Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 8, 1865.djvu/393

Cette page n’a pas encore été corrigée

aux Juifs que ce qu’ils regardaient comme un très-grand sujet de gloire et de louanges, serait la cause du rigoureux supplice auquel ils seraient condamnés. Il console de sa cécité l’aveugle de naissance. Ensuite il parle de leur aveuglement ; car, de peur qu’ils ne disent : si nous ne vous suivons pas, si nous ne vous croyons point, ce n’est pas que nous soyons aveugles, mais c’est parce que nous vous avons en horreur comme un séducteur ; il ne les entretient que de ce sujet.
2. Et ce n’est pas sans raison que l’évangéliste a marqué que quelques pharisiens, qui étaient avec Jésus, comprirent ces paroles et lui dirent : « Sommes-nous donc aussi aveugles ? » C’est pour vous faire ressouvenir que ce sont les mêmes qui s’étaient auparavant retirés de sa suite, et qui avaient jeté des pierres sur lui. Car quelques-uns le suivaient par manière d’acquit ; aussi ils le quittaient et se tournaient facilement contre lui. Par où Jésus-Christ prouve-t-il donc qu’il n’est pas un imposteur et un charlatan, mais le pasteur ? C’est en opposant les unes aux autres les marques et du pasteur et du charlatan, qu’il leur donne le moyen d’examiner et de connaître la vérité. Et premièrement, il montre ce que c’est qu’un fourbe et un larron, le qualifiant ainsi par les Écritures mêmes.
« En vérité, en vérité, je vous le dis : celui qui n’entre pas par la porte dans la bergerie des brebis, mais qui y monte par un autre endroit, est un voleur et un larron ». (Chap. 10,1) Observez, mes frères, les marques du larron : premièrement, il n’entre pas de jour, ni publiquement ; en second lieu, il n’entre pas par l’autorité des Écritures, car, entrer par les Écritures, c’est entrer par la porte. Au reste, le Sauveur désigne ici les faux prophètes, les faux pasteurs qui l’avaient précédé, et ceux qui devaient le suivre : l’Antechrist, les faux christs, Judas, Théodas (Act. 5,36), et tous les autres de cette espèce ; et c’est avec justice qu’il appelle les Écritures la porte. Ce sont elles qui nous mènent à Dieu et nous le font connaître : ce sont elles qui font les brebis : ce sont elles qui les gardent et qui ferment l’entrée aux loups. En effet, les Écritures, comme une porte sûre, empêchent les hérétiques d’entrer, nous garantissent la possession de tout ce que nous tenons à conserver, et nous préservent de toute erreur. Et si nous n’ouvrons pas nous-mêmes cette porte, nos ennemis ne pourront pas facilement nous prendre. Par là nous discernerons et nous connaîtrons ceux qui sont véritablement pasteurs, et ceux qui ne le sont pas. Mais que signifie ce mot : « Dans la bergerie ? » il fait allusion aux brebis et à leur garde. Car, celui qui n’entre pas par la sainte Écriture, mais qui monte par un autre endroit, c’est-à-dire, celui qui se fraye un chemin différent de celui que les Écritures ont tracé et nous ont ouvert, celui-là, dis-je, est un voleur.
Ne le remarquez-vous pas, mes frères, que Jésus-Christ, en invoquant le témoignage des Écritures, montre de cette façon son union avec le Père ? C’est pourquoi il disait aux Juifs : « Lisez avec soin les Écritures » (Jn. 5,39) ; c’est pourquoi il a pris Moïse à témoin, et aussi tous les prophètes. « Tous ceux », dit-il, « qui écoutent les prophètes, viendront à moi ». Et : « Si vous croyiez Moïse, vous me croiriez aussi ». (Jn. 5,46) Mais ici il dit ces choses métaphoriquement. Et lorsqu’il a dit : « Qui monte par un autre endroit », il a désigné les scribes, qui transgressaient la loi, enseignant les opinions des hommes comme la vraie doctrine et les préceptes du Seigneur. Jésus-Christ leur en fait un reproche, en disant : « Nul de vous n’accomplit la loi ». (Jn. 7,19) Le divin Sauveur a fort bien dit : « Qui monte », et non pas qui entre : ce qui marque l’action d’un voleur qui fait ses efforts pour franchir une cloison et ne cesse pas de s’exposer au péril. Voyez-vous ce portrait du voleur ? A présent, observez ce qui désigne le pasteur. « Celui qui entre par la porte, est le pasteur des brebis (2). C’est à celui-là que le portier ouvre, et les brebis entendent sa voix : il appelle les brebis par leur nom (3). Et lorsqu’il a fait sortir ses propres brebis, il va devant elles (4) ». Jésus-Christ a fait le portrait et du pasteur et du larron ; voyons de quelle sorte il leur applique les paroles qui suivent : « C’est à celui-là », dit-il, « que le portier ouvre ». Il continue la métaphore pour donner plus de force et d’énergie à ses paroles. Que si vous voulez examiner en particulier chaque terme de la parabole, rien ne nous empêche d’entendre ici Moïse sous ce nom de portier, car c’est à lui que Dieu a confié ses oracles ; c’est sa voix que les brebis entendent, « et c’est lui qui appelle ses propres brebis par leur nom ».