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prouver et faire connaître la vérité de l’incarnation, se sont particulièrement attachés à rapporter tout ce qu’il y a eu d’humain dans la passion du Sauveur : saint Matthieu prouve son incarnation, son humanité par l’agonie, par le trouble, par la sueur : et ici saint Jean par la tristesse, par les larmes. Si Jésus-Christ n’eût pas été de notre nature, il ne se serait pas senti plusieurs fois ému, troublé, dans la tristesse, dans la douleur.
Mais que répond Jésus aux reproches que lui font les Juifs ? Il ne se justifie point sur leur accusation – et qu’était-il besoin de réfuter par des paroles ceux que dans un moment il allait plus sûrement, et avec moins de peine, convaincre de calomnie par ses œuvres ? « Mais il leur dit : Ôtez la pierre (39) ». Pourquoi, avant d’arriver au tombeau, Jésus n’appela-t-il pas Lazare, et ne lui commanda-t-il pas de se lever et d’en sortir ? Ou même, pourquoi ne le ressuscita-t-il pas, lorsque la pierre était encore sur le tombeau ? Celui qui, par sa veule parole, pouvait donner à un mort la vie et le mouvement, pouvait bien aussi, à plus forte raison, par cette même parole, ôter la pierre de son tombeau ; celui qui, par sa parole, fit marcher, un homme qui avait les pieds et les mains liés de bandes, pouvait aussi beaucoup plus facilement, par la même vertu, remuer une pierre ? Même absent et éloigné il pouvait faire toutes ces choses, pourquoi donc ne les a-t-il lias faites ? Il ne les a pas faites, afin de rendre les Juifs témoins du miracle : il ne les a pas faites, de peur qu’ils ne dissent ce qu’ils avaient dit de l’aveugle : « C’est lui, ce n’est pas lui ». Car ces mains liées et leur propre présence auprès du sépulcre, suffisaient pour établir que celui qui ressuscitait était Lazare lui-même. C’est pourquoi, si les Juifs n’étaient pas venus au sépulcre, ils auraient cru voir ou un fantôme, ou un autre homme, et non Lazare lui-même. Mais maintenant qu’ils sont venus, qu’ils ont eux-mêmes ôté la pierre, que par l’ordre de Jésus ils ont délié les bandes dont Lazare était lié, que ces amis qui l’ont tiré du tombeau, l’ont reconnu à ces bandes, que ses sueurs ont été présentes, qu’une d’elles a dit : « Il sent déjà mauvais, car il y a déjà quatre jours qu’il est là (39) » ; maintenant, dis-je, toutes ces choses sont plus que suffisantes pour les forcer, malgré eux, à rendre témoignage du miracle. Voilà pourquoi Jésus leur commande d’ôter la pierre, par où il leur fait voir qu’il va ressusciter Lazare : voilà aussi pourquoi il demande : « Où l’avez-vous mis ? » Il le demande, afin que ceux qui avaient dit : « Venez et voyez » ; et qui avaient conduit Jésus au sépulcre, ne puissent pas dire que c’est un autre qui a été ressuscité : il le demande, afin que la voix et les mains rendent témoignage ; la voix, en disant : « Venez et « voyez » ; les mains, en ôtant la pierre et en déliant les bandes. Il le demande, afin que la vue et l’ouïe portent aussi leur témoignage celle-ci pour avoir entendu la voix, l’autre pour avoir vu Lazare sortir du tombeau ; et encore : l’odorat est un témoin, il a senti la mauvaise odeur : « Il sent déjà mauvais », a-t-on dit, « car il y a quatre jours qu’il est là ».
J’ai donc eu raison de dire que Marthe n’avait pas compris cette parole de Jésus-Christ « Quand il serait mort, il vivra ». Faites attention à ce qu’elle répond maintenant : elle parle comme s’il était impossible de faire cette résurrection, parce qu’il y a longtemps que le corps, est dans le tombeau. C’était en effet une chose bien surprenante que de ressusciter un cadavre enterré depuis quatre jours et corrompu. Mais observons ici que Jésus, quand il a parlé à ses disciples, a dit : « Afin que le Fils de Dieu soit glorifié », parlant de lui-même, mais qu’à la femme il dit : « Vous verrez la gloire de Dieu », parlant du Père. Remarquez-vous, mes frères, que la différence des auditeurs est la cause de cette différence que vous voyez dans le langage ? Jésus, adressant la parole à Marthe, liai rappelle ce qu’il lui a dit ; comme s’il la reprenait de l’avoir oublié ; ou bien, ne voulant pas jeter dans le trouble et dans la frayeur ceux qui étaient présents, il lui dit doucement : « Ne vous ai-je pas dit que, si vous croyez, vous verrez la gloire de Dieu (40) ? »
3. La foi est donc un grand bien : oui, certes, la foi est un grand bien et la source de beaucoup de biens : c’est par elle que les hommes peuvent faire les œuvres de Dieu en son nom. « Si vous avez la foi », dit Jésus-Christ, « vous direz à cette montagne : Transporte-toi d’ici, et elle se transportera » (Mc. 17,19) ; et encore : « Celui qui croit en moi, fera lui-même les œuvres que je fais, et en fera encore de plus grandes ». (Jean 14,12) Quelles sont ces plus grandes œuvres ? Celles