Page:Dictionnaire de Trévoux, 1771, I.djvu/965

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
941
BOI

BOIE. s. f. Espèce de revêche qui se fabrique par les Sayetiers drappans d’Amiens. Il y en a de trois longueurs : les larges qui ont trois quartiers de large sur vingt aunes & demie de long. Les moyennes qui ont moins de trois quartiers sur la même longueur, & les petites que demi-aune sur vingt aunes de long.

BOÏEN, ENNE. s. m. & f. Prononcez Boyen. Anciens peuples de la Gaule celtique. Boius. M. de Marca, dans son Hist. de Bearn, les appelle aussi Boiates. On trouve dans César des Vocates, ou Voïates parmi les peuples de l’Aquitaine, ou Gascogne. Les Boïens occupoient le pays de Buchs, où est le bourg appelé vulgairement Tête de Buchs. Ce bourg de Buchs étoit anciennement l’une des douze cités d ela Novempopulanie, appelée dans les Notices la cité des Boïates, autrement Boïens. De Marca. Cordemoy suit ce sentiment, Tom. I, p. 9. Voyez encore le Marca Hispan. L. I, c. 14, §. 3. Scaliger & vinet estiment que les Boïens avoient leur étendue depuis le pays de Buchs jusqu’à Baïonne, & que cette ville étoit leur cité, mais le pays de la cité d’Acqs s’oppose à cette conjecture ; car une partie de ce pays est située entre Baïonne & le pays de Buchs. De Marca. D’autres prétendent que les Boïens habitoient la contrée que l’on appelle à présent Médoc. C’est le sentiment qu’ont embrassé Maty & M. Corneille. Quoiqu’il en soit, une partie de ces Boiens se joignit à Segovèse, passa le Rhin sous sa conduite, & s’établit, partie en Bohème, comme nous avons dit au mot Bohème, chassé à leur tour par les Marcomans, se retirerent en Bavière. Ceux d’Italie, au commencement du gouvernement de César, se joignirent aux Helvétiens, c’est-à-dire, aux Suisses, pour entrer en Gaule. César les défit, & obligea les Helvétiens de retourner chez eux. Pour les Boiens, les Héduens demanderent au Général Romain, qu’il leur permît de se mettre dans leur voisinage ; il y consentit, & leur assigna une partie du Bourbonnois d’aujourd’hui, & la partie de l’Auvergne qui est entre la Loire & l’Allier. V. César, Comment. Liv. I, c. 28, & M. de Valois dans sa Notice des Gaules, au mot Boii, & p. 326, où il dit qu’on les nomme encore aujourd’hui Buics, & leur pays le pays de Buchs. De Vigenere a dit Boies au lieu de Boiens. Favin croit au contraire que ce sont les Bourbonnois qui ont peuplé le pays de Buchs, ou Baïonne, Hist. de Nav. p. 63, mais sans fondement.

BOJITES. s. m. pl. Bojitæ, Nom d’une famille Persanne, sortie de Bojas, que l’on disoit descendre de Darius Histaspides, & des anciens Rois de Perse. Les Bojites ont délivré leur patrie de la domination des Calipes. Alis, fils de Bojas, fut le premier Bojite qui monta sur le trône vers l’année 928 de J. C. Melecva fut le dernier Bojite qui occupa le trône. Les Selgiucides, turcs d’origine, leur succederent en 1055. Ainsi la domination des Bojites dura 127 ans. Voyez Horn. Orb. Imp. Joachim Feller, dans ses Notes sur Hornius, dit que les Bojites s’appellent aussi Pujans, Pujani.

☞ BOINITZ. Ville de la haute Hongrie, au Comté de Zoll, assez près de Privitz.

BOJOBI. s. m. C’est un serpent du Brésil, que les Portugais appellent Cobre verde. Il est long d’environ une aune, & gros comme le pouce, de couleur porracée, luisante. Sa gueule est grande & sa langue noire. Sa morsure est très-venimeuse. Les remèdes dont les Médecins Indiens se servent le plus contre sa morsure, est de faire avaler au malade, dans de l’eau, de la racine pilée d’une herbe qu’ils appellent Coapia. Dict. De James.

BOIRE. v. act. Avaler quelque liquer pour étancher sa soif, pour se rafraîchir, pour se purger, ou pour le simple plaisir. Bibere. Ainsi on dit, boire à sa soif ; ne boire que quand on en a effectivement besoin. Boire frais, boire à la glace, boire pour se raffraîchir. Boire, avaler une médecine. Boire à l’allemande. Boire à tire larigot. Voyez Larigot. Boire d’autant. Boire copieusement. Boire tout pur. Boire comme un trou. Boire à longs traits, des rasades, des rouges bords ; pour dire, boire en débauché, & pour s’enivrer. Il y a des animaux qui sont long-temps sans boire, comme le chameau. L’Auteur de l’Histoire des Antilles, assure que les cochons des Caraïbes boivent peu, ou point du tout ; que les chèvres ne boivent qu’une fois la semaine ; les civette qu’une fois le mois; & que les vaches sont six mois sans boire. Montague dit dans ses Essais, Liv. III, ch. 13, qu’un Gentilhomme de sa connoissance avoit fait le trajet de Madrid à Lisbonne en été, sans boire. Les Chinois tiennent pour un grand régal de boire chaud : & leur boisson qui est le thé, & le vin de ris, est toujours sur le feu dans quelque vaisseau proche la table.

On dit absolument dans ce sens, qu’un homme est sujet à boire, ou qu’il boit ; pour dire, qu’il est sujet à s’enivrer : & qu’il boit bien, pour dire, qu’il porte bien son vin : qu’il boit sec, qu’il boit jusqu’à la dernière goutte. Charlemagne, Liv. III, ch. 33 de ses Ordonn. fait défense aux soldats de boire les uns aux autres, à cause des querelles qui naissent de la débauche. Boire à la santé, est une cérémonie de buveur, qui se fait en saluant quelqu’un, lorsqu’on veut boire pour lui faire honneur : & porter une santé, inviter un autre d’en faire autant. Propinare alicui. On trouve dans une gazette : les santés de leurs Majestés furent bues & répondues. Boire à la ronde, c’est boire la santé de toute la compagnie l’un après l’autre. Boire les inclinations, c’est recommencer à boire les santés des mêmes personnes. Crier le Roi boit, cérémonie qui est en usage dans toute l’Europe, ☞ cri de réjouissance parmi ceux qui mangent ensemble le jour des Rois, après avoir fait un Roi d ela fève. On crie le Roi boit, la Reine boit, toutes les fois que le Roi ou la Reine de la fève boivent.

Boire ensemble, est aussi un témoignage d’amitié, qui se fait en se donnant l’un à l’autre quelque repas. Compotare. Il l’est aussi de réconciliation : car quand on veut raccommoder des gens brouillés, on dit qu’on les fera boire ensemble. Dès le dixième siècle boire ensemble, étoit en Bretagne une clause des contrats & des traités entre particuliers. Lobineau.

Boire le vin du marché, est aussi une coutume pratiquée parmi le peuple, & sur-tout à la campagne, de ne faire aucun marché sans aller boire ensuite en signe de bonne foi & de réjouissance : & on dit aussi des petits présens qu’on donne aux valets & aux artisans qui ont rendu quelque service, que c’est pour boire, pour se réjouir. Boire bouteille, ou vider bouteille. Voyez Bouteille.

Boire à la régalade ou au galet, c’est verser une liqueur dans la bouche, la tête étant renversée. voyez M. Petit, Mem de l’Acad. des Sc. 1715. Les Indiens boivent à la régalade.

On dit aussi, principalement en Poësie, ceux qui boivent le Gange, le Thermodon ; pour dire, les peuples qui habitent sur les rives de ces fleuves.

On dit de même, que la terre boit, que le papier boit ; & de toutes les autres matières seches & spongieuses, qu’elles boivent, quand elles sont pénétrées de quelque liqueur. Anacréon dit plaisamment, dans sa dix-neuvième ode, la terre boit, les plantes boivent la terre, c’est-à-dire, la suçent, la mer boit l’air, le Soleil boit la mer, la lune boit le soleil ; pourquoi, compagnons, voulez-vous dont m’empêcher de boire ? On dit en Chimie, que les alcalis boivent les acides ; pour dire, qu’ils s’en imbibent, & qu’ils entrent l’un dans l’autre pour faire un corps nouveau.

Boire le calice, se dit aussi figurément, pour dire, souffrir avec patience quelque infortune qu’on ne peut éviter ; faire quelque chose par une force majeure. Haurire calicem. En ce même sens on dit, boire un affront, une injure. Il fallut boire la raillerie, de peur de l’accroître en la défendant. Ablanc. Malheureux que je suis, faut-il que je boive cet affront ? Mol. Le supporter, sans marquer de ressentiment.

☞ On dit poëtiquement, boire le nectar, être assis à la table des Dieux. Boire le Styx, le Cocyte, être mort. Ce verbe est aussi employé dans un sens moral, mais en poësie seulement.

O toi, qui libre enfin d’une pénible course,
Possède du vrai bien l’inépuisable source,