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qui devaient être baptisés dans l’Esprit-Saint. Mais comme le Sauveur avait souvent entretenu ses apôtres de la venue de l’Esprit-Saint, ils eussent pu penser qu’il s’en tiendrait encore à une promesse qui ne se réaliserait jamais. C’est pourquoi il a soin d’ajouter que « ce sera sous peu de jours ». Toutefois, il ne précise point le jour, afin d’exciter leur vigilance ; mais il le leur annonce comme proche, pour entretenir leur courage ; et s’il ne le leur fait point connaître plus explicitement, c’est qu’il veut qu’ils se tiennent toujours prêts et disposés. A ce premier motif de confiance), la brièveté du retard, il en ajoute un second, l’assurance « de la promesse qu’ils ont entendue de sa bouche ». Car ce n’est plus ici, semble-t-il leur dire, une simple parole, mais une promesse solennelle. Quant à nous, ne nous étonnons point que Jésus-Christ nous cache le jour de son dernier avènement, puisqu’il n’a point voulu révéler à ses apôtres le jour si proche de la descente du Saint-Esprit. Et son silence à cet égard a eu pour but de les maintenir dans une attente vive et inquiète.
6. Et en effet, la grâce, je ne saurais trop le dire, la grâce ne se communique qu’aux âmes attentives et vigilantes. Aussi, le prophète Élie dit-il à son disciple : « Si tu me vois, lorsque je serai enlevé, tu auras ce que tu as demandé ». (2R. 2,10) Le Sauveur lui-même adressait presque toujours cette question à ceux qui l’approchaient : Croyez-vous ? car si nous ne désirons vivement le bienfait que nous sollicitons, nous n’en apprécierons que faiblement le prix et l’importance. C’est ainsi encore que saint Paul ne recouvra pas la vue sur-le-champ, mais il resta aveugle pendant trois jours ; et durant cet intervalle, la crainte le purifiait de ses péchés, et le disposait à recevoir l’Esprit-Saint. L’ouvrier qui teint en pourpre, fait subir aux étoffes une certaine préparation afin qu’elles retiennent mieux l’éclat de la couleur. Et c’est ainsi que Dieu veut que d’abord notre âme se dispose par une active vigilance à recevoir la plénitude de ses grâces. Il n’envoya donc point tout aussitôt l’Esprit consolateur, et attendit jusqu’au jour de la Pentecôte.
Peut-être demanderez-vous pourquoi nous ne conférons pas le baptême en ce jour, mais seulement à la fête de Pâques ? La raison en est que si la grâce du sacrement est la même dans ces deux jours, le jeûne qui précède le second y dispose mieux l’âme. Un second motif, non moins grave, se tire du temps même de la Pentecôte. Quel est-il ? Nos pères ont considéré le baptême comme un frein puissant contre les passions, et une forte leçon de morale, en sorte qu’à l’époque même des plaisirs, il puisse nous retenir dans les bornes de la tempérance chrétienne. C’est pourquoi, lorsque nous devons nous nourrir de Jésus-Christ, et nous asseoir à sa table sainte, nous évitons les moindres péchés, et nous nous préparons à la communion par le jeûne, la prière et la vigilance. Celui que le prince nomme à une charge importante, ne néglige rien de ce qu’exige sa nouvelle dignité ; et l’argent, le temps et les soins ne lui coûtent point pour se mettre à la hauteur de sa position. Mais quels châtiments ne méritons-nous pas, nous qui nous approchons de la table sainte avec tant de négligence, qui nous préparons si peu à recevoir cet aliment céleste, et qui, après l’avoir reçu, sommes si tièdes et si lâches ?
Mais si nous sommes lâches après la communion, c’est qu’avant de nous y présenter, nous n’avons pas veillé sur nous-mêmes. Aussi, en voit-on plusieurs retourner presque immédiatement à leur premier vomissement. On dirait qu’ils n’ont été délivrés de leurs anciens péchés que pour tomber dans un état plus grave encore, et se rendre dignes de plus rigoureux supplices. Et, en effet, rien n’irrite plus le courroux du souverain Juge que cette coupable négligence après la grâce d’une heureuse guérison. Aussi réalisent-ils à leur égard cette menace de Jésus-Christ au paralytique : « Voilà que vous êtes guéri ; ne péchez plus désormais, de peur qu’il ne vous arrive quelque chose de pis ». (Jn. 5,14) Le Sauveur fit aussi la même prédiction aux Juifs, et leur annonça que leur ingratitude serait punie des plus terribles châtiments. « Si je n’étais venu », dit-il, « et si je ne leur eusse parlé, ils ne seraient pas coupables ». (Jn. 15,22) Le péché de rechute est donc empreint d’une double et quadruple malice. Et comment ? Parce qu’après avoir reçu l’honneur de la régénération spirituelle, nous devenons ingrats et pécheurs. Aussi le baptême n’est-il point pour nous un titre à un châtiment moins sévère.
Observez, en effet, que ce sacrement efface