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le haut jusqu’en bas (23) ». Les uns disent que c’est une allégorie, parce que ce crucifié n’était pas purement homme, mais qu’il était Dieu avant de s’être revêtu de l’humanité d’autres, que l’évangéliste décrit la forme de cette robe, et que, comme il était d’usage dans la Palestine ; de composer les tuniques de deux pièces jointes ensemble, saint Jean voulant marquer que celle de Jésus-Christ était le même, dit : « Elle, était, d’un seul tissu depuis le haut jusqu’en, bas ». Pour moi ; il me semble que l’évangéliste fait cette remarque pour faire connaître que les vêtements de Jésus-Christ étaient de fort bas prix ; et que, comme il recherchait en toutes choses ce qu’il y avait de plus commun et de plus vil, il en usait de même pour ses vêtements.
Voilà ce que firent les soldats (24). Mais Jésus-Christ, crucifié recommande sa mère à son disciple, pour nous apprendre que, jusqu’au dernier soupir, nous devons avoir un grand soin de notre père et de notre mère. Lorsque sa mère vint à contre-temps demander un miracle ; Jésus lui répondit : « Femme, qu’y a-t-il de commun entre vous et moi ? » (Jn. 2,3) Et : « Qui est ma mère ? » (Mt. 3,48) Mais maintenant il lui témoigne un grand amour et il la recommande au disciple qu’il aimait. Saint Jean cache encore ici son nom par modestie : s’il eut voulu se glorifier, il aurait dit la raison pour laquelle il était aimé, raison qui ne pouvait être que grande et admirable. Pourquoi Jésus-Christ ne dit-il que cette seule parole à Jean et ne le console-t-il pas, le voyant si triste et si affligé ? Parce que ce n’était point là le temps défilé consoler. Et de plus, ce n’était pas peu de, chose que l’honneur qu’il recevait, d’être dès lors récompense de sa persévérance.
Mais vous, mes, chers frères, considérez ce divin crucifié, voyez gomment il fait toutes choses sans se troubler, voyez avec quelle tranquillité il parle à son disciple de sa mère, il accomplit les prophéties, il donne de bonnes espérances au larron, quoique, avant d’être attaché à la croix, il parût suer, tomber en agonie, craindre. Qu’est-ce, donc que ceci, quel est ce prodige. Nul doute, nulle incertitude avant le crucifiement, l’infirmité de la nature s’est montrée, maintenant éclate la grandeur de sa puissance. Ajoutons que, par ces deux choses, par sa faiblesse et par sa puissance, il nous apprend qu’encore que nous, nous troublions avant que le mal arrive, il ne faut pas pour cela reculer et fuir, et que, lorsqu’une fois entrés dans la carrière, nous sommes en plein combat, alors il faut tout regarder comme aisé et facile, et ne penser qu’à la victoire.
Ne craignons donc point la mort ; l’amour de la vie est né avec nous, il est fortement attaché à notre nature, mais il est en notre pouvoir, ou de rompre cette chaîne et d’affaiblir ce désir, ou de serrer ce lien et de rendre cet amour plus fort et plus violent. Nous portons en nous la concupiscence de la chair, mais si noms sommes sages, nous savons en réprimer la tyrannie ; il en est de même du désir de la vie. Comme la concupiscence charnelle a été mise, en nous pour la conservation de notre espèce, parce que Dieu a établi la propagation sans nous empêcher néanmoins de suivre une voie plus élevée et plus excellente, celle de la continence ; de même, il a mis en nous l’amour de la vie, nous défendant de nous tuer nous-mêmes, et ne nous défendant pourtant, pas de mépriser la vie présente. Cette connaissance, mes frères, 'doit régler notre conduite ; nous ne devons pas volontairement nous précipiter à la mort, encore que nous soyons accablés de mille maux ; et aussi nous ne durons point la craindre ni la refuser, lors ; qu’il plaît à Dieu de nous ôter la vie pour des raisons qui lui sont connues. Il faut alors marcher au-devant de la mort avec confiance, et préférer la vie future à la vie présente.
« Cependant des femmes se tenaient auprès de la croix:(25) ». Le sexe le plus faible se montra le plus fort ; ainsi alors tout était renversé. Mais Jésus, recommandant sa mère, dit : « Voilà votre fils (26) ». Oh ! quel honneur ne fait-il pas à son disciple ? Comme il s’en allait, il charge son disciple du soin de sa mère. Comme il n’y avait nul doute qu’étant mère, elle était accablée de douleur, et qu’elle avait besoin de secours et de protection ; comme ; de juste, ce divin Fils la recommande à son disciple, en disant : « Voilà votre mère (27) ». Par là, il les unit et les lie d’un amour tendre et mutuel ; le disciple le comprenant bien, prit Marie chez lui, et la regarda comme sa mère.
Mais pourquoi le Sauveur ne fit-il mention d’aucune autre femme, quoiqu’il y en eût encore auprès de sa croix ? Pour nous apprendre à avoir un soin particulier de nos