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certains rapports ou vûes de l’esprit, que l’article seul peut désigner, sans quoi le lecteur est exposé à se méprendre.

Je me contenterai de ce seul exemple. Ovide faisant la description des enchantemens qu’il imagine que Médée fit pour rajeûnir Eson, dit que Médée (Mét. liv. VII. v. 184.)

Tectis, nuda pedem, egreditur.

Et quelques vers plus bas (v. 189.) il ajoûte

Crinem irroravit aquis.

Les traducteurs instruits que les poëtes employent souvent un singulier pour un pluriel, figure dont ils avoient un exemple devant les yeux en crinem irroravit, elle arrosa ses cheveux ; ces traducteurs, dis-je, ont crû qu’en nuda pedem, pedem étoit aussi un singulier pour un pluriel ; & tous, hors M. l’abbé Banier, ont traduit nuda pedem, par ayant les piés nuds : ils devoient mettre, comme M. l’abbé Banier, ayant un pié nud ; car c’étoit une pratique superstitieuse de ces magiciennes, dans leurs vains & ridicules prestiges, d’avoir un pié chaussé & l’autre nud. Nuda pedem peut donc signifier ayant un pié nud, ou ayant les piés nuds ; & alors la langue, faute d’articles, manque de précision, & donne lieu aux méprises. Il est vrai que par le secours des adjectifs déterminatifs, le Latin peut suppléer au défaut des articles ; & c’est ce que Virgile a fait en une occasion pareille à celle dont parle Ovide : mais alors le Latin perd le prétendu avantage d’être plus serré & plus concis que le François.

Lorsque Didon eut eu recours aux enchantemens, elle avoit un pié nud, dit Virgile, . . . Unum exuta pedem vinclis . . . (IV. Æneid. v. 518,) & ce pié étoit le gauche, selon les commentateurs.

Je conviens qu’Ovide s’est énoncé d’une maniere plus serrée, nuda pedem : mais il a donné lieu à une méprise. Virgile a parlé comme il auroit fait s’il avoit écrit en François ; unum exuta pedem, ayant un pié nud ; il a évité l’équivoque par le secours de l’adjectif indicatif unum ; & ainsi il s’est exprimé avec plus de justesse qu’Ovide.

En un mot, la netteté & la précision sont les premieres qualités que le discours doit avoir : on ne parle que pour exciter dans l’esprit des autres une pensée précisément telle qu’on la conçoit ; or les langues qui ont des articles, ont un instrument de plus pour arriver à cette fin ; & j’ose assûrer qu’il y a dans les livres Latins bien des passages obscurs, qui ne sont tels que par le défaut d’articles ; défaut qui a souvent induit les auteurs à négliger les autres adjectifs démonstratifs, à cause de l’habitude où étoient ces auteurs d’énoncer les mots sans articles, & de laisser au lecteur à suppléer.

Je finis par une réflexion judicieuse du pere Buffier. (Gramm. n. 340.) Nous avons tiré nos éclaircissemens d’une Métaphysique, peut-être un peu subtile, mais très-réelle . . . . . C’est ainsi que les sciences se prêtent mutuellement leurs secours : si la Métaphysique contribue à démêler nettement des points essentiels à la Grammaire, celle-ci bien apprise, ne contribueroit peut-être pas moins à éclaircir les discours les plus métaphysiques. Voyez Adjectif, Adverbe, &c. (F)

Article, s. m. en termes de Commerce, signifie une petite partie ou division d’un compte, d’un mémoire, d’une facture, d’un inventaire, d’un livre journal, &c.

Un bon teneur de livres doit être exact à porter sur le grand livre au compte de chacun, soit en débit, soit en crédit, tous les articles qui sont écrits sur le livre journal, & ainsi du reste.

Article se dit aussi des clauses, conditions & conventions portées dans les sociétés, dans les marchés,

dans les traités, & des choses jugées par des arbitres.

Article se prend aussi pour les différens chefs portés par les ordonnances, les reglemens, les statuts des communautés, &c. particulierement quand on les cite. Ainsi l’on dit cela est conforme à tel article de l’ordonnance de 1673 ; à tel article du reglement des Teinturiers, &c. Savary, Dict. du Comm. tom. I. p. 738. (G)

Article, en Peinture, est un très-petit contour qu’on nomme aussi tems. On dit : ces articles ne sont pas assez prononcés. Outre ces contours, il y a un article ou un tems, &c.

Article signifie aussi, en Peinture comme en Anatomie, les jointures ou articulations des os du corps, comme les jointures des doigts, &c. (R)

Articles, en termes de Palais, sont les circonstances & particularités sur lesquelles une partie se propose d’en faire interroger une autre en justice : dans ce sens, on ne dit guere articles qu’avec faits ; comme interroger quelqu’un sur faits & articles ; donner copie des faits & articles, &c.

On appelle les articles tout simplement, les clauses & conventions qu’on est convenu de stipuler dans un contrat de mariage par les deux futurs conjoints, ou leurs parens ou tuteurs stipulans pour eux. (H)

ARTICULAIRE, adj. en Anatomie, se dit des parties relatives aux articulations. Voyez Articulation.

L’apophyse articulaire est une éminence qui sert de base à l’apohyse zygomatique de l’os des tempes. Voyez Temporal.

La cavité articulaire est une cavité située entre les apophyses styloïde & articulaire de l’os des tempes, qui reçoit le condyle de la mâchoire inférieure. Voy. Machoire.

Facettes articulaires, sont des parties des os qui servent à leur articulation avec d’autres. Voyez Facettes & Os.

Nerf articulaire. Voyez Axillaire. (L)

Articulaire, terme de Medecine ; c’est une épithete qu’on donne à une maladie qui afflige plus immédiatement les articulations ou les jointures.

La maladie articulaire, morbus articularis, est ce que les Grecs appellent ἀρθρῖτις, & nous goutte. Voy. Goutte. (N)

ARTICULATION, s. f. en Anatomie, c’est une jointure ou une connexion de deux os. Voy. Os.

Il y a différentes formes & différentes especes d’articulation, qui correspondent aux différentes sortes de mouvemens & d’actions. L’articulation qui a un mouvement notable & manifeste est appellée diarthrose. Voyez Diarthrose. Celle-ci se subdivise en énarthrose, arthrodie, & ginglyme. Voyez Enarthrose, Arthrodie, & Ginglyme.

L’articulation qui ne permet point de mouvement, est appellée synarthrose. Voyez Synarthrose. Elle se subdivise en suture, harmonie, & gomphose. Voyez Suture, Harmonie, &c. (L)

ARTICULÉ, adjectif & participe du verbe articuler.

Article, en termes d’Anatomie, signifie la jointure des os des animaux ; articulation, en général, signifie la jonction de deux corps, qui étant liés l’un à l’autre, peuvent être pliés sans se détacher. Ainsi les sons de la voix humaine sont des son différens, variés, mais liés entr’eux de telle sorte qu’ils forment des mots. On dit d’un homme qu’il articule bien, c’est à-dire, qu’il marque distinctement les syllabes & les mots. Les animaux n’articulent pas comme nous le son de leur voix. Il y a quelques oiseaux auxquels on apprend à articuler certains mots : tels sont le perroquet, la pie, le moineau, & quelques autres. Voyez Article. (F)