le bord du plain se nomme la traite : on dit mettre un cuir en plain, pour dire le mettre dans la cuve, le tirer du plain, ou le mettre sur la traite ; pour dire le tirer de la cave pour le faire égoutter sur le bord du plain. Savary. (D. J.)

Plain, un oiseau va de plain lorsqu’il vole les ailes étendues & sans les remuer.

PLAINDRE, REGRETTER, (Synon.) on plaint le malheureux ; on regrette l’absent, l’un est un mouvement de la pitié, & l’autre est un effet de l’attachement.

La douleur arrache nos plaintes, le repentir excite nos regrets.

Un bas courtisan en faveur est l’objet du mépris public ; & lorsqu’il tombe dans la disgrace, personne ne le plaint. Les princes les plus loués pendant leur vie, ne sont pas toujours les plus regrettés après leur mort.

Le mot de plaindre employé pour soi-même, change un peu la signification qu’il a, lorsqu’il est employé pour autrui. Retenant alors l’idée commune & générale de sensibilité, il cesse de représenter ce mouvement particulier de pitié qu’il fait sentir, lorsqu’il est question des autres ; & au lieu de marquer un simple sentiment, il emporte de plus dans sa signification, la manifestation de ce sentiment. Nous plaignons les autres, lorsque nous sommes touchés de leurs maux ; cela se passe au-dedans de nous ; ou du moins peut s’y passer, sans que nous le témoignions au-dehors. Nous nous plaignons de nos maux, lorsque nous voulons que les autres en soient touchés ; il faut pour cela les faire connoître.

Ce mot est encore quelquefois employé dans un autre sens que celui dans lequel on vient de le définir ; au lieu d’un sentiment de pitié, il en marque un de repentir : on dit en ce sens qu’on plaint ses pas ; qu’un avare se plaint toutes choses, jusqu’au pain qu’il mange.

Quelque occupé qu’on soit de soi-même, il est des momens où l’on plaint les autres malheureux. Il est bien difficile, quelque philosophie qu’on ait, de souf-