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a-t-il été révélé (38) ? » Et encore « Ils ne purent croire », dit l’évangéliste, « parce qu’Isaïe a dit : Vous écouterez de vos oreilles, et vous n’entendrez point. Isaïe a dit ces choses lorsqu’il a vu sa gloire, et qu’il a parlé de lui (41) ». Remarquez encore ici, comme nous vous l’avons fait observer ailleurs, que ces mots : « Parce que », et : « Il a dit », ne sont pas des particules causales, mais qu’ils marquent seulement l’événement, ou ce qui est arrivé. Car ce n’est pas parce qu’Isaïe l’a prédit, que les Juifs n’ont point cru, mais comme il devait arriver qu’ils ne croiraient point, Isaïe l’a prédit. Pourquoi donc l’évangéliste, ne s’explique-t-il pas de cette manière et laisse-t-il entendre que l’incrédulité des Juifs vient de la prédiction qui en a été faite, et non pas de la prédiction de l’incrédulité ? pourquoi s’exprime-t-il même dans la suite en des termes plus expressifs, et dit-il : « C’est pour cela qu’ils ne pouvaient croire, parce qu’Isaïe a dit ? » C’est parce qu’il veut, par plusieurs exemples, faire parfaitement connaître la vérité de l’Écriture et montrer que les choses qu’elle a prédites ne sont point arrivées d’une autre manière qu’il ne les a rapportées. Afin qu’on ne dît pas : Pourquoi Jésus-Christ est-il venu ? Est-ce qu’il ne savait pas que les Juifs ne croiraient point ? il apporte le témoignage des prophètes, qui ont prédit leur incrédulité. Mais si Jésus-Christ est venu, c’est afin que les Juifs n’eussent aucune excuse de leur péché.
Le prophète n’a prédit ces choses que parce qu’elles devaient infailliblement s’accomplir, et il ne les aurait point prédites, si l’accomplissement n’en eût été sûr et infaillible. Or, ces choses devaient sûrement arriver, parce que les Juifs étaient incorrigibles. Ce mot : « Ils n’ont pas pu », signifie : ils n’ont pas voulu. Et n’en soyez pas surpris, car Jésus-Christ dit encore dans un autre endroit : « Qui peut comprendre ceci, le comprenne ». (Mt. 19,12) Il a coutume de mettre ainsi souvent le pouvoir pour la volonté. Et encore : « Le monde ne peut vous haïr ; mais pour moi, il me hait ». (Jn. 7,7)
Et même parmi nous, cette coutume où l’on est de dire : je ne puis aimer un tel ; cet homme ne peut devenir bon, ne marque que la force et l’empire qu’a sur nous la volonté. Et encore : que dit le prophète ? « Si un Éthiopien peut changer sa peau, et un léopard la variété de ses couleurs, ce peuple aussi pourra faire le bien, lui qui n’a appris qu’à faire le mal ». (Jer. 13,23) Ce n’est pas qu’ils ne pussent point embrasser la vertu et faire le bien, mais c’est parce qu’ils ne le voulaient point, que le prophète dit qu’ils ne le pouvaient pas. Au reste, l’évangéliste, veut dire ici que le prophète ne pouvait point mentir ; ce n’est pas à dire qu’il leur fût impossible de croire. Il pouvait arriver que, quoiqu’ils crussent, le prophète fût véritable : car s’ils eussent dû croire, alors il n’aurait pas prédit qu’ils ne croiraient point. Pourquoi donc, direz-vous, ne s’est-il pas expliqué en ces termes ? Parce que l’Écriture a certaines façons de parler qui lui sont propres, et c’est à quoi il faut avoir égard. Enfin Isaïe a dit ces choses, lorsqu’il a vu sa gloire. La gloire de qui ? Du Père.
Pourquoi saint Jean parle-t-il du Fils, et saint Paul du Saint-Esprit ? Ce n’est pas pour confondre les personnes, mais c’est pour montrer que leur dignité est égale et la même. Ce qui est au Père, est au Fils, et ce qui est au Fils, est au Père. (Jn. 17,10) Cependant Dieu a dit bien des choses par ses anges, et néanmoins personne ne dit : Comme – a dit l’ange ; mais bien : Dieu a dit ; parce que ce que Dieu a dit par ses anges, appartient à Dieu, et que ce qui est à Dieu n’appartient pas de même aux anges. Mais l’apôtre dit que les paroles qu’il prononce sont du Saint-Esprit.
« Isaïe a parlé de lui ». Qu’a-t-il dit ? « Je suis le Seigneur assis sur un trône sublime », etc. (Is. 6,1) II appelle donc ici cette vision une gloire : il a dit qu’il a vu de la fumée, qu’il a entendu de profonds mystères, qu’il a vu des séraphins sortir du trône, des éclairs que ces puissances mêmes ne pouvaient fixement regarder. « Et il a parlé de lui ». Qu’a-t-il dit ? Qu’il a entendu une voix qui disait : « Qui enverrai-je, et qui ira ? « Me voici, dis-je alors, envoyez-moi. Le Seigneur me dit : Vous écouterez de vos oreilles, et vous n’entendrez point, et voyant, vous verrez, et vous ne discernerez point. Car le Seigneur a aveuglé ses yeux et endurci son cœur, de peur que ses yeux ne voient, et que son cœur ne comprenne ». (Id. 8, 9, 10) Il se présente ici une difficulté apparente, qui pourtant, si l’on y fait bien attention, n’en est point une. Car, ainsi que le soleil,.s’il fait fermer les yeux à ceux qui les ont