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& des sudorifiques, & en appliquant sur la partie une compresse trempée dans de l’esprit-de-vin camphré, ou dans de l’eau de chaux. Lors au contraire qu’elle est causée par un relâchement de la peau, il convient d’employer des remedes corroboratifs, comme un emplâtre d’huile noire de tartre, mêlée avec de la cire ou du baume de Pérou, de l’eau de la reine de Hongrie, de l’esprit de vers-de-terre, & autres choses semblables. Supposé que ces remedes ne réussissent point, le mieux qu’on puisse faire est de retrancher une portion suffisante de la peau relâchée, pour la racourcir & la faire rentrer dans son état naturel ; mais cette opération délicate a rarement du succès.

Ce qu’on nomme mutilation de la paupiere, en grec κολόϐωμα, est une maladie de l’œil, dans laquelle le bord de la paupiere est fendu, ou consommé en partie ; ensorte que les angles de part & d’autre de cette fente, même les bords, se retirent & se renversent. C’est une espece d’éraillement de la paupiere produit par une plaie, un ulcere, ou autre maladie. Quelque petite que soit cette fente ou cette mutilation de la paupiere, le mal est incurable ; la paupiere a trop peu d’épaisseur pour pouvoir être retaillée, & soutenir une ou deux aiguilles, autant de tems qu’il en faudroit pour procurer l’union.

Le trachome des Grecs, qu’on appelle en françois dartre des paupieres, est une ulcération des paupieres, accompagnée de rougeur, de prurit, d’âpreté, d’inégalités, de ficosités, de fentes, & de duretés dans la partie interne de l’une & de l’autre paupiere ; on en fait trois especes, ou plûtôt trois degrés différens.

Le premier est quand en renversant les paupieres, on voit qu’elles sont en-dedans rouges, inégales, âpres, & que le malade se plaint d’une démangeaison cuisante ; on appelle cette espece dasites. Le second est quand ces symptomes sont plus violens, & qu’il se forme aux paupieres de petits tubercules, à peu-près comme des pepins de figue ; alors le mal prend le nom de ficosis, ficosa palpebra. Le troisieme est quand la maladie est si invétérée, que la partie interne des paupieres est ulcérée avec des fentes & des duretés calleuses : les Grecs nomment cette espece de dartre calleuse des paupieres, thilosis, & les latins callositas palpebræ ; pour la cure, voyez Trachome.

Le dérangement des cils des paupieres qui se tournent quelquefois en-dedans, & irritent les yeux par de vives douleurs accompagnées d’inflammations, est un mal qui se nomme trichiase. Voyez Trichiase.

Le renversement & retirement des paupieres, qui ne couvrent pas suffisamment l’œil, se nomme ectropium & lagophthalmie. Voyez-en les articles, & joignez-leur la dissertation savante de Keeckius sur l’ectropium, car elle mérite d’être consultée.

Quand les paupieres sont collées l’une à l’autre, ou contre l’œil même, quelle qu’en soit la cause, cette maladie s’appelle concrétion des paupieres, & par les Grecs, ἀγκυλοϐλέφαρον, mot composé de ἀγκύλος, jointure, & de βλέφαρον, paupiere. Celse ainsi que Paul Eginete en ont parlé. On distingue bien aisément cette concrétion d’un accident passager qui arrive aux yeux par l’intervention de quelque matiere glutineuse, sans qu’il y ait une véritable coalition, comme on le voit quelquefois dans la petite vérole & dans l’ophthalmie.

Quelquefois les paupieres sont tellement collées l’une contre l’autre, qu’on ne sauroit du tout ouvrir l’œil. Tantôt cet accident n’arrive qu’à un œil, d’autres fois à tous les deux. Il arrive aussi quelquefois que la paupiere s’unit avec la conjonctive, & cela plus ou moins fort, à proportion du nombre de fibres entre lesquels se fait la coalition. Ces sortes de maux viennent aux yeux quand cette partie ou la paupiere qui la couvre, ont été mal traitées par la petite vérole, ou à la suite d’une violente inflammation, ou d’une

brûlure, sur-tout si elle a été faite avec de la poudre à canon, ou en un mot de toute autre exulcération de quelque nature qu’elle soit. Il n’est pas sans exemple de voir des enfans naître avec cette défectuosité, & des hommes sains d’ailleurs la contracter à l’occasion d’excroissances charnues à l’une ou l’autre angle de l’œil. Heister dans sa chirurgie a vû l’un & l’autre arriver.

Le même auteur ajoute qu’il a vû les paupieres collées à la cornée, ce qui est difficile à concevoir ; en tout cas c’est un fait rare, & dans lequel il ne peut guere arriver qu’on en guérisse sans perdre la vue : en général la guérison de la coalition des paupieres est très-incertaine. Un des cas où il est plus difficile de décoller la paupiere de dessus l’œil, c’est lorsque le mal est causé par une brûlure. Ce qu’on peut tenter de mieux alors, est de faire force injections, d’introduire dans les yeux des médicamens humectans & émolliens, propres à les tenir toujours humides & mobiles, & à empêcher les parties enflammées de se coller l’une contre l’autre.

Quand la coalition des paupieres est une suite de la petite vérole, il est difficile de la détacher sans que l’œil en souffre par des cicatrices irremédiables ; mais quand à l’occasion de la petite vérole, ou d’une inflammation aux yeux, il arrive, ce qui n’est pas rare, que les paupieres s’attachent l’une à l’autre pendant le sommeil, par l’intervention de quelques humeurs gluantes, qui empêchent le malade d’ouvrir les yeux, alors le remede est simple. On se gardera bien de lui ouvrir les yeux de force, mais on délayera ces humeurs avec facilité par des injonctions d’eau tiede, & en bassinant la partie avec du lait chaud, au moyen de quoi les paupieres ne manqueront pas de s’ouvrir.

Mais dans toutes les occasions où pour remédier à la concrétion des paupieres il est besoin de l’opération, on ne sauroit trop, comme je l’ai dit, en charger une main habile, sure & expérimentée. Il faut aussi que le même chirurgien après avoir opéré, tâche d’empêcher par des précautions convenables, que les paupieres ne s’attachent de nouveau. Un des bons moyens pour y parvenir, est de mettre entre deux, un petit linge très-fin, ou une feuille d’or enduite d’huile d’amandes douces ; on les y laisse quelques jours jusqu’à ce qu’on n’ait plus à craindre de nouvelle coalition. Cependant comme il arrive souvent que la personne incommodée ne peut rien souffrir entre sa paupiere & son œil, il faut alors se contenter de lui instiller dans l’œil, un collyre d’eau de plantain, de tuthie & de sucre de saturne, & réitérer souvent cette instillation ; en même tems le malade aura soin de frotter doucement, & remuer lui-même ses paupieres, en les écartant de-tems-en-tems avec les doigts.

Je finis par une remarque sur la concrétion des paupieres ; c’est qu’il n’en faut point faire l’opération sur les enfans, par l’impossibilité qu’il y a de les engager à tenir les yeux ouverts. Il faut donc attendre d’eux un âge raisonnable, d’autant plus que cette maladie n’est pas du nombre de celles qui se rendent plus fâcheuses par le cours de quelques années. Je renvoie toujours le lecteur sur les maladies de l’œil à Maître-Jan ; & c’est en particulier sur les maladies des paupieres qu’on se plait à voir sa candeur & son amour pour la vérité. (Le Chevalier de Jaucourt.)

PAUPOIRE, s. m. (Verrerie.) plaque de fonte comme le marbre, de huit à neuf lignes d’épaisseur. Elle est placée à terre ; & c’est là-dessus que le maître souffle & forme la paraison avant de la mettre dans le moule.

PAUSAIRE, s. m. (Hist. anc.) officier de l’ancienne Rome, qui régloit les pauses que l’on devoit faire dans les pompes ou les processions solemnelles. Voyez Pause.

Dans ces sortes de cérémonies il y avoit des sta-