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et tumultueusement, puisque les linceuls et le suaire étaient séparés et pliés à part : en un mot, cela s’est fait ainsi, afin que les disciples crussent la résurrection. C’est pourquoi Jésus-Christ leur apparut ensuite, comme étant déjà persuadés de la résurrection par ce qu’ils avaient vu.
Considérez ici, je vous prie, mes frères, combien l’évangéliste est éloigné du faste et de la vanité : examinez le soin qu’il a de certifier que Pierre fit une exacte recherche. Étant arrivé le premier au sépulcre et ayant vu les linceuls qui y étaient, il ne chercha rien de plus, et il se retira. Mais Pierre, qui était vif et bouillant, entra dans le sépulcre, examina tout avec attention, et fit une nouvelle découverte ; alors il appela Jean afin qu’il vînt aussi voir. Jean étant donc entré après Pierre, vit de même les linges qui avaient servi à ensevelir le corps, séparés et pliés en un lieu à part. Or, ces linges ainsi séparés, pliés et mis en un lieu à part, prouvent visiblement que celui qui les avait rangés de cette manière n’était ni pressé ni troublé, mais qu’il était tranquille et attentif à ce qu’il faisait.
5. Vous l’avez entendu, mes frères : le Seigneur est ressuscité nu ; gardez-vous donc de ces folles dépenses qu’on fait aux enterrements. À quoi sert une vaine et folle dépensé, dommageable aux parents du mort, sans être d’aucun avantage au mort lui-même ; ou plutôt qui, si l’on veut avouer la vérité, est très-ruineuse pour ceux-là et très dommageable pour ceux-ci. Souvent la magnificence, la somptuosité avec laquelle on ensevelit les morts, a été cause que les voleurs les ayant déterrés et dépouillés, les ont laissés nus et sans sépulture : mais, ô vaine gloire ! tu portes ta tyrannie jusques sur les deuils et les enterrements, et quelle folie n’inspires-tu pas ? Plusieurs, en effet, pour empêcher ce malheur, découpent et déchirent de très-belles et très-précieuses toiles, et, après les avoir remplies de beaucoup d’aromates, ils les enterrent, afin que de cette manière elles soient inutiles aux voleurs. N’est-ce pas là l’action d’un furieux et d’un insensé ; faire éclater son faste et sa vanité, et en détruire aussitôt la matière ? Oui, disent-ils, c’est l’expédient que nous avons trouvé, afin que nos morts soient en sûreté, et que ce que nous leur donnons leur demeure. Quoi donc ! Si les voleurs n’emportent pas ces draps, les teignes et les vers ne les mangeront-ils pas ? Et si les vers et les teignes les épargnent, le temps et la pourriture ne les détruiront-ils pas ?
Mais supposons que ni les vers, ni les teignes, ni le temps, ni aucun autre accident ne détruise ces choses, qu’on ne touche point au corps, et que tout se conserve dans sa fraîcheur, sa solidité, sa finesse, les morts en seront-ils plus avancés et plus riches ? Le corps ressuscitera nu, ces dépouilles resteront dans le sépulcre, et ne nous serviront de rien pour rendre notre compte. Pourquoi donc, direz-vous, a-t-on enseveli le corps de Jésus-Christ dans ces linceuls pleins de précieux aromates ? Ah ! gardez-vous de mêler les choses saintes avec les choses profanes : gardez-vous de confondre ce qu’on a fait pour le Seigneur avec ce que l’on fait pour des hommes : témoin les parfums répandus par la femme débauchée sur les pieds sacrés du Sauveur. S’il en faut parler, nous dirons d’abord que ceux qui ont fait ces choses n’avaient point encore de connaissance de la résurrection ; c’est pourquoi l’évangéliste dit : « Selon que les Juifs ont accoutumé d’ensevelir ». (Jn. 19,41) Ceux qui honoraient ainsi Jésus-Christ n’étaient pas de ses douze disciples, mais de ceux qui ne l’honoraient qu’à moitié : ce n’est pas de cette sorte que les douze apôtres sont honoré, mais en souffrant la mort pour lui, en s’exposant pour lui à mille périls et à mille morts. L’honneur que lui ont rendu ceux dont je parle, était véritablement un honneur, mais de beaucoup inférieur à celui-ci. De plus, comme j’ai dit, nous parlons maintenant des hommes, et c’est du Seigneur qu’il s’agissait alors.
Mais afin que vous sachiez qu’il ne se souciait pas de ces choses, écoutez ce qu’il dit « Vous m’avez vu avoir faim, et vous m’avez donné à manger : avoir soif, et vous m’avez donné à boire : nu, et vous m’avez revêtu ». (Mt. 25,35, 36, 37) Jamais il n’a dit : vous m’avez vu mort, et vous m’avez enseveli. Je ne vous dis pas ceci pour vous détourner de rendre aux morts les devoirs de la sépulture. A Dieu ne plaise ! mais afin que vous proscriviez le luxe et les dépenses fastueuses et mal placées.
Ce sont là, direz-vous, des témoignages de notre douleur, de notre affection pour le mort. Non, ne vous y trompez pas, mes frères ; non, ce n’est point là de l’affection pour le mort,