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LES SAUVAGES DE SAINT-CASTIN

à Québec, Robineau de Villebon, fils du baron de Portneuf seigneur de Bécancour, et de Marie-Anne Le Neuf de la Potherie, sœur du La Vallière qui avait précédé Perrot au gouvernement de l’Acadie.

Villebon avait servi pendant dix années dans l’armée française. On le nommait comme à regret (un Canadien !) « en attendant que Sa Majesté ait pourvu autrement au commandement de l’Acadie ». À vrai dire, il avait intrigué pour obtenir le poste et réussi grâce à des promesses mirifiques, qu’on lui rappela souvent par la suite 5.

Il arrivait de La Rochelle avec un renfort de 15 soldats, le 11 juin 1690, justement comme le vainqueur Phipps se retirait de Port-Royal. Il échappa de justesse à l’escadre ennemie 6. La transmission des pouvoirs se serait faite entre deux prisonniers, l’ancien et le nouveau gouverneurs, ce qui n’aurait pas manqué de pittoresque. Mais les historiens ont perdu ce beau thème.

Villebon se rendit à Québec, d’où, à bord de l’Union, il gagna la rivière Saint-Jean. Les vents ayant immobilisé le navire à l’embouchure de ce cours d’eau, le gouverneur monta à Jemseck en canot. Deux forbans anglais de l’île Marie-Galante s’emparèrent alors de l’Union, et de Perrot qui faisait la traite sur les côtes. Villebon réunit les sauvages et les exhorta à la guerre contre les Anglais, leur promettant, de la part du roi, un bon dédommagement.

Après quoi, il repassa en France afin d’exposer au ministre Pontchartrain la nécessité de reprendre l’Acadie.

Port-Royal détruit, écrivait-il en février 1691, postons-nous sur la rivière Saint-Jean le plus près possible des sauvages nos alliés « pour estre en estât de les secourir de munitions, les assister de conseils, leur faire connoistre la protection que le Roy leur donne et se mettre à leur teste pour les partis que l’on formeroit sur les habitans de la Nouvelle-Angleterre ». Ménageons-les, ajoutait-il ; envoyons « une personne qui connoisse la manière de ces sauvages et soit capable de les commander ». On épargnerait ainsi les frais d’une garnison. Les indigènes étaient du reste plus utiles que les soldats peu au courant des choses d’Amérique. Il fallait attirer dans la région cinq ou six gentilshommes du pays « que l’on met-