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alphabétique ; mais leur interprétation rythmique a donné lieu aux hypothèses les plus opposées et aux plus vives discussions. En dernière analyse, P. Wagner s’est rallié à une lecture rythmique, mais non mesurée, des neumes, dans laquelle, d’après les documents datant seulement des xie et xiie s., la virga iacens et le punctum sont l’un vis-à-vis de l’autre dans la même relation que la longue et la brève, et où les signes et sont d’une signification identique et valent la longue. Ce principe une fois admis, il devenait aisé d’assimiler les formes habituelles du chant grégorien aux rythmes classiques de la langue latine, spondée, ïambe, trochée, etc., que d’autres auteurs y trouvent aussi, mais d’après d’autres principes. Un auteur du xe s., en effet, indique un phénomène rythmique analogue, mais dans des pièces d’organum. (Voy. N. proportionnelle.) || N. noire (Voy. N. proportionnelle.) || N. proportionnelle. La nécessité de faire coïncider exactement les temps dans l’exécution de la musique à plusieurs parties obligea les musiciens à chercher, dès le commencement de l’art harmonique, un système d’écriture approprié. Il fallut donc imaginer des signes ou modifier les signes existants de façon à pouvoir exactement calculer leurs valeurs de durée. Déjà, aux ixe-xe s., on imagina la distinction indiquée. Cette recherche et les principes qui devaient y présider préoccupent davantage les théoriciens du xiie et du xiiie s. Le classement en modes parfaits et modes imparfaits est enseigné par le ive Anonyme de Coussemaker et par Jean de Garlande. La N. proportionnelle est codifiée peu à peu au cours du xiiie s., à mesure que se développait l’organum. Ce classement donne naissance à un système compliqué de ligatures (voy. ce mot).

Les valeurs figurées par unités sont de 4 sortes, la longue double , la longue , la brève et la semi-brève auxquelles correspondent des pauses équivalentes :

La complication de cette N. vient de ce que les figures de notes n’y prennent pas une valeur de durée intrinsèque, mais relative ; relative à la fois au mode rythmique du morceau, et par conséquent soit parfaite (ternaire), soit imparfaite (binaire) et en même temps relative à la situation de la note précédente. Par exemple, une longue précédant une autre longue ou une pause de longue est dite parfaite, soit ternaire ; une brève placée devant ou après une longue rend celle-ci imparfaite, soit binaire, etc. À mesure que se développe le système et que les progrès de la composition harmonique exigent aussi plus de complexité dans l’écriture, les combinaisons réciproques des signes de valeurs se compliquent, pour se subdiviser, se mélanger, et répondre à tous les besoins. Francon fut à Paris le grand codificateur de la N. proportionnelle, au troisième quart du xiiie s. Tout à la fin de ce siècle, une impulsion nouvelle est donnée à cette N. par le théoricien français Pierre de la Croix (Petrus de Cruce). Les combinaisons qu’il établit font varier de deux à sept le nombre des semi-brèves contenues dans une brève. Ces variantes sont commandées par le mouvement du morceau, chacune des trois « manières » comportant une base spéciale pour les proportions relatives des valeurs. Ces « manières » se nomment (chez Pierre le Viser) more longo, more mediocri, more lascivo. Pour se reconnaître dans ce dédale, on a recours à des signes accessoires de N. Aucune indication de mesure ne figure encore à la clef ; mais, dans le courant de la N., on remarque des notes pointées, ou des notes surmontées d’un petit cercle renfermant un point, qui est le signum rotundum, le signe de la perfection, c’est-à-dire de la division ternaire. Les inventions se multiplient, et Walter Odington († vers 1339) se plaint de ce qu’il y ait autant de nouvelles figures de notes que de copistes. Les théoriciens s’épuisent à dresser des tableaux chiffrés de toutes les combinaisons de valeurs. En Italie, d’après Marchetto de Padoue, on admet une variété qui va jusqu’à permettre la division de la brève en douze semi-brèves. Des lettres placées en tête des portées indiquent d’après laquelle des neuf « divisions » admises par les théoriciens se fait le partage des valeurs. Afin de répondre à l’enrichissement croissant de l’art contrepointique, on cherche à fixer de nouveaux types de notes. Dans la même période, naît en France l’Ars nova, ensemble de doctrines novatrices dans lequel Philippe de Vitry (mort évêque de Meaux) introduit une réforme complète de la N. proportionnelle, et invente les signes de mesures, mettant fin aux modes rythmiques. Désormais huit figures de notes simples, la