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vertu et de la puissance de son médecin, et l’interrogent.
Remarquez donc, mon cher auditeur, la sagesse de ce pauvre mendiant, qui parla avec plus de prudence qu’eux tous. Tout d’abord, il dit : « C’est un prophète », sans s’effrayer du mauvais jugement que portaient de lui les Juifs, qui, s’opposant de toutes leurs forces et au miracle et à sa réputation, disaient : « Comment cet homme peut-il être » envoyé « de Dieu, puisqu’il ne garde pas le sabbat ? » Mais il a dit : « C’est un prophète. Mais les Juifs ne crurent point que cet homme eût été aveugle et eût recouvré la vue, jusqu’à ce qu’ils eussent fait venir son père et sa mère ». Faites attention à tous les artifices dont ils usent pour couvrir et faire disparaître le miracle. Mais la vérité est de telle nature qu’elle se fortifie et s’affermit par les mêmes armes avec lesquelles ses adversaires la combattent ; et que les vains efforts qu’ils font pour l’obscurcir, ne servent qu’à la faire briller davantage. Si les Juifs n’avaient pas fait toutes ces choses, beaucoup auraient pu douter du miracle : mais, voici qu’ils agissent comme s’ils n’avaient d’autre but que de dévoiler la vérité : ils ne s’y seraient pas pris autrement, s’ils avaient effectivement travaillé pour Jésus-Christ. En effet, dans l’intention de le perdre, ils demandent : « Comment t’a-t-il ouvert les yeux ? » C’est-à-dire, sans doute, c’est par des prestiges et des enchantements ? En effet, dans une autre occasion où ils n’ont rien à objecter, ils s’efforcent de calomnier dans leur principe les guérisons et les miracles, en disant : « Cet homme ne chasse les démons que par la vertu de Belzébuth ». (Mt. 12,24) Ici, de même, n’ayant rien à objecter, ils se retranchent sur le temps et sur la violation du sabbat ; ils disent encore : Cet homme est un pécheur.
Mais cet homme, que votre envie ne peut souffrir et dont vous déchirez la réputation, cet homme vous a défiés de la manière la plus nette, en vous disant : « Qui de vous me peut convaincre d’aucun péché ? » (Jn. 8,46) Et personne n’a répondu, personne n’a dit : Vous vous dites impeccable, vous blasphémez : or, s’ils avaient eu de quoi lui faire le moindre reproche, sûrement ils n’auraient point gardé le silence. En effet, des gens qui furent capables de jeter des pierres sur lui, lorsqu’il dit qu’il était avant qu’Abraham fût au monde (Id. 58), qui niaient qu’il était le Fils de Dieu, lorsqu’eux-mêmes se vantaient d’être enfants de Dieu, quoiqu’ils fussent des homicides, et qui disaient que celui qui faisait de si grands miracles, n’était pas envoyé de Dieu, parce qu’il ne gardait pas le sabbat, et cela à la suite d’une guérison : ces gens-là, s’il y avait eu le moindre reproche à lui faire, certainement n’y auraient pas manqué. Au reste, s’ils l’appelaient pécheur, parce qu’il semblait ne pas garder le sabbat, leur accusation était ridicule et frivole au jugement même de leurs compagnons qui l’imputaient eux-mêmes à la malignité.
Les Juifs, se voyant donc pressés de toutes parts, tentent quelque chose de plus impudent et de plus insolent encore que tout ce qu’ils avaient fait jusqu’alors. Et quoi ? « Les Juifs ne crurent point », dit l’évangéliste, « que cet homme eût été aveugle, et eût recouvré la vue ». S’ils ne l’ont pas cru, pourquoi donc ont-ils accusé Jésus-Christ de n’avoir pas gardé le sabbat ? Pourquoi n’ajoutez-vous pas foi à ce que dit un si grand peuple, à ce que disent les voisins de cet homme, qui le connaissent ? Mais, comme je l’ai dit, le mensonge se contredit en tout, et par les mêmes armes par lesquelles il combat la vérité, il périt et se détruit : et la vérité même n’en devient que plus brillante et plus lumineuse. C’est ce qui advint alors. Il fallait qu’on ne pût pas dire que les voisins et les témoins n’avaient rien rapporté d’exact, et qu’ils avaient seulement parlé d’un homme qui ressemblait à cet aveugle : les Juifs font venir son père et sa mère, et par là ils font éclater la vérité malgré eux : car le père et la mère connaissaient mieux leur propre fils que tous les autres. Comme ils n’avaient pu intimider le fils, qui publiait hardiment la gloire de son bienfaiteur, ils se flattaient d’affaiblir le miracle par les réponses qu’ils tireraient de ses parents.
Remarquez la malignité avec laquelle ils les interrogent, car que font-ils ? Les ayant fait entrer au milieu de l’assemblée pour les effrayer, ils les interrogent, en disant d’un ton furieux et emporté : « Est-ce là votre fils (19) ? » Et ils n’ajoutent pas : Qui était auparavant aveugle ; mais que disent-ils ? « Que vous nous dites être né aveugle ? » Comme s’ils l’avaient habilement feint, pour confirmer l’œuvre de Jésus-Christ. O hommes exécrables, et