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ou Thalmudistes, qui outre cela reçoivent encore les Traditions & suivent le Thalmud. Ceux-ci sont encore divisés en deux : en Rabbanistes simples, qui expliquent l’Ecriture selon le sens naturel par la Grammaire, l’Histoire, ou la Tradition ; & en Cabalistes, qui pour y découvrir les sens caches & mystérieux que Dieu y a mis, se fervent de la cabale & des manières mystérieuses que nous avons expliquées. Si l’on en croit les Juifs, la cabale, comme la Loi, vient de Dieu & du mont Sinaï, & y fut donnée à Moïse, & par lui à tout le peuple de la manière que nous le disons ci-dessus, C’est une fable ; mais plusieurs Savans croient qu’elle étoit déjà trouvée du temps de J. C. & il s’est trouvé des visionnaires parmi les Juifs, qui ont dit que ce n’étoit que par les mystères de la cabale que J. C. avoir opéré ses miracles. Quelques Savans ont cru que Pythagore & Platon avoient appris des Juifs en Egypte l’art cabalistique, & ils ont cru en trouver des vestiges bien marqués dans leur philosophie. D’autres croient au contraire, que c’est la philosophie de Pythagore, & de Platon, qui a produit la cabale. Quoi qu’il en soit, il est certain que dans les premiers siècles de l’Eglise la plupart des hérétiques donnerent dans les vaines idées de la cabale. Les Gnostiques, les Valentiniens, les Basilidiens, y furent sur-tout plus attachés, comme on le peut voir dans S. Epiphane, est ce qui produisit l’ΑΒΡΑΞΑΣ, & tant de Talismans, dont il nous reste encore une grande quantité dans les cabinets des Antiquaires. On donne aussi le nom de cabale non-seulement à l’art, mais encore à chaque opération de cet art ; c’est-à-dire, à chaque interprétation particulière, faite selon les regles de cet art. C’est-là une cabale, ce n’est point une interprétation naturelle & littérale. R. Jacob-Ben Ascher, surnommé Baal Haaturim, est un compilateur de presque toutes les cabales inventées avant lui sur les cinq libres de Moïse.

Cabale, signifie aussi dans quelques Auteurs la connoissance des choses qui sont au-dessus de la lune, des corps célestes, de leurs influences. La cabale, en ce sens, est la même chose que l’Astrologie judiciaire, ou elle en fait partie.

Cabale, signifie figurément une société de personnes qui sont dans la même confidence, & dans les mêmes intérêts : mais il se prend ordinairement en mauvaise part. Coitio, fattio. Tous ces gens-là sont d’une même cabale. On le dit aussi des complots & des entreprises secrettes, des desseins qui se forment dans cette société de l’Etat, ou contre les particuliers. Clandestina coitio, conjuratio. On a fait une cabale pour décrier cette Tragédie, Former des cabales contre quelqu’un. Bouhours. Comme il étoit habile & homme de cabale, il ne manqua pas d’artifice pour le justifier. Bouch. A Rome, comme aujourd’hui, la cabale l’emportoit sur le mérite, & décidoit du sort des Ouvrages. Dac. Elle formoit incessamment des cabales qui divisoient toute la Cour. Mlle l’Héritier.

Cabale. Il veut dire encore, la troupe même de ceux qui sont de la cabale ; comme, c’est sa cabale. On a exilé toute la cabale. Acad. Fr.

Cabale, se dit aussi de quelques sociétés d’amis qui ont entr’eux une liaison plus étroite qu’avec d’autres sans avoir aucun mauvais dessein ; comme pour se divertir, pour étudier. Societas. Je crois qu’il vaudroit mieux donner un autre nom à une pareille société. Il me semble que le mot cabale se prend nécessairement en mauvaise part.

CABALER, v. n. Faire une cabale. Clandestinam societatem coire, facere, conjurare. Cette ville est remplie de gens qui cabalent contre l’Etat. Il se prend toujours en mauvaise part.

CABALEUR. s. m. Celui qui cabale, qui est du nombre de ceux qui cabalent, ou le promoteur de la cabale. Factiosus. Franc cabaleur, adroit, rusé, ardent, dangereux.

CABALEZET ou KABALEZET. s. m. est le nom d’une étoile fixe qui s’appelle autrement cœur du lion, Basilic, & Regulus. Voyez ces mots.

☞ CABALIG. Ville d’Asie, dans le Turquestan. long. 103, lat. 44.

CABALISTE. s. m. Celui qui fait la science de là Cabale. Savant dans la cabale des Juifs Occultæ Hebræorum disciplinæ peritus. Artis cabalisticæ studiosus, peritus, Cabalista, Cabalisticus. Les Rabbins sont grands Cabalistes. Vouloir guérir les Cabalistes par raison, c’est entreprendre l’impossible. Ce sont des visionnaires sérieux qu’on ne ramène guère. Savant, habile, docte, profond Cabaliste.

☞ On ne dit point cabaliste, mais cabaleur, en parlant de ceux qui font des cabales.

Cabaliste. Terme de commerce, qui est en usage à Toulouse, & dans toute la Province de Languedoc. C’est un marchand qui ne fait pas le commerce sous son nom, mais qui est intéressé dans le négoce d’un marchand en chef.

CABALISTIQUE. adj. Qui appartient à la cabale. Cabalisticus : l’art cabalistique : une interprétation cabalistique : les subtilités cabalistiques sont de pures visions & superstitions. Tâchez de vous rendre digne de recevoir les lumières cabalistiques. Abb. de Villars. Les puérilités de l’art cabalistique. P. Souc.

CABALLIN, INE. adj. Qui appartient à la fontaine des Muses ; sur le mont Helicon, dans la Béotie ; appelée en latin fons caballinus, du mot latin caballus. On sait que le cheval Pégase d’un coup de pied fit paroître cette fontaine : c’est pourquoi les Grecs la nommoient hipocrène, fons equi, la fontaine du cheval.

CABAN. s. m. Vieux mot. Manteau pour se garantir de la pluie, avec des manches, qu’on porte à cheval. Penula. Ménage le fait venir de cappa, cappe, C’est aussi parmi les Matelots de Provence un habillement en temps de pluie avec des manches, & un capuchon. Il a la même signification que Capot. Cucullus nauticus. Caban est fait de Cappanum ; formé de cappa. Les Espagnols & les Italiens chez qui le gaban, ou gabbano, est encore en usage, entendent par ces mots, une sorte de casaque fort longue qu’ils portent buvette. Remarques sur la Satyre Ménippée.

CABANE. s. f. Maisonette, bâtie ordinairement de bauge & couverte de chaume. Casula. Les Solitaires méprisoient le séjour des villes, pour aller dans les déserts habiter des cabanes. Du Pin. Malherbe a dit en parlant de la mort :

Le pauvre en sa cabane où le chaume le couvre,
Et sujet à ses loix ;
Et la garde qui veille aux barrières du Louvre,
N’en défend pas nos Rois.

On appelle cabane de Berger, une manière de petite chambre faite de planches, que l’on fait aller d’un lieu à l’autre, par le moyen de quatre roulettes qui la soutiennent.

Cabane. Terme d’Oiselier. Espèce de petite loge où l’on ne voit le jour que par un endroit, & où l’on fait nicher des oiseaux. Il y en a aussi de très-éclairées, où l’on fait couver des oiseaux.

Ce mot vient de l’Italien capanna, qui signifie petite maison de chaume, qui a été fait du grec καπανα, signifiant crèche. Ménage. Isidore dit que le mot de capanna vient ex eo quod unum tantùm hominem capiat. Les Espagnols disent aussi cabana.

Cabanes, en termes de Marine, sont de petits logemens de planches pour coucher les Pilotes, & autres Officiers de Marine, qui sont fort étroits & en forme d’armoires, pratiqués en divers endroits du château de poupe, ou le long des côtés du vaisseau.

Les Bateliers appellent aussi cabane, un bateau couvert d’une toile que l’on nomme banne, soutenue sur des cerceaux pliés en forme d’arc, pour garantir les passagers du soleil ou de la pluie.

Cabane, est aussi un bateau à fond plat, & cou-