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ATHÈNES — ATHÉNOBIUS

marbre, tandis que, sur les métopes à fond rouge, on avait représenté en bas-reliefs la guerre des Amazones, les combats des Centaures et la guerre de Troie. Une autre frisé sous le péristyle, autour de la cella, représentait la fête des Panathénées. On y admire encore de jeunes Athéniens se préparant à la cavalcade sacrée, tandis que d’autres courent en avant sur leurs fières montures. C’est aux deux frontons surtout que Phidias avait voulu étaler la variété et la puissance de son génie. Dans le tympan tourné vers l’orient, il avait représenté la naissance de Minerve, et, dans celui qui regardait les Propylées, sa dispute avec Neptune pour le protectorat de l’Attique. Enfin dans la cella était la fameuse statue de la déesse, où le grand artiste avait essayé de sculpter, dans l’or et l’ivoire, le dernier mot de l’art (fig. 349). On comprend que Paul, voyant tout ce qu’un grand peuple avait mis d’empressement religieux, de dons naturels et de génie, au service du polythéisme le plus grossier, ait senti ce brisement de cœur, ce frémissement indigné de l’âme, cette immense pitié qu’inspire l’homme oublieux de sa propre destinée et rendant hommage à la plus dégradante erreur, quand il était fait pour glorifier la vérité.

Un peu plus au nord, dans trois sanctuaires rattachés l’un à l’autre sous le nom d’Érecthéion, on vénérait des souvenirs mythologiques se rapportant à l’origine d’Athènes. Minerve Poliade et Pandrose, fille de Cécrops, y avaient leurs prêtresses. Là se rendait périodiquement la procession fameuse des Panathénées, pour y offrir à la statue de Minerve tombée du ciel le péplum brodé par les jeunes Athéniennes. On peut dire que la roche tout entière de l’Acropole était remplie de sanctuaires idolâtriques, et, quand toute la plate-forme avait été envahie, on avait fouillé les flancs de la montagne ; et tout autour, dans des grottes artificielles, Pan, Apollon, Aglaure au nord, la Terre, Thémis, Vénus, les Nymphes et Esculape au sud, avaient leurs autels, leurs prêtres et leurs adorateurs. Sans doute, ainsi qu’il est dit au livre des Actes, xvii, 17, Paul allait à la synagogue se consoler d’un si douloureux spectacle, en louant, avec les rares Juifs et les prosélytes qui étaient à Athènes, le Dieu d’Israël. Là il essayait d’annoncer le Messie, que ce Dieu avait envoyé au monde ; mais ce cercle restreint du judaïsme ne suffisait plus à son zèle. Il se mit donc à chercher des auditeurs partout, dans l’Agora, Act., xvii, 17, 18, sous les portiques, dans les écoles des philosophes, au Lycée, au Cynosarge, à l’Académie, où les souvenirs de Platon devaient sourire à son âme en extase devant le divin idéal. Sa parole y fit impression, puisque les diverses sectes s’en émurent, et un jour on se saisit de l’étrange discoureur, qui fut amené à l’Aréopage, où il dut s’expliquer sur sa doctrine, nouvelle pour tous, et déraisonnable pour plusieurs.

Cette colline de Mars ou Aréopage, où il fut conduit, existe encore. C’est l’élévation rocheuse qui avoisine l’Acropole vers l’occident. Cf. Pausanias, I, xxviii, 5 ; Hérodote, viii, 52. On y monte par seize degrés taillés dans le roc, et conduisant à une plate-forme où trois bancs de pierre forment un rectangle ouvert du côté de l’escalier. Voir Aréopage, col. 941. Là Paul annonça le vrai Dieu, et, malgré un auditoire d’épicuriens qui ne voulait plus l’entendre parce qu’il prêchait la vie future, il put signifier aux faux dieux que l’heure était venue où ils allaient sortir de leurs temples, le Théséion qu’il avait à ses pieds vers le nord, l’Olympiéion vers le sud-est, le Parthénon sur sa tête. On eut beau sourire et lever la séance sans attendre la fin, sur le Pnyx qui s’élevait au midi, au delà de la route, avec ses grands souvenirs oratoires, Démosthène plaidant contre Philippe avait perdu sa cause ; sur l’Aréopage, Paul plaidant contre le paganisme gagna la sienne. Denys l’Aréopagite et une femme nommée Damaris ne furent que le prélude de plus nombreuses conquêtes. Act., xvii, 34. Avec le temps, le Dieu du Calvaire eut raison des dieux de l’Olympe. Une église dédiée à saint Denys, au pied même de l’Aréopage, a pris la place du sanctuaire des Euménides (fig. 350).

En dehors des anciens auteurs, qui sont la meilleure source sur la topographie d’Athènes, on peut consulter, parmi les modernes, les travaux de Kiepert et de Curtius, l’œuvre remarquable de C. Wachsmuth, Die Stadt Athen in Alterthum, in-8o, Leipzig, 1874 ; W. M. Leake, Topography of Athens, in-8o, Londres, 1821 ; 2e édit., 1841 ; Beulé, L’Acropole d’Athènes, 2 in-8o, Paris, 1854 ; G. F. Hertzberg, Athen, historisch-topographisch dargestelt, in-12, Halle, 1885.

E. Le Camus.

ATHÉNIEN (Ἀθηναῖος), habitant d’Athènes, capitale de l’Attique, en Grèce. — 1o Les Athéniens sont nommés pour la première fois, dans l’Écriture, II Mach., vi, 1, (leçon contestée ; voir Athénée) et ix, 15, dans le récit des derniers jours d’Antiochus IV Épiphane. Ce roi de Syrie, qui avait persécuté si cruellement les Juifs, frappé d’une maladie terrible, implora, mais en vain, la miséricorde de Dieu, lui promettant entre autres choses qu’il « égalerait les Juifs aux Athéniens », c’est-à-dire, probablement, qu’il leur accorderait l’autonomie et une indépendance semblable à celle dont jouissaient les Athéniens. Plusieurs commentateurs, tels que Grotius, Opera, Amsterdam, 1679, t. i, p. 776, et Calmet (Comment. sur les Mach., ix, 15, 1722, p. 351), surpris de trouver ici le nom des Athéniens, lisent « Antiochiens » au lieu d’Athéniens (comme ils le font II Mach., vi, 1, texte grec), parce que, disent-ils, Athènes n’obéissait point à Antiochus IV. Ils supposent que ce prince promettait de donner à tous les Juifs les droits et les privilèges des citoyens d’Antioche, qui jusque-là n’avaient été conférés qu’à quelques habitants de Jérusalem. II Mach., iv, 9 (et 19, texte grec, où Ἀντιοχεῖς signifie les habitants de Jérusalem qui avaient les droits des citoyens d’Antioche). Cette explication n’est pas impossible, mais rien n’empêche de conserver la leçon qu’on lit dans le texte actuel, et qui est confirmée par tous les manuscrits et les anciennes versions. On comprend d’autant plus facilement cette allusion au gouvernement d’Athènes, qu’Antiochus IV avait une grande prédilection pour cette ville (voir Antiochus IV, col. 694). Cf. Polybe, xxviii, 18, 3.

2o Les Athéniens sont nommés deux fois dans le Nouveau Testament. — 1o Saint Paul, dans son discours de l’Aréopage, s’adresse à eux en leur disant : Ἄνδρες Ἀθηναίοι, selon l’usage des orateurs de cette ville. Act., xvii, 22. — 2o Saint Luc, afin d’expliquer pourquoi les Athéniens désirent connaître quelle est la « doctrine nouvelle », καινὴ… διδαχή prêchée par saint Paul, fait cette réflexion : « Tous les Athéniens et les étrangers qui demeuraient [dans la ville] ne s’occupaient que de dire ou d’écouter quelque chose de nouveau (καινότερον). » Act., xvii, 21. (Le comparatif est employé pour signifier : Quelles sont les dernières nouvelles ?) Ce trait du caractère athénien est pris sur le vif ; Démosthène dit en s’adressant à ses compatriotes : « Nous nous demandons à l’agora : Que dit-on de nouveau (λέγεται τι καινόν) ? » Phil. i, Demosthenis quæ supersunt, édit. Reiske, Londres, 1832, t. i, p. 28. Théophraste, dans ses Caractères, viii, édit. Didot, p. 6, fait ainsi le portrait du nouvelliste athénien : « Que racontes-tu ?… As-tu du nouveau (ἔχεις περὶ τοῦδε εἰπεῖν καινόν) ? » Et continuant à interroger : « Ne dit-on rien de nouveau (μὴ λέγεται τι καινοτερόν) ? » Voir aussi Thucydide, iii, 38, 5, édit. Didot, p. 116 ; Plutarque, Moral., De curiosit., 8, édit. Didot, t. i, p. 628. Cf. Sénèque, Epist., l. xv, 2 (94), édit. Teubner, Opera, t. iii, p. 296.

F. Vigouroux.

ATHÉNOBIUS (Ἀθηνόβιος) officier d’Antiochus VII Sidètes, roi de Syrie. Il avait le titre d’« ami du roi ». I Mach., xv, 28. (Voir, sur ce titre, col. 705.) Antiochus, après avoir refusé les présents de Simon Machabée, grand prêtre des Juifs, envoya Athénobius à Jérusalem pour demander à Simon de lui rendre Joppé, Gazera et la citadelle de Jéru-