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ple, tous les peuples qui sont sous l’équateur n’ont point d’ombre à midi dans le tems des équinoxes. Ils ne commencent à en avoir, que quand il s’éloigne vers l’un ou vers l’autre des tropiques : alors ceux qui sont entre l’équateur & le tropique, dont le soleil s’approche de jour en jour, deviennent asciens, ou sans ombre à midi, à mesure que le soleil passe par leur parallele.

Les amphisciens, amphiscii, sont ceux qui ont deux ombres différentes, c’est-à-dire dont l’ombre est alternativement septentrionale ou méridionale ; cela est commun aux peuples qui habitent la zone torride. Supposons une pyramide ou un obélisque sur la côte d’or en Guinée au bord de la mer, auprès de Saint George de la Mine ou Elmina, comme l’appellent les Hollandois, ou en tel autre lieu de cette côte ; lorsque le soleil est par les 3d environ 30′, cette pyramide ou cet obélisque sera sans ombre ; mais lorsqu’il s’avance vers le tropique du cancer, ou qu’il en revient, jusqu’à ce qu’il soit parvenu à ce parallele que nous avons dit de 3 deg. environ 30 min. l’ombre de la pyramide ou de cet obélisque sera méridionale & tombera dans la mer. Au contraire, lorsque le soleil aura repassé ce parallele, l’ombre de la pyramide ou de l’obélisque sera septentrionale, & tombera dans les terres.

Il faut bien se ressouvenir que nous ne parlons ici que de l’ombre de l’instant du midi vrai. Le lecteur se rappellera aussi ce que nous avons dit de l’ombre de six heures du matin, & de celle de six heures du soir, qui, quoique jettées l’une à l’occident, l’autre à l’orient, font ensemble une ligne droite continuée aux deux côtés de la perche, dont le pié les unit. Il en est de même de l’ombre méridionale ou septentrionale qu’aura successivement la pyramide dont nous parlons ; ces deux ombres feront ensemble une ligne droite.

Les perisciens, periscii, sont ceux dont les ombres tournent autour d’eux. On sait que les peuples qui demeureroient sous un des poles, n’auroient dans toute l’année qu’un jour de six mois, & une nuit d’une égale durée ; or il est aisé de comprendre que ne perdant de vûe le soleil qui ne quitte point leur horison pendant six mois, leur ombre devroit tourner autour d’eux autant de fois qu’il y a de jours de vingt-quatre heures, dans ces six mois de jour perpétuel dont ils jouiroient. Il est ici question de l’ombre perpétuelle, & de toutes les heures, & non pas de l’ombre méridienne qui est toujours tournée du même côté, selon le pole.

Mais si l’on conçoit que le méridien ne se termine pas au pole, & qu’il se continue au delà en faisant un cercle entier, alors le soleil coupe deux fois le méridien, une fois à midi, & l’autre fois à minuit. Pour nous il disparoît, & lorsqu’il parcourt la partie inférieure de notre méridien, il ne peut nous donner d’ombre puisque sa lumiere nous est cachée ; mais les peuples que nous supposons sous le pole, ne cessent point de le voir pendant six mois, puisqu’il ne quitte point leur horison. Alors l’ombre de midi & l’ombre de minuit, tracées sur une même ligne qui est le méridien, se jettent en deux parties opposées, & font ensemble une ligne droite ; & ces deux ombres sont à douze heures l’une de l’autre. Si le corps élevé qui forme l’ombre, est précisément sous le pole, les deux ombres seront également tournées vers le midi. S’il est à quelque distance, l’ombre à midi sera septentrionale, & à minuit méridionale.

Les hétérosciens, heteroscii, sont les peuples dont l’ombre méridienne est toujours tournée du même côté. Cela convient à ceux qui habitent entre le tropique & le cercle polaire. Ceux qui sont au nord du tropique, ont toujours l’ombre méridienne septentrionale : ceux qui vivent au sud du tropique

du capricorne, ont toujours l’ombre méridienne au midi.

Les peuples situés sous l’un ou l’autre des deux tropiques, n’ont point d’ombre quand le soleil est arrive a leur tropique. Le reste de l’année, ils ont une ombre qui est toujours la même à midi. C’est ce que les Géographes expriment par ces paroles, qu’ils sont asciens & hétérosciens.

Les peuples de la zone torride, situés entre les deux tropiques, n’ont point d’ombre quand le soleil passe par leur parallele ; mais dès qu’il s’en écarte, ils ont une ombre qui est ou septentrionale ou méridionale, selon qu’il avance vers l’un ou vers l’autre tropique ; c’est ce que veulent dire ces mots osciens & amphisciens.

Les peuples des zones tempérées n’ont qu’une ombre, qui est toujours ou septentrionale ou méridionale, comme nous l’avons expliqué ci dessus. Ainsi ils sont hétérosciens, & ne sauroient être asciens, parce que le soleil n’arrive jamais à leur parallele.

Les peuples des zones froides ont toujours durant six mois, le soleil qui tourne autour d’eux, & fait tourner leur ombre de même. Il coupe deux fois en vingt-quatre heures le méridien ; ainsi ils sont Périsciens, comme nous l’avons dit ci-dessus. (D. J.)

Ombre, Umbre, Maigre, Dainc, umbra, (Histoire naturelle, Ictiologie.) poisson de mer que l’on a nommé ombre parce qu’il a sur les côtés du corps des bandes transversales d’une couleur jaune, obscure & de différentes teintes ; ces bandes représentent des ombres par leur position ; il y a successivement depuis la tête jusqu’à la queue une bande de couleur foncée, & une autre d’une couleur plus claire. Ce poisson est plus grand que le corps, il a le même nombre de nageoires ; mais elles sont plus courtes & moins noires, principalement celles du ventre & du dos. Il est de couleur noirâtre, & il a un tubercule placé à l’extrémité de la mâchoire inférieure ; la tête est couverte de petites écailles. Il y a devant les yeux deux enfoncemens un peu grands, & plusieurs petits sur la mâchoire inférieure. Les mâchoires sont entierement dépourvûes de dents. L’ombre a la chair blanche séche, & d’un goût très-bon, mais elle est difficile à digérer. On sert ce poisson sur les meilleures tables. Rondelet, hist. des poissons I. part. liv. V. chap. jx. Voyez Poissons.

Ombre de riviere, umbra fluviatilis, poisson de riviere auquel on a donné le nom d’ombre, à cause de sa couleur brune ; il croît jusqu’à une coudée ; il a deux nageoires sur le dos, deux sur le ventre & une à chaque ouie : il ressemble à la truite, mais il a la tête plus longue & la bouche plus petite. Les mâchoires sont dépourvûes de dents, & moins pointues que dans la truite : les yeux sont fort ouverts, la queue est large & fourchue. Il y a sur les côtés du corps une ligne de couleur obscure, qui s’étend depuis les ouies jusqu’à la queue. La chair de ce poisson est blanche, seche & de bon goût. Rondelet, hist. des poissons, I. part. chap. iij. Voyez Poisson.

Ombre, terre d’(Hist. nat. Minéral. & Peint.) umbra, creta umbria. C’est une terre d’un brun plus ou moins foncé ; elle est légere & en poussiere ; elle a la proprieté de s’enflammer dans le feu, & de répandre une odeur fétide. Son nom paroît venir de l’Ombrie, pays d’Italie, d’où il vient sous ce nom une terre d’un brun clair. La terre de Cologne est une terre colorée plus foncée.

La propriété que la terre d’ombre a de s’enflammer & de répandre une odeur désagréable, fait voir qu’elle contient une substance bitumineuse de la nature du charbon de terre.

M. Emanuel Mendez d’Acosta, dans son hist. nat.