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ces, les Tartares, persuadés que Natagai & leurs autres idoles vivent, & ont besoin de nourriture, leur présentent des viandes, & leur frottent la bouche avec la graisse des mets qu’ils servent sur leurs tables. Kircher, de la Chine.

NATAL, adj. (Gramm.) il se dit du tems ou du lieu de la naissance. Le jour natal ; le pays natal. Dans quelques communautés religieuses, la maison natale est celle où l’on a fait profession. Les anciens ont célébré la naissance des hommes illustres par des jeux appellés natals. Les Chrétiens ont eu leurs fêtes natales ; Noël, Pâques, la Pentecôte & la Toussaint. On aime son pays natal ; il est rare qu’on n’y laisse des parens, des amis ou des connoissances : & puis, on n’y peut faire un pas sans y rencontrer des objets intéressans par la mémoire qu’ils nous rappellent de notre tems d’innocence. C’est ici la maison de mon pere ; là je suis né : ici j’ai fait mes premieres études ; là j’ai connu cet homme qui me fut si cher : ici cette femme qui alluma mes premiers desirs : & voilà ce qui forme cette douceur dont Virgile & Ovide se seroient rendu raison s’ils y avoient un peu réfléchi.

Natal, (Géog.) pays d’Afrique dans la Cafrerie, situé entre le 31. 30. 28. Ses habitans demeurent les uns dans des cavernes ou trous de rochers, les autres dans de petites maisons, qui sont si serrées & si bien couvertes de roseaux ou de branches d’arbres, que les vents & la pluie ne sauroient y pénétrer. Les Hottentots sont leurs voisins au sud.

Le pays de Natal est borné au nord par la riviere della Goa qui est navigable ; il est borné à l’est par la mer des Indes ; mais on ne sait pas encore jusqu’où il s’étend à l’ouest. Le quartier qui regarde la mer est un pays de plaines & de forêts. On n’y manque pas d’eau, parce que les montagnes fournissent une quantité de petits ruisseaux qui se joignent ensemble, & forment la riviere de Natal. Les savanes y sont couvertes d’herbes fort épaisses.

Entre les animaux terrestres, on y voit des tigres, des éléphans, des bufles, des bœufs, des vaches montagnardes & des bêtes fauves. Les éléphans y fourmillent. La volaille y abonde en canards sauvages & domestiques, sarcelles, cocqs, poules, outre une infinité d’oiseaux qui nous sont inconnus. La mer & les rivieres sont extrèmement poissonneuses ; mais les habitans ne prennent guere que des tortues.

Les naturels de ce pays sont déja différens des Hottentots ; ils sont beaucoup moins mal-propres & moins laids. Ils sont aussi naturellement plus noirs ; ils ont les cheveux crépus, le visage en ovale, le nez plat de naissance, à ce que dit Kolbe, & les dents blanches ; mais ils ont aussi un peu de goût pour la graisse, car ils portent des bonnets élevés de huit à dix pouces & faits de suif de bœuf. Ils cultivent la terre, y sement une espece de blé-de-turquie dont ils font leur pain.

Les hommes vont presque tous nuds, ainsi que les femmes. Lorsqu’il pleut, ils jettent sur leurs épaules un simple cuir de vache, dont ils se couvrent comme d’un manteau. Ils boivent du lait aigri pour se desaltérer.

Il est permis à chaque homme d’avoir autant de femmes qu’il en peut entretenir ; mais il faut qu’il les achete, puisque c’est la seule marchandise qu’on achete & qu’on vende dans la terre de Natal. On donne des vaches en troc pour des femmes ; de sorte que le plus riche est celui qui a le plus de filles ou de sœurs à marier.

Ils demeurent ensemble dans de petits villages composés de familles toutes alliées les unes aux autres. C’est ainsi qu’ils vivent dans l’innocence de la nature, en se soumettant volontiers au plus âgé d’entr’eux, lequel les gouverne tous. Voyez de plus grands détails dans les voyages de Dampierre. (D. J.)

NATANGEN, (Géograph.) cercle du royaume de Prusse sur le Prégel. Il contient quatre provinces ; le Natangen propre, le Bartenland, la Sudavie & la Galindie. Brandebourg en est la capitale.

NATATION, s. f. (Méd. gymnast.) c’est l’action de nager, sorte de mouvement progressif dont est susceptible un grand nombre d’animaux qui s’en servent pour transporter leur corps d’un lieu à un autre sur la surface ou au-travers des eaux sans aucun appui solide, de façon qu’ils se meuvent dans le fluide comme les oiseaux se meuvent & courent dans les espaces de l’air.

Cependant il y a cette différence entre l’action de voler & celle de nager, que pour se soutenir dans les airs, les animaux volatiles ont besoin d’une force très-grande, à cause que leur corps est d’une gravité spécifique beaucoup plus considérable que celle du fluide dans lequel ils ont à se soutenir suspendus ; au lieu que les animaux qui nagent naturellement n’ont point à employer de forces pour se soutenir suspendus dans l’eau ou sur la surface, parce que leur corps est moins pesant qu’un égal volume de ce fluide dont d’ailleurs la consistance leur sert de soutien.

Ce qui le prouve, c’est que si les animaux terrestres, les oiseaux même tombent dans l’eau, & y sont plongés fort avant, ils reviennent d’eux-mêmes sur l’eau comme un morceau de bois ; ils sont, pour ainsi dire, repoussés du fond vers la surface avec une sorte d’effort, comme pour être lancés au dessus, sans qu’il y ait aucun mouvement tendant à cet effet de la part de l’animal.

Il n’est personne qui étant dans le bain, n’ait éprouvé qu’en étendant horisontalement les piés & les mains, on sent que dès qu’on ne fait pas un continuel effort pour s’appesantir & se fixer au fond du vase, l’eau souleve d’elle-même tout le corps jusqu’à ce qu’il y en ait une partie qui surnage.

Ainsi lorsqu’un animal quadrupede ou volatile est jetté vivant, ou se jette dans l’eau, de quelque maniere que cela se fasse, il revient toujours sur la surface, après avoir plongé plus ou moins avant, en sorte qu’il reparoît bientôt une grande partie de son corps qui surnage ; c’est constamment la partie supérieure, puisque tandis qu’il a le ventre toujours plongé, le dos & la tête restent au-dessus de l’eau, & il conserve l’attitude qui lui est naturelle en marchant, parce que le centre de gravité de l’animal répond au milieu du bas-ventre qui est toujours tourné en bas comme un pendule, & que la poitrine, le dos & la tête sont moins pesans que le reste du corps.

Il n’en est pas de même par rapport à l’homme, attendu qu’il a la tête, tout étant égal, beaucoup plus pesante que celle d’aucun autre animal, parce qu’il a la masse du cerveau d’un beaucoup plus grand volume ; qu’il lui est par conséquent difficile de tenir la tête élevée hors de l’eau ; ce qu’il ne peut faire que par l’action de ses piés & de ses mains, qui en pressant par reprises l’eau de haut en bas, en imitant en quelque sorte l’effet des rames, font faire à son corps incliné, de la tête aux piés, comme des élancemens, des sauts du dedans au dehors de l’eau, qui se répetent avec assez de promptitude pour tenir toujours la tête au-dessus de ce fluide ; ce qui se fait sans aucune peine à l’égard des quadrupedes laissés à eux-mêmes, & sans aucun mouvement de leur part.

C’est ainsi que les poissons se soutiennent, se reposent même & dorment à la surface des eaux, ayant le dos au dessus & seulement le ventre plongé ; ils ne peuvent s’enfoncer qu’en se rendant plus pesans par la compression de l’air de la vessie qu’ils ont particulierement destinée à cet usage ; voyez Poisson, & les autres animaux ne peuvent aussi plonger que