Pour m’ouvrir le tombeau, hâte votre trépas,
Et m’avance un destin où je ne consens pas ?
Puis-je que dans mon sang en éteindre la flamme ?
Puis-je sans le trépas…
D’éteindre tout l’amour que je vous ai donné ?
Si l’injuste rigueur de notre destinée
Ne permet plus l’espoir d’un heureux hyménée,
Il est un autre amour dont les vœux innocents
S’élèvent au-dessus du commerce des sens[1].
Plus la flamme en est pure et plus elle est durable ;
Il rend de son objet le cœur inséparable ;
Il a de vrais plaisirs dont ce cœur[2] est charmé,
Et n’aspire qu’au bien d’aimer et d’être aimé.
Qu’un tel épurement demande un grand courage !
Qu’il est même aux plus grands d’un difficile usage !
Madame, permettez que je dise à mon tour
Que tout ce que l’honneur peut souffrir à l’amour,
Un amant le souhaite, il en veut l’espérance,
Et se croit mal aimé s’il n’en a l’assurance.
Aimez-moi toutefois sans l’attendre de moi,
Et ne m’enviez point l’honneur que j’en reçoi.
Quelle gloire à Plautine, ô ciel, de pouvoir dire
Que le choix de son cœur fut digne de l’empire ;
Qu’un héros destiné pour maître à l’univers
Voulut borner ses vœux à vivre dans ses fers ;
Et qu’à moins que d’un ordre absolu d’elle-même