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LA GUERRE DE SAINT-CASTIN

et d’avertissements il continuait son commerce défendu avec les Anglais, le roi lui ferait ressentir son indignation » ?

Jean-Vincent se vengea spirituellement de Perrot s’arrangeant pour lui faire acheter deux navires sur lesquels aucun homme de mer acadien ne voulait embarquer. Perrot embaucha des pêcheurs anglais, qui lui volèrent une bonne partie de la pêche. En désespoir de cause, il rendit les bateaux au vendeur, avec, en guise de dédommagement, le reste du poisson.


Des préoccupations d’un autre ordre jetaient bientôt dans l’ombre ces mesquines querelles. La lutte pour la possession de Pentagoët et de l’Acadie entière devenait sérieuse et Saint-Castin allait y jouer le rôle d’arbitre.

Les Anglais employèrent tous les moyens, la diplomatie comme la guerre, pour venir à bout de cet homme. Comme il entretenait forcément des relations commerciales avec eux en temps de paix, ils voulurent l’attirer de leur côté. La tactique n’avait-elle pas réussi avec Latour, qui avait accepté un titre de l’Angleterre ? Seulement, Saint-Castin n’était pas de même trempe.

Ils lui firent des ouvertures. La Barre, gouverneur de la Nouvelle-France, écrivait du camp de Lachine le 25 juillet 1684, à son collègue Dongan de Boston, qu’il avait vu une lettre, en date du 3 août 1683, dans laquelle le Bostonnais engageait M. de Saint-Castin, « qui commande pour le Roi mon maître à Pentagouët », à se ranger du côté des Anglais 4.

Saint-Castin, à vrai dire, ne commandait pas au nom du roi de France, mais la lettre de La Barre dénotait, chez les Français aussi, le désir de se l’attacher.

Les Anglais ne se tinrent pas pour battus. Menneval écrivait en 1688 : « Le sieur de Saint-Castin… est demeuré habitué à Pentagoët refusant toujours de reconnoitre les Anglois quoi qu’il ait plusieurs fois été sommé avec menaces de le faire, conservant ainsi sa possession à la France ».

Pour en finir, les gens de la Nouvelle-Angleterre décidèrent, par un coup de force, de mettre Saint-Castin devant le fait accompli.