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che, & non à celle du métropolitain. Nilus Doxopatrius, écrivain du onzieme siecle, compte jusqu’à vingt-cinq évêques autocéphales de cette sorte sous le patriarchat de Jérusalem, & seize sous celui d’Antioche. Enfin la quatrieme espece est celle dont parle M. de Valois, dans ses notes sur le chap. 23 du V. liv. de l’Histoire ecclésiastique d’Eusebe : ces autocéphales étoient des évêques, qui n’ayant point de suffragans, ne reconnoissoient non plus ni métropolitain ni patriarche. Il en cite pour exemple l’évêque de Jérusalem, avant qu’il fût lui-même institué patriarche ; mais c’est une erreur, car il est constant qu’alors l’évêque de Jérusalem reconnoissoit pour métropolitain l’évêque de Cesarée, & pour patriarche celui d’Antioche. Bingham paroît douter & avec fondement, qu’il y ait eu des autocéphales de cette derniere espece, à moins, dit-il, que ce n’ait été quelque évêque établi seul & unique dans une province, dont il gouvernoit toutes les églises, sans suffragans, tel que le métropolitain de Tomes en Scythie ; & c’est peut-être le seul exemple qu’on en trouve dans l’Histoire ecclésiastique. Bingham. orig. ecclésiast. Liv. II. chap. xviij. S. 1. 2. 3. & 4. (G)

AUTOCHTONES, s. m. pl. (Hist. anc.) nom que les Grecs ont donné aux peuples qui se disoient originaires du pays qu’ils habitoient, & qui se vantoient de n’être point venus d’ailleurs. Ce mot est composé d’αὐτὸς, même, & de χθὼν, terre, comme qui diroit natifs de la terre même. Les Athéniens se glorifioient d’être de ce nombre. Les Romains ont rendu ce mot par celui d’indigenæ, c’est-à-dire, nés sur le lieu. (G)

AUTOGRAPHE, s. m. (Gramm.) Ce mot est composé de αὐτὸς, ipse, & de γράφω, scribo. L’autographe est donc un ouvrage écrit de la main de celui qui l’a composé, ab ipso autore scriptum. Comme si nous avions les épîtres de Ciceron en original. Ce mot est un terme dogmatique ; une personne du monde ne dira pas : J’ai vu chez M. le C. P. les autographes des lettres de Mde de Sévigné, au lieu de dire les originaux, les lettres mêmes écrites de la main de cette dame. (F)

AUTOMATE, s. m. (Méchaniq.) engin qui se meut de lui-même, ou machine qui porte en elle le principe de son mouvement.

Ce mot est grec αὐτόματον, & composé de αὐτὸς, ipse, & μάω, je suis excité ou prêt, ou bien de μάτην, facilement, d’où vient αὐτόματος, spontanée, volontaire. Tel étoit le pigeon volant d’Architas, dont Aulugelle fait mention au liv. X. ch. xij. des nuits attiques, supposé que ce pigeon volant ne soit point une fable.

Quelques auteurs mettent au rang des automates les instrumens de méchanique, mis en mouvement par des ressorts, des poids internes, &c. comme les horloges, les montres, &c. Voyez Joan. Bapt. Port. mag. nat. ch. xjx. Scaliger. subtil. 326. Voyez aussi Ressort, Pendule, Horloge, Montre, &c.

Le flûteur automate de M. de Vaucanson, membre de l’Académie royale des Sciences, le canard, & quelques autres machines du même auteur, sont au nombre des plus célebres ouvrages qu’on ait vûs en ce genre depuis fort long-tems.

Voyez à l’article Androide ce que c’est que le Flûteur.

L’auteur, encouragé par le succès, exposa en 1741 d’autres automates, qui ne furent pas moins bien reçûs. C’étoit :

1o. Un canard, dans lequel il représente le méchanisme des visceres destinés aux fonctions du boire, du manger, & de la digestion ; le jeu de toutes les parties nécessaires à ces actions, y est exactement imité : il allonge son cou pour aller prendre du grain dans la main, il l’avale, le digere, & le rend par les voies ordinaires tout digéré ; tous les gestes d’un canard qui avale avec précipitation, & qui redouble de

vîtesse dans le mouvement de son gosier, pour faire passer son manger jusques dans l’estomac, y sont copiés d’après nature : l’aliment y est digéré comme dans les vrais animaux, par dissolution ; & non par trituration ; la matiere digérée dans l’estomac est conduite par des tuyaux, comme dans l’animal par ses boyaux, jusqu’à l’anus, où il y a un sphincter qui en permet la sortie.

L’Auteur ne donne pas cette digestion pour une digestion parfaite, capable de faire du sang & des sucs nourriciers pour l’entretien de l’animal ; on auroit mauvaise grace de lui faire ce reproche. Il ne prétend qu’imiter la méchanique de cette action en trois choses, qui sont : 1o. d’avaler le grain ; 2o. de le macérer, cuire ou dissoudre ; 3o. de le faire sortir dans un changement sensible.

Il a cependant fallu des moyens pour les trois actions, & ces moyens mériteront peut-être quelque attention de la part de ceux qui demanderoient davantage. Il a fallu employer différens expédiens pour faire prendre le grain au canard artificiel, le lui faire aspirer jusques dans son estomac, & là dans un petit espace, construire un laboratoire chimique, pour en decomposer les principales parties intégrantes, & le faire sortir à volonté, par des circonvolutions de tuyaux, à une extrémité de son corps toute opposée.

On ne croit pas que les Anatomistes ayent rien à desirer sur la construction de ses aîles. On a imité os par os, toutes les éminences qu’ils appellent apophyses. Elles y sont régulierement observées, comme les différentes charnieres, les cavités, les courbes. Les trois os qui composent l’aîle, y sont très-distincts : le premier qui est l’humerus, a son mouvement de rotation en tout sens, avec l’os qui fait l’office d’omoplate ; le second qui est le cubitus de l’aîle, a son mouvement avec l’humerus par une charniere, que les Anatomistes appellent par ginglyme ; le troisieme qui est le radius, tourne dans une cavité de l’humerus, & est attaché par ses autres bouts aux petits os du bout de l’aîle, de même que dans l’animal.

Pour faire connoître que les mouvemens de ces aîles ne ressemblent point à ceux que l’on voit dans les grands chefs-d’œuvres du coq de l’horloge de Lyon & de Strasbourg, toute la méchanique du canard artificiel a été vûe à decouvert, le dessein de l’auteur étant plûtôt de démontrer, que de montrer simplement une machine.

On croit que les personnes attentives sentiront la difficulté qu’il y a eu de faire faire à cet automate tant de mouvemens différens ; comme lorsqu’il s’éleve sur ses pattes, & qu’il porte son cou à droite & à gauche. Ils connoîtront tous les changemens des différens points d’appui ; ils verront même que ce qui servoit de point d’appui à une partie mobile, devient à son tour mobile sur cette partie, qui devient fixe à son tour ; enfin ils decouvriront une infinité de combinaisons méchaniques.

Toute cette machine joue sans qu’on y touche, quand on l’a montée une fois.

On oublioit de dire, que l’animal boit, barbotte dans l’eau, croasse comme le canard naturel. Enfin l’auteur a tâché de lui faire faire tous les gestes d’après ceux de l’animal vivant, qu’il a considéré avec attention.

2o. Le second automate, est le joüeur de tambourin, planté tout droit sur son pié d’estal, habillé en berger danseur, qui joue une vingtaine d’airs, menuets, rigodons ou contre-danses.

On croiroit d’abord que les difficultés ont été moindres qu’au flûteur automate : mais sans vouloir élever l’un pour rabaisser l’autre, il faut faire réflexion qu’il s’agit de l’instrument le plus ingrat, & le plus faux

par lui-même ; qu’il a fallu faire articuler une flûte à