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comme ce même enfant, si on ne lui présente rien, redouble ses pleurs et ses cris, parce qu’il croit qu’on se moque de lui, nous nous éloignons sous prétexte que quelqu’un nous demande, et au lieu de l’objet qu’il désirait, nous lui en offrons un autre. Nous avons même bien soin, pour écarter ses premiers désirs, de louer cet objet au-dessus de celui qu’il demandait, et nous nous esquivons aussitôt. Ainsi se conduisit le divin Sauveur. Ses apôtres l’interrogeaient curieusement, et il leur répondit qu’il ne pouvait satisfaire leur curiosité. D’abord cette parole les consterna, ruais bientôt ils renouvelèrent leur demande ; et de son côté, Jésus-Christ réitéra la même réponse. Cependant il ne cherche plus à les épouvanter, et après leur avoir rappelé : es œuvres, il leur donne une raison plausible de son refus : c’est que « le Père a disposé ces temps dans sa puissance ».
Eh quoi ! ô Jésus, n’êtes-vous pas initié aux secrets du Père ? Vous connaissez le Père, et il vous cacherait ses décrets ? vous avez dit « Personne ne connaît le Père, si ce n’est le Fils » ; et encore : « L’Esprit pénètre toutes « choses, même les profondeurs de Dieu » ; et il n’y aurait que ce secret qui vous serait caché ? (Lc. 10,22 ; 1Cor. 2,10) Cela ne peut être ; et tel n’est point le sens de sa réponse. Mais Jésus-Christ a feint de ne pas connaître ce jour pour éloigner des questions intempestives. C’est pourquoi les apôtres n’osèrent plus l’interroger, de peur de s’attirer ce reproche : « Et vous aussi, vous avez perdu le sens ». (Mt. 15,16) Car ils ne l’abordaient alors qu’avec bien plus de réserve qu’auparavant. « Mais vous recevrez », ajoute-t-il, « la vertu « de l’Esprit-Saint qui viendra en vous ». Tout à l’heure il refusait de répondre à leurs questions, et maintenant, comme un maître qui seul est juge de ce qu’il doit dire à son élève, il leur révèle un secret dont la connaissance était utile pour calmer leurs frayeurs et étayer leur faiblesse. C’est aussi afin de mieux les rassurer et de raffermir leur courage, qu’il voile les difficultés de l’avenir. Comme il allait les quitter, il ne leur adresse nulle parole sévère, et avec un art infini il tempère le blâme par l’éloge. Ne craignez, point, leur dit-il, « car vous recevrez la vertu de l’Esprit-Saint qui viendra en vous, et vous serez mes témoins dans Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie ». Auparavant il leur avait dit : « N’allez point vers les nations, et n’entrez point dans les villes des Samaritains ». (Mt. 10,5) plais aujourd’hui il veut qu’ils prêchent l’Évangile dans toute la Judée, dans la Samarie, et, ce qu’il dit pour la première fois, « jusqu’aux extrémités de la terre ».
Ce fut après cette solennelle parole que, prévenant toute nouvelle question, « il s’éleva en leur présence, et une nuée le déroba à leurs yeux ». Eh bien ! les apôtres n’ont-ils pas rempli leur mission, et prêché l’Évangile ? Certes, Jésus-Christ leur avait confié une œuvre vraiment grande ! Jérusalem, avait-il dit, a été témoin de votre faiblesse, et c’est à elle que vous adresserez tout d’abord la parole que vous porterez ensuite jusqu’aux extrémités de la terre fuis, pour affermir leur croyance en ses paroles, « il s’éleva en leur présence ». Jésus-Christ, qui n’était point ressuscité sous le regard de ses apôtres, voulut donc monter au ciel en leur présence. C’est que dans ce dernier mystère il devait y avoir autre chose que le témoignage des yeux. Les apôtres, qui virent l’accomplissement du miracle de la résurrection, n’en avaient pas vu le commencement : et le contraire arriva dans l’ascension ; il leur eût été vraiment inutile d’assister au prodige de la résurrection, puisque Jésus-Christ devait en personne le leur raconter, et que d’ailleurs le tombeau vide le proclamait lui-même. Mais une parole divine pouvait seule nous apprendre ce qui suivit l’ascension.
Et en effet l’œil ne pouvait atteindre ces hauteurs incommensurables, ni s’assurer que le Christ s’était véritablement élevé jusqu’aux cieux. Aussi qu’est-il arrivé ? Les apôtres savaient que celui qui s’élevait était Jésus-Christ, et ils s’en rapportaient sur ce point au témoignage de ses propres paroles ; mais, parce qu’ils ne pouvaient plus le reconnaître dans un si prodigieux éloignement, il fut nécessaire que des anges vinssent les assurer qu’il était entré dans les cieux. C’est donc par suite d’une admirable disposition de la Providence, que dans ce mystère tout n’est pas révélé par l’Esprit-Saint, et qu’une partie nous est attestée par le témoignage des yeux. : liais pourquoi une nuée le déroba-t-elle aux regards des apôtres ? Cette nuée était un signe que déjà il avait pénétré dans les cieux. Et en effet, ce ne fut point un tourbillon de feu ni un char de