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HOMÉLIE LXXXVIII.


« OR, DEPUIS LA SIXIÈME HEURE DU JOUR JUSQU’À LA NEUVIÈME, TOUTE LA TERRE FUT COUVERTE DE TÉNÈBRES. ET SUR LA NEUVIÈME HEURE JÉSUS POUSSA UN GRAND CRI EN DISANT : ÉLI, ÉLI, LAMMA SABACTHANI. C’EST-A-DIRE, MON DIEU, MON DIEU, POURQUOI M’AVEZ-VOUS ABANDONNÉ ? » (CHAP. 27,45, 46, JUSQU’AU VERSET 62) 

ANALYSE.

  • 1. Des ténèbres qui couvrirent le monde à la mort de Jésus-Christ, qu’elles étaient miraculeuses. – Qu’il y eut une éclipse de soleil à peu près à l’époque où fut prêchée cette homélie, et un peu auparavant.
  • 2. Les corps des saints qui ressuscitèrent alors sont une preuve de la résurrection future. – Le centurion qui assista au crucifiement de Jésus-Christ se convertit, dit-on, et devint martyr.
  • 3 et. 4. Que Jésus-Christ récompensera plus ceux qui auront fait du bien aux pauvres, que ceux qui lui en auront fait à lui-même en personne. – Qu’un chrétien ne doit point rougir lorsqu’il entend dire que Jésus-Christ est pauvre. – Combien les pasteurs sont obligés de recommander souvent à leurs peuples l’aumône et la charité envers les pauvres. – Que la douleur de l’Église est que la vie des chrétiens soit si disproportionnée aux grandes grâces que Dieu leur a faites.


1. C’est ici le signe que Jésus-Christ promit autrefois aux Juifs, lorsque, lui demandant un signe du ciel, il leur dit : « Cette race corrompue et adultère demande un signe, et on ne lui en donnera point d’autre que celui du prophète Jonas ». (Mt. 12,39 ; Lc. 11,29) Ce qu’il entendait de sa croix, de sa mort, de sa sépulture et de sa résurrection. Et pour marquer encore ailleurs, d’une autre manière, la vertu toute-puissante de sa croix, il dit : « Lorsque vous aurez élevé en haut le Fils de l’homme, « vous connaîtrez alors qui je suis » (Jn. 8,28) ; comme s’il leur disait : Lorsque vous m’aurez crucifié, et que vous croirez m’avoir vaincu, c’est alors que vous saurez quel est mon pouvoir. Car en effet sa mort a été suivie de la destruction de leur ville, de l’anéantissement de leur loi, de l’embrasement de leur temple ; de la ruine de leur état, et de la perte de leur liberté. L’Évangile au contraire commença dès lors à fleurir de toutes parts, la prédication s’étendit jusques aux extrémités de la terre ; et l’on voit maintenant la terre et la mer, les lieux peuplés et les plus déserts, retentir du nom et des louanges de Jésus-Christ.
Voilà de quels événements, il veut parler, sans oublier ceux qui arrivèrent au temps de sa passion et de son crucifiement. C’était un bien plus grand miracle qu’il fit toutes ces merveilles, lorsqu’il était crucifié et qu’il allait expirer, que s’il les eût faites durant sa vie. Mais ce qui augmentait ces prodiges, c’est qu’ils étaient du ciel, c’est-à-dire dans l’air, tels que les Juifs le demandaient, ce qui n’était encore arrivé que dans l’Égypte, aux approches de la Pâque et de la délivrance de ce peuple. Car tout était alors une figure de ce qui devait arriver.
Mais remarquez à quelle heure ces ténèbres arrivent, c’est-à-dire en plein midi, afin que tous les hommes qui étaient alors sur la terre pussent en être les témoins. Ce seul miracle si grand de soi-même, et arrivant dans le moment qu’il arriva, devait suffire pour convertir tous les Juifs. Car Dieu ne le permit que lorsqu’ils avaient déjà satisfait toute leur rage, et que le feu de leur colère commençait à s’éteindre, après qu’ils se furent enfin lassés d’outrager le Sauveur et d’insulter à ses maux. Car après qu’ils eurent fait et qu’ils eurent dit tout ce qu’ils voulaient, les ténèbres commencèrent à paraître, afin que leur âme n’étant plus si possédée de cette fureur qui l’animait, ils fussent plus disposés à retirer quelque fruit d’un