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HOMÉLIE LXXVIII.

JE NE VOUS AI PAS DIT CES CHOSES DÈS LE COMMENCEMENT, PARCE QUE J’ÉTAIS AVEC VOUS ; MAIS MAINTENANT JE M’EN VAIS À CELUI QUI M’A ENVOYÉ, ET AUCUN DE VOUS NE DEMANDE OÙ JE VAIS. — MAIS PARCE QUE JE VOUS AI DIT CES CHOSES, VOTRE CŒUR A ÉTÉ REMPLI DE TRISTESSE. (VERS. 5, 6, JUSQU’AU VERS. 15)

ANALYSE.

  • 1. La tristesse a son utilité. — Contre les pneumatomaques.
  • 2. Ce que c’est que convaincre, touchant le péché, touchant la justice, touchant le jugement.
  • 3. Distinction des hypostases ou des personnes, égalité des personnes, Valentiniens, Marcionites, Anoméens.
  • 4. Quel est le bien, quelle est la force de l’union et de la concorde. — Excellence de la charité. — Combien les amis rendent un homme puissant. — Vie misérable de celui qui n’a point d’amis. — La société rend la vie douce et agréable. — Il n’est rien de pire que d’être seul. — Les moines habitaient dans les montagnes. — Que doit-on penser de leur solitude ?— Les chrétiens s’embrassaient dans la célébration des saints mystères. — La charité se fortifie dans les prières, dans la célébration des mystères, dans les exhortations faites en commun.

1. Grand est l’empire de la tristesse : c’est une maladie d’esprit qui demande beaucoup de force pour lui résister courageusement, et pour rejeter ce qu’elle a de mauvais, après en avoir pris ce qu’elle a d’utile, car elle a son utilité. En effet, lorsque nous avons péché, ou que quelqu’un pèche, alors seulement la tristesse est bonne et utile ; mais elle est inutile lorsqu’elle est causée par des calamités humaines. Jésus-Christ voyant donc qu’elle s’emparait du cœur de ses disciples encore imparfaits, les reprend comme on le voit. Ces disciples, qui auparavant avaient fait à leur Maître mille questions, comme lorsque Pierre lui dit : « Où allez-vous ? » Et Thomas : « Nous ne savons où vous allez ; et comment pouvons-nous en savoir la voie ? » Et Philippe : « Montrez-nous votre Père » ; ces mêmes disciples, lui entendant dire maintenant : Ils vous chasseront de la synagogue, et ils vous haïront, et ils croiront faire une chose agréable à Dieu, en furent si abattus et si consternés, qu’ils ne purent même ouvrir la bouche, ni prononcer une seule parole ; et voilà ce que Jésus-Christ leur reproche par ces paroles : « Je ne vous ai pas dit ces choses dès le commencement, parce que j’étais avec vous. Mais maintenant je m’en vais à celui qui m’a envoyé, et aucun de vous ne me demande où je vais. Mais parce que je vous ai dit ces choses, votre cœur a été rempli de tristesse ». Le Sauveur leur fait ce reproche, parce qu’une trop grande tristesse est dangereuse, et si dangereuse même qu’elle peut causer la mort ; c’est pourquoi saint Paul disait : « De peur qu’il ne soit accablé par un excès de tristesse ». (2Cor. 2,7)

« Je ne vous ai pas dit ces choses dès le commencement ». Pourquoi le Seigneur ne les a-t-il pas dites dès le commencement ? De peur qu’on ne dît qu’il les prédisait par conjecture sur ce qui arrive souvent. Et pourquoi donc entreprend-il une chose aussi difficile ? Je savais ces choses, dit-il, dès le commencement, et ce n’est pas pour les avoir ignorées que je ne vous les ai point dites ; mais c’est « parce que j’étais avec vous ». Jésus-Christ parle encore ici d’une manière humaine : « Parce que j’étais avec vous » ; c’est-à-dire, parce que vous étiez en sûreté, parce que vous pouviez me faire les demandes que vous vouliez ; et que toute la guerre, toute la haine