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queue noire ; il plonge fréquemment, & demeure sous l’eau plus long-tems que les canards ; sa chair est aussi plus délicate & d’un goût plus exquis.

Morillon, les Lapidaires nomment ainsi des éméraudes brutes qu’on vend au marc. Il y a aussi des demi-morillons. Voyez Éméraudes.

MORINE, morina, s. f. (Hist. nat. Bot.) genre de plante à fleur monopétale, anomale, tubulée, en forme de masque, & divisée en deux levres, dont la supérieure est découpée en deux parties & l’inférieure en trois : le calice est aussi découpé en deux parties pour l’ordinaire. Le pistil qui sort du calice, est attaché comme un clou à la partie postérieure de la fleur & stérile. Le calice de la fleur est posé sur un jeune fruit qui est renfermé dans un autre calice comme dans un étui, & qui devient dans la suite une semence arrondie & anguleuse. Tournefort, Inst. rei herb. coroll. Voyez Plante.

Cette plante n’a pas été seulement décrite exactement par M. Tournefort ; elle fait dans le système de Linnæus un genre distinct, dont voici, selon cet illustre botaniste, les principaux caracteres. Le calice est double, & de deux sortes : l’un est l’enveloppe du fruit, & reste après que la fleur est tombée ; l’autre est l’enveloppe de la fleur même, qui est monopétale, tubulaire, légerement fendue en deux segmens subsistans après la fleur. Il n’y a point proprement de fruit ; la graine qui succede à chaque fleur est unique, arrondie, & entourée par le calice de la fleur.

M. de Tournefort trouva cette belle plante dans son voyage du levant, & lui donna le nom de M. Morin non-seulement parce qu’il étoit son ami mais parce que ce botaniste a eu l’honneur d’élever dans son jardin cette plante de graine, & qu’elle n’a pas réussi dans le jardin du roi.

La morine donc, morina orientalis, carlina folio, I. R. H. 48. a la racine plus grosse que le pouce, partagée en grosses fibres, brunes, gersées, peu chevelues. Sa tige s’éleve à deux ou trois piés de haut. Elle est ferme, droite, lisse, velue vers le sommet, rougeâtre, & noueuse. Il sort communément de chaque nœud trois feuilles assez semblables à celles de la carline, verd-gai, luisantes, découpées, ondées & garnies de piquans jaunâtres, fermes, durs, longs de 4 ou 5 lignes.

De l’aisselle des feuilles naissent des fleurs par étages & à double rang, longues d’un pouce & demi. Chaque fleur est un tuyau courbe, fort menu vers le bas, évasé en-haut, & divisé en deux levres & profondément échancrées. L’inférieure est découpée en trois parties aussi arrondies. L’ouverture du tuyau qui est entre ces deux levres, est toute découverte. Le filet du pistil qui est un peu plus long que les étamines, finit par un bouton verdâtre. Le calice est un tuyau long de deux lignes, fendue profondément en deux languettes arrondies, légerement cannelées ; c’est du fond de ce tuyau que sort la fleur.

On en trouve souvent de deux sortes sur le même pié ; les unes sont toutes blanches, les autres sont couleur de rose, tirant sur le purpurin avec les bords blanchâtres. Toutes ses fleurs ont l’odeur de celles du chevrefeuille, & portent sur un embryon de graine. (D. J.)

MORINGA, (Hist. nat. Botan.) arbre des Indes orientales qui ressemble au lentisque par sa grandeur & par ses feuilles. Cet arbre est noueux, & a fort peu de branches ; son bois est très-cassant. Ses fleurs sont d’une couleur verdâtre & brune, elles ont le goût d’un navet. Il produit un fruit de la grosseur d’une rave qui a un pié de longueur, il est blanc & moëlleux en-dedans, & renferme de petites semences vertes & âcres. Ce fruit se mange cuit. La racine de l’arbre est regardée comme un puissant contre-

poison dans les morsures des bêtes venimeuses, &

comme un remede dans les maladies contagieuses.

MORINIENS, morini, (Hist. anc.) peuple de l’ancienne Gaule belgique, qui habitoit du tems des Romains le pays des Cleves, de Juliers & de Gueldres.

MORION, (Hist. nat.) nom donné par Pline & d’autres anciens naturalistes à une pierre noire à l’extérieur, mais qui, tenue entre l’œil & le feu ou une flamme, paroissoit être transparente & d’un beau rouge. On l’appelloit aussi prammion. Il paroit que c’étoit un crystal ou fluor noir. (—)

Morions, s. m. pl. (Hist. anc.) personnages bossus, boiteux, contrefaits, tête pointue, à longues oreilles, & à physionomie ridicule, qu’on admettoit dans les festins, pour amuser les convives. Plus un morion étoit hideux, plus cherement il étoit acheté. Il y en a qui ont été payés jusqu’à 2000 sesterces.

Morion, armure de tête qui étoit autrefois en usage pour l’infanterie. Voyez Salade.

MORINS, Morini, (Géog. anc.) anciens peuples de la Gaule belgique, qui habitoient l’ancien diocese de Térouenne. Ils étoient divisés en plusieurs cantons, pagos, comme cela paroît par César même, l. IV. c. xxj. qui se trouvant dans le port Iccius pour faire équipper sa flotte, reçut des députés de quelques cantons des Morins, qui lui promirent obéissance, & n’en reçut point des autres.

Il seroit difficile d’établir combien la cité entiere des Morins renfermoit de pays. Il est néanmoins probable qu’elle comprenoit toute l’étendue des dioceses qui ont été formés de celui de Térouenne, savoir Boulogne, S. Omer & Ypres.

Le nom de Morini, comme celui des Amorici, dérive du celtique mor, qui signifie mer ; & il avoit été donné à ces peuples, à cause de leur situation sur le rivage de la mer.

Virgile, Ænéide l. VIII. v. 727. par une figure hardie, met les Morini au bout du monde.

Extremique hominum Morini, Rhenusque bieornis. Pline, l. XIX. c. j. adoucit l’expression, en difant qu’on les regardoit comme placés à l’extrémité de la terre, ultimique hominum existimati Morini. Pomponius-Mela, l. III. c. ij. parle plus juste ; il les dit les plus reculés de tous les peuples gaulois, ultimi Gallicarum gentium Morini. Ptolomée, l. II. c. ix. donne aux Morins la ville de Farnana, Térouenne, & un port nommé Gessoriacum, c’est Boulogne sur mer. Il met aussi dans leur pays l’embouchure du fleuve Tadula, & celle de la Meuse. (D. J.)

MORISONE, morisona, (Hist. nat. Bot.) genre de plante à fleur en rose, composée de quatre pétales disposés en rond ; il sort du calice un pistil, dont le sommet devient dans la suite un fruit rond, chacun couvert d’une écorce dure, & rempli de semences qui ont la forme d’un rein. Plumier, Nova plant. amer. gen. Voyez Plante.

MORISQUES ou LOS MORISCOS, (Géogr.) on appelloit ainsi les Maures qui étoient restés en Espagne après la ruine de l’empire qu’ils y avoient établi. Le roi Philippe III. a trouvé le moyen d’appauvrir ses états, & de les dépeupler à jamais en chassant tous les Morisques qui s’y trouverent en 1610. Il en sortit plus de 900 mille qui se retirerent en Afrique. On ne sauroit frapper de plus grands coups d’état en politique pour se ruiner sans ressource.

MORISTASGUS, (Mythol. Gaul.) le Moristasgus des Gaulois paroît avoir été une divinité locale des Senonois ; car un homme de ce nom étoit roi du pays dans le tems que César arriva dans les Gaules, & la royauté avoit été déja dans sa famille. Il y a donc bien de l’apparence que ce roi portoit le nom d’un dieu particulier du lieu, ou qu’il étoit lui-même cette divinité, après avoir été mis au nombre des