Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 10.djvu/884

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les que possede la compagnie hollandoise, & celles qui lui procurent le plus de profit ; car c’est-là qu’on recueille toutes les noix muscades & le macis, que les habitans apportent aux magasins de la compagnie, & dont elle fait le trafic dans tout le monde. Si les autres îles qui dépendent de Banda & qui sont un peu éloignées, se trouvent avoir quelques muscadiers, on les coupe, on les brûle, on les déracine soigneusement, afin qu’aucune nation ne puisse en avoir du fruit. Ainsi, jusqu’à ce jour, les Hollandois y ont si bien pourvu, qu’ils sont dans l’univers les seuls maîtres de ce commerce.

Ils n’ont laissé subsister dans ces mêmes îles que très-peu de muscadiers sauvages, dont il a plû à quelques botanistes d’appeller le fruit noix muscade mâle. Bauhin nomme le muscadier sauvage, nux mosckata, fructu oblongo ; Pison, palamet-sird, seu nux moschata, mas dicta. Il est plus haut que le muscadier cultivé, moins rameux, & moins feuillu ; mais les feuilles sont plus grandes, longues d’un empan & demi, d’un verd foncé, d’un goût desagréable. Ses fruits sont plus gros, plus charnus, plus solides, plus fermes, donnant un macis sans suc, desséché, pâle, & de mauvais goût. Le noyau est couvert d’une coque dure, ligneuse, épaisse, d’une substance assez semblable à la vûe à celle de la muscade femelle, mais presque sans odeur, & d’un goût disgracieux. (D. J.)

MUSCARI, s. f. (Hist. nat. Bot.) genre de plante à fleur liliacée, monopétale, campaniforme, en grelot, & découpée en six parties. Il sort du fond de cette fleur un pistil qui devient un fruit ordinairement triangulaire. Ce fruit est divisé en trois loges, & rempli de semences le plus souvent arrondies. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez Plante.

M. de Tournefort compte dix-huit especes de ce genre de plante, dont on vient de lire les caracteres. Décrivons la principale, nommée par le même botaniste, muscari obsoletiore, flore, ex purpurâ virente.

Elle pousse de sa racine bulbeuse quelques feuilles répandues à terre, longues de six ou huit pouces, étroites, cannelées, assez épaisses, pleines de suc. Sa tête est sans feuilles, mais revêtue depuis sa moitié jusqu’au haut de fleurs en grelots, divisées en six segmens, de couleur d’abord purpurine, puis d’un verd blanchâtre ou d’un purpurin foncé, enfin noirâtre en se fanant. Leur odeur est agréable, aromatique, approchante de celle du musc. Il succede à ces fleurs des fruits assez gros, triangulaires, & divisés en trois loges remplies de quelques graines grosses comme des orobes, rondelettes, noires. La racine est vomitive, prise intérieurement.

Les curieux cultivent quelques especes de muscari, à cause de la beauté de leurs fleurs, & Miller vous indiquera l’art de cette culture. (D. J.)

MUSCAT, sorte d’excellent vin qui vient de Provence, de Languedoc, &c. Voyez Vin.

Ce mot, selon quelques-uns, vient de musk, parce que le vin muscat a quelque chose de l’odeur de ce parfum, à ce qu’on prétend. D’autres le font venir de musca, mouche, parce que ces insectes aiment extrèmement les grapes de raisins muscat ; comme les Latins avoient appellé leur vinum apianum, ab apibus, parce que les abeilles ou mouches à miel s’en nourrissoient.

Voici la maniere dont on fait le vin muscat à Frontignan : on laisse sécher à moitié les grappes sur le sep de vigne ; ensuite on les ceuille, où les foule & les presse, & on met dans un tonneau la liqueur qui en sort, sans la laisser travailler dans la cuve ; parce que la lie de ce vin contribue à sa bonté.

Muscat, vin (Diete.) espece de vin de liqueur très-parfumé. Voyez Vin.

Muscat, raisin (Diete.) Voyez Raisin.

MUSCERDA, (Mat. méd.) Voyez Fiente de souris, à l’article Souris, Mat. méd.

MUSCLE, s. m. musculus, en Anatomie, partie charnue & fibreuse du corps d’un animal, destinée à être l’organe ou l’instrument du mouvement. Voy. Mouvement.

Ce mot vient du grec μυσ, ou du latin mus, un rat, & c’est à cause de la ressemblance que les muscles paroissent avoir avec des rats écorchés. Le D. Douglat prétend qu’il vient de μυεν, fermer ou resserrer, parce que c’est la fonction propre du muscle.

Le muscle est un paquet de lames minces & paralleles, & se divise en un grand nombre de petits faisceaux ou petits muscles renfermés chacun dans sa membrane propre, & de la surface intérieure desquels partent une infinité de filamens transverses qui coupent le muscle en autant de petites aires distinctes, remplies chacunes par leurs petits faisceaux de fibres. Voyez nos Planches anat. & leur explic. Voyez aussi l’article Fibre.

Les muscles se divisent ordinairement en trois parties, la tête, la queue, & le ventre. La tête & la queue, qu’on appelle aussi tendons, sont les deux extrémités du muscle : la premiere est celle qui est attachée à la partie stable, & l’autre celle qui l’est à celle que le muscle doit faire mouvoir. Voyez Tendon.

Le ventre est le corps du muscle, c’est une partie épaisse & charnue, dans laquelle s’inserent des arteres & des nerfs, & d’où sortent des veines & des canaux lymphatiques.

Toutes ces parties d’un muscle, le ventre & les tendons, sont composés des mêmes fibres ; elles ne different, qu’en ce que les fibres des tendons sont plus serrées les unes contre les autres que celles du ventre, qui sont plus lâches ; ce qui fait qu’il s’y arrête ordinairement assez de sang pour les faire paroître rouges, au-lieu que les tendons sont blancs, parce qu’ils sont d’une texture assez serrée pour empêcher la partie rouge du sang d’y passer : ainsi la différence qu’il y a entre le ventre & les tendons paroît être à-peu-près la même que celle qu’il y a entre un écheveau de fil, & un cordon qu’on auroit formé de ces mêmes fils.

Tous les muscles n’agissent qu’autant que leur ventre s’enfle ou se gonfle, ce qui les racourcit assez pour tirer à eux, ou pour entraîner, suivant la direction de leurs fibres, les corps solides auxquels ils sont attachés. Tout ce qu’on peut donc demander sur le mouvement musculaire, c’est de déterminer la structure des muscles, & la cause de leur gonflement.

Chaque muscle simple est donc composé d’un ventre charnu, & de deux tendons ; mais il peut, outre cela, se diviser en d’autres de même nature, quoique moindres, & ceux-ci en d’autres encore plus petits, toujours de même nature que le plus grand ; & cette division peut être portée au-delà de tout ce qu’on sauroit imaginer, quoiqu’on doive penser qu’elle a ses bornes. Ces petits muscles, qui sont de même nature que le premier, doivent donc avoir aussi leur ventre & leurs tendons ; ce sont ce qu’on appelle des fibres musculaires, & c’est de l’assemblage, ou de l’union de plusieurs que sont composés les muscles proprement dits. Voyez Fibres.

Quelques auteurs croient que les fibres musculaires sont des prolongemens des arteres & des veines, ou les extrémités capillaires de ces vaisseaux anastomoses & entrelacés les uns avec les autres : que lorsque ces mêmes vaisseaux se gonflent, leurs extrémités s’approchent l’une de l’autre, ce qui fait que l’os auquel tient la partie du muscle qui doit se