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deur & en figure dans les divers sujets dès le moment de leur naissance. Les negres, les Hottentots & quelques peuples de l’Asie bien différens des Juifs, ont presque tous le nez camus, écaché. La plûpart des anatomistes prétendent que cette camusité vient de l’art, & non de la nature. Comme les négresses, suivant le récit des voyageurs, portent leurs petits enfans sur le dos pendant qu’elles travaillent, il arrive qu’en se haussant & baissant par secousses, le nez de l’enfant doit donner contre le dos de la mere, & s’applatir insensiblement. Indépendamment de cette raison, le P. du Tertre rapporte que les negres écrasent le nez à leurs enfans, & leur pressent aussi les levres pour les rendre plus grosses ; ensorte que ceux à qui l’on n’a fait ni l’une ni l’autre de ces opérations, ont le nez élévé & les levres aussi minces que les Européens.

Cela peut être vrai des negres du Sénégal ; mais il paroît assez certain que dans presque tous les autres peuples negres, les grosses levres, de même que le nez large & épaté sont des traits donnés par la nature, qu’on a fait servir de modele à l’art qui est en usage chez eux & parmi d’autres peuples, d’écacher le nez, & de grossir les levres à ceux qui ont reçu la naissance avec cette perfection de moins. Comme c’est dans la forme plate qu’ils font consister la beauté du nez, le premier soin des meres après leur accouchement, est d’applatir le nez de leurs enfans, pour qu’ils ne soient pas difformes à leurs yeux, tant les idées de beauté sont bisarres chez les peuples de la terre.

Plusieurs ne se contentent pas de préférer l’applatissement du nez à son élévation, ils trouvent un nouvel agrément à se percer cette partie pour y passer toutes sortes d’ornemens de leur goût, & cet usage est fort étendu en Afrique & en Orient. Les negres de la nouvelle Guinée traversent leurs deux narines par une espece de cheville longue de trois ou quatre pouces. Les sauvages de la Guyane y passent des os de poissons, des plumes d’oiseaux & d’autres choses de ce genre. Les habitans de Gusarate, les femmes malabares & celles du golfe Persique y portent des anneaux, des bagues & d’autres joyaux. C’est une galanterie chez quelques peuples arabes, de baiser la bouche de leurs femmes à travers ces anneaux, qui sont quelquefois assez grands pour enfermer toute la bouche dans leur rondeur.

Les Européens au contraire ne se font percer que les oreilles pour les orner d’anneaux & de bijoux ; ils trouvent avec raison qu’il ne faut ni gêner ni gâter le nez, & qu’il contribue beaucoup à la beauté, quand il n’est ni trop grand, ni trop petit, ni trop écrasé, ni trop sortant au-dehors.

Sa forme & sa position plus avancée que celle de toutes les autres parties du visage, sont particulieres à l’espece humaine ; car dans aucun animal le nez ne fait un trait élevé. Les singes mêmes n’ont, pour ainsi dire, que des narines, ou du moins leur nez, qui est posé comme celui de l’homme, est si plat & si court, qu’on ne doit pas le regarder comme une partie semblable. Les oiseaux n’ont point de narines ; ils ont seulement deux trous & deux conduits pour la respiration & l’odorat, au lieu que les quadrupedes ont des nazeaux ou des narines cartilagineuses comme les hommes.

Je ne sache aucun exemple d’enfant venu au monde avec la privation de la cloison du nez, ni avec les narines bouchées par un vice de conformation naturelle, & je sais même que l’accident d’un nez fermé contre nature par quelque maladie, s’offre très rarement à l’art de la Chirurgie pour le percer.

Nez, maladies du nez, (Médecine.) Les usages du nez & des humeurs qui y abordent méritent une attention singuliere dans la pratique de médecine.

Le défaut de conformation de cette cavité peut occasionner des changemens dans la respiration, dans la voix, dans l’haleine ; la mauvaise qualité de l’humeur qui y coule peut déranger entierement l’œconomie animale.

1°. Si les sinus qui composent l’étendue du nez sont trop resserrés ou étranglés, leur cavité se trouvant diminuée, la membrane pituitaire aura moins d’étendue, l’organe de l’odorat sera plus borné, l’humeur muqueuse se filtrera en moindre quantité, ses issues seront moins libres & plus étroites, elle croupira plus long-tems, elle rendra punais ceux qui se trouveront attaqués de ces accidens : ce que le défaut de conformation occasionne, peut souvent arriver par l’inflammation de ces parties, par les changemens de l’air environnant, par des tumeurs qui surviendront dans cette cavité, des polypes, des tumeurs skirrheuses, des cancers & autres accidens de cette nature.

Les remedes que l’on pourroit apporter dans ces facheuses circonstances sont différens, selon les causes & leurs accidens. On peut les voir & les examiner tous en particulier & en leur lieu.

2°. La qualité vitiée de l’humeur du nez est d’une grande conséquence dans l’œconomie animale ; son épaississement occasionne une respiration difficile, seche & douloureuse, une toux seche, une difficulté de se moucher, un dessechement dans le nez, une chaleur, une sécheresse dans l’air, une acrimonie dans ses particules qui irrite les solides, les roidit & empêche les parois de la cavité de se prêter à l’action de l’air.

Sa trop grande fluidité rendant les parties trop humides, les relâche & les empêche d’exercer leur ressort ; le trop d’humidité de la membrane pituitaire fait que la sérosité y séjourne & y croupit, & que la morve qui abonde, fait perdre aux nerfs leur qualité & leur sensibilité : l’enchifrenement est souvent l’effet de cette qualité vicieuse de l’humeur pituitaire & muqueuse du nez. Pour guérir cette maladie, on doit évacuer la surabondance de sérosité par les purgatifs, les diaphorétiques, les expectorans, les salivans & autres remedes particuliers évacuans. Les infusions de lierre terrestre, d’hysope, de cataire sont bonnes dans ces cas.

La grande abondance de l’humeur muqueuse du nez occasionne une constipation extraordinaire, parce que la dérivation qui se fait de la mucosité dans le nez, en tarit la source dans les intestins ; & de cette façon les excrémens restent à sec & privés de leur véhicule, & de cette glutinosité qui leur permet de glisser le long de la cavité du cylindre intestinal : de-là vient que les gens qui mouchent & expectorent ou crachent beaucoup, sont d’ordinaire fort constipés : de là vient aussi que lorsque la morve est dessechée, le ventre est aussi paresseux, ce qui est ordinaire dans l’été ; au contraire lorsque la morve est délayée, les excrémens le sont aussi, ce qui arrive dans l’hiver, où la transpiration est diminuée, & où les sécrétions sont plus abondantes dans le nez & dans les intestins que vers la surface externe du corps.

Nez coupé, Staphylodendron, s. m. (Hist. nat. Bot.) genre de plante à fleur en rose, composée de plusieurs pétales disposés en rond. Le pistil sort du calice qui est profondément découpé, & devient dans la suite un fruit membraneux, renflé comme une vessie & divisé en plusieurs loges. Ce fruit renferme des semences fort dures, & pour ainsi dire, osseuses. Tournefort, Inst rei herb. Voyez Plante.

Nez coupé, ou Faux Pistachier, Staphylodendron, grand arbisseau qui se trouve dans quelques contrées de l’Europe méridionale. Il prend quelquefois douze à quinze piés de hauteur sur un