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A G

AGA, s. m. (Hist. mod.) dans le langage du Mogol, est un grand Seigneur ou un Commandant.

Les Turcs se servent de ce mot dans ce dernier sens ; ainsi chez eux l’Aga des Janissaires est le Colonel de cette troupe. Le Capi-Aga est le Capitaine de la porte du Serrail. Voyez Janissaire, Capi-Aga.

Ils donnent aussi quelquefois le titre d’Aga par politesse à des personnes de distinction, sans qu’elles ayent de charge ni de commandement. Mais aux personnes revêtues du titre d’Aga, par honneur & par respect pour leur dignité, on emploie le mot d’Agarat, terme pluriel, au lieu de celui d’Aga qui est singulier. Ainsi parmi nous, au lieu de vous, nous disons à certaines personnes votre Grandeur ; & au lieu de je, un Ministre ou Officier Général écrit nous, &c.

En quelques occasions, au lieu d’Aga, ils disent Agasi ou Agassi : ainsi ils appellent l’Aga ou Commandant général de la Cavalerie, Spahilar Agassi. Voyez Page, Oda, Spahi, &c.

Aga des Janissaires, Voyez Janissaire-Aga.

Aga des Spahis, Voyez Spahilar-Aga. (G)

AGACE, s. f. (Hist. nat.) oiseau plus connu sous le nom de Pie. Voyez Pie. (I)

* AGADES, (Géog.) Royaume & Ville de même nom, dans la Nigritie en Afrique. Long. 20. 15. lat. 19. 10.

* AGANIPPIDES, (Myt.) Les Muses furent ainsi surnommées de la fontaine Aganippe qui leur étoit consacrée.

AGANTE, (Marine.) terme qui n’est employé que par quelques Matelots pour prends. (Z)

AGAPES, s. f. termes de l’Hist. ecclesiast. Ce mot est tiré du Grec ἀγαπὴ, amour, & on l’employoit pour signifier ces repas de charité que faisoient entr’eux les premiers Chrétiens dans les Eglises, pour cimenter de plus en plus la concorde & l’union mutuelle des membres du même corps.

Dans les commencemens ces agapes se passoient sans désordre & sans scandale, au moins les en bannissoit-on séverement, comme il paroît par ce que S. Paul en écrivit aux Corinthiens. Epit. I. ch. xi. Les Payens qui n’en connoissoient ni la police ni la fin, en prirent occasion de faire aux premiers Fideles les reproches les plus odieux. Quelque peu fondés qu’ils fussent, les Pasteurs, pour en bannir toute ombre de licence, défendirent que le baiser de paix par où finissoit cette assemblée se donnât entre les personnes de sexe différent, ni qu’on dressât des lits dans les Eglises pour y manger plus commodément : mais divers autres abus engagerent insensiblement à supprimer les agapes. S. Ambroise & S. Augustin y travaillerent si efficacement, que dans l’Eglise de Milan l’usage en cessa entierement, & que dans celle d’Afrique il ne subsista plus qu’en faveur des Clercs, & pour exercer l’hospitalité envers les étrangers, comme il paroît par le troisieme Concile de Carthage. Thomass. Discip. de l’Eglise, part. IIIe ch. xlvii. n° i.

Quelques Critiques pensent, & avec raison, que c’est de ces agapes que parle S. Paul dans l’endroit que nous avons déjà cité. Ce qu’ils ajoûtent n’est pas moins vrai ; savoir, que la perception de l’Eucharistie ne se faisoit pas dans les agapes mêmes, mais immédiatement après, & qu’on les faisoit en mémoire de la derniere cene que Jesus-Christ célébra avec ses Apôtres, & dans laquelle il institua l’Eucharistie : mais depuis qu’on eut réglé qu’on recevroit ce Sacrement à jeun, les agapes précéderent la communion.

D’autres Ecrivains prétendent que ces agapes n’é-

toient point une commémoration de la derniere cene

de Jesus-Christ, mais une coûtume que les nouveaux Chrétiens avoient empruntée du paganisme. Mos vero ille, ut referunt, dit Sédulius sur le chap. xi. de la premiere Epit. aux Corinth. de gentili adhuc superstitione veniebat. Et S. Augustin rapporte que Fauste le Manichéen reprochoit aux Fideles qu’ils avoient converti les sacrifices des Payens en agapes : Christianos sacrificia Paganorum convertisse in agapas.

Mais outre que le témoignage de Fauste, ennemi des Catholiques, n’est pas d’un grand poids, son objection & celle de Sédulius ne sont d’aucune force, dès qu’on fait attention que les Juifs étoient dans l’usage de manger des victimes qu’ils immoloient au vrai Dieu, & qu’en ces occasions ils rassembloient leurs parens & leurs amis. Le Christianisme qui avoit pris naissance parmi eux, en prit cette coûtume, indifférente en elle-même, mais bonne & loüable par le motif qui la dirigeoit. Les premiers fideles d’abord en petit nombre, se considéroient comme une famille de freres, vivoient en commun : l’esprit de charité institua ces repas, où régnoit la tempérance : multipliés par la suite, ils voulurent conserver cet usage des premiers tems ; les abus s’y glisserent, & l’Eglise fut obligée de les interdire.

On trouve dans les Epitres de S. Grégoire le Grand que ce Pape permit aux Anglois nouvellement convertis de faire des festins sous des tentes ou des feuillages, au jour de la dédicace de leurs églises ou des fêtes des Martyrs, auprès des églises, mais non pas dans leur enceinte. On rencontre aussi quelques traces des agapes dans l’usage où sont plusieurs Eglises Cathédrales & Collégiales de faire, le Jeudi-saint, après le lavement des piés & celui des autels, une collation dans le Chapitre, le Vestiaire, & même dans l’Eglise. Tertull. orig. Clem. Alex. Minut. Felix. S. Aug. S. Chrysost. S. Greg. Ep. 71. L. IX. Baronius, ad ann. 57. 377. 384. Fleury, Hist. eccles. tome I. page 94. Liv. I.

AGAPETES, s. f. terme de l’Histoire ecclésiastique, c’étoient dans la primitive Eglise des Vierges qui vivoient en communauté, & qui servoient les Ecclésiastiques par pur motif de piété & de charité.

Ce mot signifie bien aimées, & comme le précédent il est dérivé du grec ἀγαπάω.

Dans la premiere ferveur de l’Eglise naissante, ces pieuses sociétés, loin d’avoir rien de criminel, étoient nécessaires à bien des égards. Car le petit nombre de Vierges, qui faisoient avec la Mere du Sauveur partie de l’Eglise, & dont la plûpart étoient parentes de Jesus-Christ ou de ses Apôtres, ont vécu en commun avec eux comme avec tous les autres fideles. Il en fut de même de celles que quelques Apôtres prirent avec eux en allant prêcher l’Évangile aux Nations ; outre qu’elles étoient probablement leurs proches parentes, & d’ailleurs d’un âge & d’une vertu hors de tout soupçon, ils ne les retinrent auprès de leurs personnes que pour le seul intérêt de l’Évangile, afin de pouvoir par leur moyen, comme dit Saint Clement d’Alexandrie, introduire la foi dans certaines maisons, dont l’accès n’étoit permis qu’aux femmes ; car on sait que chez les Grecs surtout, le gynecée ou appartement des femmes étoit séparé, & qu’elles avoient rarement communication avec les hommes du dehors. On peut dire la même chose des Vierges dont le pere étoit promu aux Ordres sacrés, comme des quatre filles de Saint Philippe Diacre, & de plusieurs autres : mais hors de ces cas privilégiés & de nécessité, il ne paroît pas que l’Eglise ait jamais souffert que des Vierges, sous quelque prétexte que ce fût, vécussent avec des Ecclésiastiques autres que leurs plus proches parens. On voit par ses plus anciens monumens qu’elle a toûjours interdit ces sortes de sociétés. Car Tertullien, dans