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longues dents fort aiguës & courbées en-dedans ; le palais est charnu. Les yeux sont blancs & ronds. Il y a un petit trou de chaque côté au-devant des ouies qui sont brunes, formées d’une peau lisse, marquée de taches blanchâtres. La murene n’a qu’une très-petite nageoire qui s’étend le long du dos jusqu’à la queue à-peu-près comme dans le congre. Elle vit de chair, & elle se retire pendant le froid dans des trous de rochers ; ce qui fait que l’on n’en prend qu’en certain tems de l’année : on la pêche à l’hameçon. Les pêcheurs craignent sa morsure. Sa chair est molle, grasse & nourrissante comme celle de l’anguille, mais moins que celle du congre. On a donné le nom de myrus au mâle de la femelle, Rondelet, hist. des Poissons, part. I. liv. XIV. ch. iv. Voyez Poisson.

MURER, v. act. (Gram.) fermer d’un mur. On mure une ville, on mure une porte.

MURET, (Géog.) petite ville de France dans le haut Languedoc. Les anciens actes écrivent le nom de cette ville en françois Murel, & en latin Murellum. Pierre d’Arragon ayant pris le parti des Albigeois, & étant assisté des comtes de Toulouse, de Foix & de Comminges, assiégea cette place avec une armée formidable ; mais elle fut taillée en pieces dans une sortie que fit Simon de Montfort, & le roi d’Arragon lui-même y perdit la vie. Muret ne contient guere aujourd’hui qu’un millier d’habitans. Elle est sur la Garonne à 3 lieues au-dessus de Toulouse. Long. 19. 5. lat. 43. 30. (D. J.)

MUREX, (hist. nat. Conchyl.) coquillage dont le nom se rend souvent en françois par celui de rocher ; mais nous avons mieux aimé lui conserver son nom de murex. Obtinuit nomen muricis hæc concha ob figuram quæ reproesentat saxorum aspera ; eadem pariter voce exprimitur bellica clava ferreis aculeis horrida quam eximiè refert testa admodum crassa, tuberculisque horrida & aspera propè summitatem, à latere dextero fulcata & aurita ; de sorte que murex & tribulus signifient la même chose ; tribulus veut dire chausse-trape, cheval de frise, terme de fortification.

Le murex est une coquille univalve, garnie de pointes & de tubercules, avec un sommet chargé de piquans, quelquefois élevé, quelquefois applati ; la bouche toujours alongée, dentée, édentée ; la lèvre aîlée, garnie de doigts, repliée, déchirée ; le fût ridé, quelquefois uni.

Quoique le caractere générique des murex soit d’avoir la bouche oblongue, garnie de dents, & tout le corps couvert de pointes ou de boutons, avec une tête élevée, & une base alongée, on y remarque encore quatre caracteres spécifiques qui déterminent des especes essentielles dans ce genre : 1°. le murex qui n’a point de pointes, & qui a des aîles ; 2°. l’araignée qui a des pointes, des doigts ou crochets remarquables, & que plusieurs naturalistes appellent aporrhaïs ou lambis ; 3°. la troisieme espece ou les casques qui sont de vrais murex triangulaires : c’est ainsi que plusieurs auteurs les ont nommées ; la derniere est un murex tout cannelé, sans pointes ni aîles ni boutons, avec la tête plate : la bouche dentelée & oblongue du murex en détermine le genre.

A l’aspect de quelques casques, sur-tout de ceux dont la robe est unie, on leur refuseroit une affiliation avec les murex ; leur corps dénué de pointes, semble d’abord leur défendre l’entrée dans cette famille : mais l’on changera d’avis, si l’on examine leur bouche oblongue & garnie de dents, c’est le premier caractere des murex ; ensuite leur corps uni, coupé d’une excroissance saillante, & souvent d’un repli mince & très-sensible vers la bouche, dénote l’apparence de quelques tubercules. Enfin, dans les circonvolutions d’une tête peu éle-

vée, on voit la naissance de plusieurs pointes &

trois gros replis saillans interposés dans leur contour : en faut-il davantage pour être de vrai murex, à la vérité moins hérissés que les autres ?

Comme le mot de murex se prend pour toute couleur de pourpre, on en a fait un nom générique dont les pourpres ne sont qu’une espece ; de-là est venu la confusion des différens genres qui se trouvent dans la famille des buccins. Virgile dit :

Tyrioque ardebat murice lana,

parce que le suc de ce poisson servoit chez les anciens à teindre leurs robes de pourpre, & que ceux de Tyr y excelloient. Fabius Columna distingue le murex du pourpre & du buccin ; il est vrai que sa distinction est juste, mais il ne l’a pas faite avec son génie ordinaire. Il dit que la pourpre rapporte la belle couleur de pourpre ; que le murex est couvert de pointes & de tubercules ; & que le buccin se distingue par ses circonvolutions longues & lisses ; cependant 1°. il ne devoit pas ignorer que la couleur pourpre se tire également du murex comme de la pourpre, & même de quelques especes de buccins ; 2°. qu’il y a des murex qui ont très-peu de pointes & de tubercules ; 3°. que tous les buccins ne sont pas lisses. Si cet habile homme eût cherché d’autres caracteres plus essentiels, il eût peut-être prévenu les erreurs que son autorité a fait naître sur cette matiere.

Comme la famille des murex est d’une très-grande étendue, il est à propos d’en former des divisions prises des marques générales communes à un certain nombre d’especes. 1°. Quelques-uns sont tout garnis de tubercules & de pointes noires, éminentes & remarquables. 2°. D’autres sont unis, ayant la clavicule peu chargée de pointes, & le bec recourbé. 3°. Il y a des especes dont les levres sont garnies de doigts. 4°. On voit d’autres especes à levre aîlée & déchirée. 5°. Il y a même une espece unique de murex, dont la bouche va de droite à gauche. Les especes générales dont nous venons de parler, se trouvent dans les cabinets des curieux.

Ainsi, dans la premiere classe qui comprend les especes de murex garnis de pointes & de tubercules noirs, on connoît 1°. le murex à pointes émoussées & noires, avec le sommet applati ; 2°. le murex couleur de cendre, entouré de piquans noirs, avec une clavicule élevée ; 3°. le murex à pointes émoussées bleuâtres, avec un sommet applati ; 4°. le murex fauve, entouré de quatre rangs de pointes émoussées ; 5°. le murex blanchâtre, remarquable par deux rangs de pointes pliées ; 6°. le murex brun & le blanc, à trois rangs de pointes ; 7°. le murex jaune, à pointes rangées régulierement ; 8°. le murex blanchâtre, couvert de boutons jaunes, la bouche violette avec des dents des deux côtés ; 9°. le murex qu’on nomme hérisson blanc, à pointes noires & à bouche dentée ; 10°. le murex nomme le bois veiné ; 11°. le murex qu’on nomme la musique avec un fût ridé. 12°. Le murex qu’on appelle le pleinchant ; 13°. le murex dit le foudre, à fût ridé ; 14°. le murex barriolé, avec une clavicule élevée & raboteuse ; 15°. le murex ondé, avec un sommet élevé, raboteux & étagé ; 16°. le murex blanc, rayé, dont le sommet est garni de longues pointes ; 17°. le murex fauve, à côtes, raboteux de tous côtés & cannelé ; 18°. le murex plein de verrues, de stries, ombiliqué, avec un sommet rougeâtre.

Dans la seconde classe composée de murex unis, dont la clavicule est peu chargée de pointes, & le bec recourbé,, sont compris, 1°. le murex triangulaire ou le casque de Rondelet, à bouche dentée & à lèvre repliée ; 2°. le murex, dit le turban rouge, plein de boutons, dont les levres sont étendues des