Page:Dictionnaire de Trévoux, 1771, I.djvu/954

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
930
BLE

quoiqu’il ait de quoi vivre dans l’abondance. On dit d’une marchandise d’un sûr & prompt débit, que c’est du blé en grenier. On dit aussi être pris comme dans un blé ; pour dire, être surpris sans défense & sans armes. On dit aussi, manger son blé en vert ; pour dire, manger son revenu avant que les termes en soient échus.

BLECHE. adj. On dit blêche pour blaque ; c’est ainsi qu’on appeloit autrefois les Valaques. Froissard dit que les Valaques sont de fort mauvaises gens. Huet.

C’est encore une terme d’injure du style familier, qui signifie un homme mou, timide, qui n’a pas la force de tenir les paroles qu’il donne. C’est un homme bien blêche ; & substantivement, c’est un blêche, un vrai blêche.

BLÉER. v. a. Il signifie ensemencer une terre en blé. On se sert plus communément du mot emblaver ; mais dans quelques pays on dit bléer. On disoit autrefois bléerie, pour dire des blés sur pied.

☞ BLEIDENSTADT, ou BLEIDERSTADT. Petite ville d’Allemagne, en Wétéravie, dans la Principauté de Dietz, à la source de la rivière d’Aar.

BLEIME. s. f. Terme de Manège. Maladie du cheval, inflammation de la partie intérieure du sabot vers le talon, entre la sole & le petit pied. La cause de ce mal est un sang meurtri qui s’y est amassé.

☞ BLEKING (le) ou la BLEKINGIE, Province de Suède, dans la partie méridionale, entre la Gothie, la mer Baltique, & la France.

BLÊME, adj. m. & f. Décoloré, pâle. Pallidus, pallens, décolor. Il ne se dit que du visage. Quand on lui fit ce reproche, il devint blême.

Plus défait & plus blême,
Que n’est un Pénitent sur la fin du carême. Boil.

La disette au tein blême, & la triste famine. Id.

BLÊMIR. v. n. Pâlir, changer de visage par l’émotion de quelque passion violente, de colère, de honte, de douleur. Pallescere, exalbescere. Quand on a annoncé à cette veuve la mort de son fils, elle a blêmi, & s’est pâmée. Il blêmit à la vûe du moindre péril. C’est un fort bon Acteur, il blêmit, il rougit quand il veut. Je blêmis toujours en commençant mes harangues.

BlÊMISSEMENT. s. m. Pâleur. Pallor. Ce mot n’est pas reçu ; c’est dommage.

BLEMYES, ou BLEMMYES. s. m. pl. Blemyes, Blemiæ, Blenæ, Bleptæ. Peuple de l’Ethiopie, que l’on a cru être sans tête, & avoir les yeux & la bouche à la poitrine. Ils furent ainsi nommés d’un nom du Roi d’Ethiopie appelé Blemys. Quelques Auteurs disent que l’origine de la fable vint de ce qu’ils s’enfonçoient la tête entre les épaules, qu’ils élevoient beaucoup. Bochart, dans son Phaleg, Liv. IV, ch. 29, en rapporte une autre raison. Il dit que Blemyes vient de בלי, qui en hébreu signifie négation, privation, & de טום, qu’il interprète cerveau, quoiqu’il n’y ait que les Rabbins qui y donnent ce sens, & que dans l’Écriture, il signifie moelle ; de sorte que selon lui, Blemyes a été pris pour sans cerveau, sans tête, & c’est ce qui a donné lieu à la fable. Florus, Lieutenant de l’Empereur Marcien, dompta les Blemyes, l’an de J. C. 450.

M. Godeau, Hist. de l’Egl. T. III. p. 240, & M. l’Abbé Fleury, Liv. XXXII, p. 324, les appellent Blemmyens & les Nobates tributaires des Romains, adoroient entre autres Dieux, Isis, Osiris, & Priape, & les Blemmyens sacrifioient des hommes au Soleil. Fleur. Le premier se trompe quand il dit que ce sont des peuples d’Égypte.

☞ BLENDE. s. f. Mot allemand, employé dans les mines, pour désigner un minéral qui se trouve dans la mine de plomb, qui n’est bon à rien. Pseudo galena, inanis galena, mica : ou, selon d’autres, une mine morte, matière ordinairement talqueuse, de couleur de plomb, & très-difficile à la fonte. On l’appelle Sterile nitidum. Il y en a de différentes espèces & couleurs.

☞ BLENEAU. Blenavium. Petite ville de l’Orléannois, sur le Loin, Election de Gien.

BLENNUS. s. m. Poisson qu’on pêche dans les eaux bourbeuses, qui n’est pas bon à manger, ce qui est indiqué par son nom, qui revient à muqueux. Il est fade, insipide, excrémentiel. Aldrovandi en donne la description. Βλέννος, ou comme Suidas écrit, Βαιὼν.

BLEPHAROXYSTE. s. m. Blepharoxystum. Instrument de Chirurgie, pour la scarification des paupières. De Βλέφαρον, paupière, & de ξυω, scarifier. On a plusieurs instrumens pour la scarification des paupières. Il semble qu’Hippocrate se servoit en pareil cas d’un chardon, ou de quelque plante épineuse. D’autres anciens Médecins inventerent un instrument de fer ou d’acier, à peu près semblable à une rape fine, de la forme d’une cuiller. Voyez en la figure dans le Dictionnaire de James.

BLÉQUE. adj. Mot normand. Poire bléque, pomme bléque, c’est-à-dire, plus que molle. Mén.

☞ BLERÉ. Blera. Petite ville de France, en Tourraine, sur le Cher.

BLEREAU. Voyez Blaireau.

BLEREUX. s. m. Animal sauvage. Mœles, mœlis.

BLESCHE. Voyez Bleche.

BLEMSE. Voyez Blême.

BLESMIR. Voyez Blêmir.

BLESMISSEMENT. Voyez Blêmissement.

BLESSER. v. a. ☞ Causer de la douleur à quelqu’un en le serrant, soit qu’il en résulte une plaie, soit qu’il n’en résulte point. Vulnerare, fauciare. Les couprs orbes blessent en faisant des contusions. Les instrumens tranchans blessent en faisant des plaies. Les souliers trop serrés blessent les pieds. Une selle dure blesse un cheval. Urere. ☞ Lorsqu’en parlant de guerre, de combat, on dit que quelqu’un a été blessé, on entend toujours parler d’un coup qui a fait une plaie.

Ménage dérive ce mot de læsare latin, en y ajoutant un b.

Blesser, se dit en parlant de navire & de galère, & signifie, endommager. Detrimentum afferre. La Réale rencontra l’éperon d’une des galères, dont elle fut blessée. Vaug.

Blesser, se dit avec le pronom personnel, quand on se fait mal, soit en tombant, soit par megarde, soit volontairement. Offendere partem corporis aliquam. Je me suis blessé par mégarde. On dit aussi qu’une femme grosse, qu’elle s’est blessée ; pour dire, que quelque chûte, ou quelqu’autre accident, l’a fait accoucher avant terme. Abortum facere.

Blesser, signifie par extension, choquer, toucher trop fortement ce qui est délicat, faire une impression fâcheuse & désagréable. Offendere. Les couleurs trop vives blessent la vue. Une dissonance blesse l’oreille.

☞ On le dit de même au figuré. Des paroles deshonnêtes blessent la pudeur, sont contraires à la pudeur. Cette affreux récit blesse l’imagination, porte une impression désagréable dans l’imagination.

Blesser, se dit figurément en matière d’amour. Cet amant a le cœur blessé, les beaux yeux de cette Dame l’ont blessé ; on fait une violente impression sur son cœur.

Blesser, signifie encore au figuré, nuire à quelque chose, y donner atteinte, y faire brêche : choquer quelqu’un, l’offenser par quelque discours. Ces faits que vous vez avoués, blessent votre cause, donnent atteinte à votre droit. Il ne faut rien dire qui puisse blesser la réputation du prochain. Les railleries trop fortes blessent l’amitié : il y en a d’innocentes qui ne blessent personne.

C’est à vous, s’il vous plaît, que ce discours s’adresse,
A moi, Monsieur ! A vous, trouvez-vous qu’il vous blesse ?

Molière
.

Blesser, signifie encore, porter dommage. Detrimentum afferre, inferre. Cette sentence me blesse en ce chef ; elle me fait un préjudice notable.

On dit proverbialement, qu’on ne sait pas où le soulier nous blesse, où le bât nous blesse, quand on ne fait pas le déplaisir secret que nous avons dans l’ame. On