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même les œuvres » (Id) que je fais. Comment donc le Sauveur, ayant commencé sa preuve par les paroles, passe-t-il aussitôt aux œuvres ? Car ce qu’il voulait prouver demandait qu’il dît : Le Père dit les paroles que je dis : c’est qu’ici il présente en même temps deux choses, et la doctrine et les miracles : ou encore, il en use de la sorte, parce qu’en Dieu les paroles sont aussi les couvres. Comment le Père fait-il donc les œuvres ? En effet, le Fils dit en un autre endroit : « Si je ne fais pas les œuvres de mon Père, ne me croyez pas ». (Jn. 10,37) Comment, dis-je, Jésus-Christ, après avoir dit qu’il fait les œuvres, dit-il ici que le Père les fait ? Il le dit, pour montrer qu’il n’y a point de milieu ou d’intervalle entre le Père et le Fils : et c’est comme s’il disait : Le Père ne fait pas une chose, et moi une autre[1]. Car il est écrit ailleurs que le Père agit également : « Mon Père ne cesse a point d’agir jusqu’à présent, et j’agis aussi a incessamment ». (Jn. 5,17) Là, Jésus-Christ fait voir qu’entre les œuvres du Père et les œuvres du Fils, il n’y a nulle différence ; ici il déclare que le Père et le Fils sont une même chose.
Que si ces paroles présentent d’abord quelque chose de bas, ne vous en étonnez point. Le Sauveur ayant dit auparavant : « Vous ne croyez pas », il a parlé ensuite dans ces termes, pour vous faire connaître qu’il n’a tempéré ses paroles de cette manière, qu’afin d’amener ses disciples à la foi. Jésus-Christ était dans leur cœur, il voyait tout ce qui s’y passait. « Ne croyez-vous pas que je suis dans mon Père, et que mon Père est dans moi (11) ? » Sûrement il fallait, dit le Sauveur, qu’ayant entendu nommer le Père et le Fils, vous n’allassiez rien chercher de plus : il fallait aussitôt reconnaître que la substance est égale et la même. Que si cela n’est pas pour vous une suffisante démonstration de l’égalité de rang et de la consubstantialité, apprenez-le encore par les œuvres, que la substance et la dignité sont égales. Et si Jésus-Christ, en disant « Celui qui me voit, voit » mon « Père », avait voulu parler des œuvres, il n’aurait pas ensuite ajouté : « Croyez-le au moins à cause des œuvres » que je fais. Après quoi, voulant montrer que, non seulement il pouvait faire ces choses, mais aussi de beaucoup plus grandes, il s’élève et parle hyperboliquement. Car il ne dit pas : Je puis faire de plus grandes œuvres, mais, ce qui est beaucoup plus admirable : Je puis, dit-il, je puis donner aux autres le pouvoir d’en faire de plus grandes.
« En vérité, en vérité, je vous le dis : Celui « qui croit en moi, fera lui-même les œuvres que je fais, et en fera encore de plus grandes, parce que je m’en vais à mon Père (12) ». C’est-à-dire, ce sera à vous désormais à faire les miracles, car je m’en vais. Ensuite, ayant fini d’expliquer ce que demandait la suite de son discours, le Sauveur dit : « Quoi que ce soit que vous demandiez en mon nom, vous l’obtiendrez, et je le ferai, afin que mon Père soit glorifié en moi (13) ». Ne le remarquez-vous pas, mes frères, que c’est encore le Fils qui fait les œuvres ? Je le ferai, dit-il ; et il n’a point dit : « Je prierai mon Père » ; mais : « Afin que le Père soit glorifié en moi ». Et cependant il avait dit ailleurs : « Dieu glorifiera son Fils en lui-même » (Jn. 8,54) ; mais ici il dit : Le Fils glorifiera le Père. Comme on verra que le Fils a le pouvoir de faire de grandes œuvres, son Père en sera glorifié.
Que veut dire cette parole : « En mon nom ? » Ce que disaient les apôtres : « Au nom de Jésus-Christ, levez-vous et marchez ». (Act. 3,6) Car tous les miracles que faisaient les apôtres, c’était lui-même qui les opérait. Et « La main du Seigneur était avec eux ». (Art. 11,21) « Je le ferai », dit-il. Ne voyez-vous pas son autorité ? Ce que font les autres, c’est lui-même qui le fait ; et ce qu’il voudra faire par lui-même, il ne le pourra pas, si le Père ne lui en donne la vertu et le pouvoir ? Qui oserait proférer une pareille absurdité ? « Je le ferai » : pourquoi ne le dit-il qu’après ? C’est afin de confirmer ce qu’il a dit d’abord, et de faire connaître qu’il a parlé d’abord le langage de la condescendance. « Je m’en vais à mon père ». Par ces paroles, Jésus-Christ veut faire entendre ceci à ses disciples : Je ne mourrai point, mais je demeure dans toute ma dignité, et je suis dans le ciel. Au reste, le Sauveur disait toutes tels choses à ses apôtres pour leur consolation. Comme il était vraisemblable que, n’ayant pas encore une pleine connaissance de la résurrection, il leur venait dans l’esprit bien des idées tristes et affligeantes,

  1. Le Père n’agit pas séparément de moi, il ne fait pas une autre ouvre que celle que je fais : ce qu’il fait, je le fais ; ce que je fais, il le fait : Car Nous sommes une même chose.